carafe vin

Dans le monde des amateurs (et des professionnels) voilà un sujet qui suscite bien plus de polémiques qu’on pourrait le croire ! Certains carafent presque systématiquement, d’autres jurent leurs grands dieux que c’est un crime… Tentons d’y voir plus clair.

Sous la haute autorité des codes autrefois en cours dans les dîners de la “bonne société”, il était d’usage de carafer les vins (presque toujours un bordeaux, forcément…) non pas tant pour l’aérer et développer ses arômes, que pour éviter à tout prix de donner l’impression du nouveau riche étalant ses étiquettes prestigieuses. La discrétion était alors un marqueur important de l’éducation…

A notre époque où le bling bling est devenu une certaine façon d’étaler son inculture, il y a au moins quelque chose de plus clair : quand on carafe un vin, c’est un geste technique, censé l’améliorer, et plus seulement un code social. Mais ce geste améliore-t-il vraiment les vins ?

Un Normand vous répondrait certainement : cela dépend des vins, et il n’aurait pas complètement tort… Pour commencer, il faut garder à l’esprit que le carafage est une vraie violence faite au vin. Ce dernier passe en effet très brutalement d’une situation totalement (ou presque) à l’abri de l’air à une aération maximale. C’est presque pour lui une seconde naissance. Un acte que l’on peut donc d’ores et déjà proscrire pour tous les vins un peu fragiles et, pour commencer, les vins d’un âge un peu avancé.

A l’inverse, on peut l’envisager pour des vins rouges très jeunes qui ont encore “dans leurs gènes” le long élevage qu’ils viennent de connaître. Une aération rapide permet de les “détendre” un peu et de dissiper leurs éventuels arômes de réduction (de “renfermé”). Une aération qui aurait également lieu petit à petit dans les verres servis, ou dans la bouteille à moitié vide, mais que le passage en carafe accélère.

Mais là encore il faut être prudent. Certains cépages n’aiment pas trop être brusqués. Par exemple le grenache ou le pinot noir… En revanche un jeune vin de Bordeaux ou du nord de la vallée du Rhône (syrah) acceptera plus volontiers cette petite violence.

 

Quelques grands principes à retenir

 

–      Dans le doute, si vous ne connaissez pas bien les caractéristiques de votre vin, il vaut mieux vous abstenir de le passer en carafe. Un carafage peut se révéler catastrophique et sans retour en arrière possible, alors qu’un manque d’aération se corrigera petit à petit dans les verres ou dans la bouteille à moitié vide.

–      La méthode la moins risquée et la plus efficace consiste à ouvrir son vin à l’avance (au moins deux heures, parfois le matin pour le soir), d’en prélever un peu dans un verre afin que le niveau dans la bouteille se situe au niveau des épaules. On peut remettre le contenu du verre prélevé dans la bouteille au moment du service, s’il n’a pas déjà été bu !

–      On peut aussi imaginer verser un peu du vin dans un verre et de voir son évolution sur une vingtaine de minutes. Si le vin n’a absolument pas bougé au bout de ce délai, que ses arômes restent quasi muets, alors il n’y a aucun risque à le passer en carafe. Par contre si vous sentez les arômes se développer en quelques minutes dans votre verre, alors abstenez-vous ! Le vin serait trop bousculé par un carafage.

–      On fait souvent tout un tralala autour du rituel du décantage des très vieux vins (action de verser très lentement le contenu d’une bouteille dans une carafe en laissant le dépôt au fond de la bouteille). Par expérience, c’est un acte extrêmement dangereux pour un vieux vin. Cette oxygénation rapide après des dizaines d’années passées à l’abri de l’air peut se révéler catastrophique ! Elle va en quelque sorte terriblement accélérer le vieillissement du vin à l’air et le transformer en un breuvage quasi mort en moins de vingt minutes… Il vaut mieux s’en tenir à la méthode de l’oxygénation lente (voir paragraphe précédent) après avoir placé la bouteille verticalement deux jours plus tôt pour que les dépôts… se déposent bien au fond, et servir le vin à la bouteille, très délicatement pour ne pas remuer le fond. Evidemment tout ceci peut être nuancé quand il s’agit d’un vin particulièrement solide (tannique) dans un grand millésime. Dans ce cas un décantage peut être envisagé. Mais une fois encore, dans le doute, mieux vaut s’abstenir.

–      Même si on en parle moins souvent, les vins qui bénéficient souvent le plus d’une aération en étant passés en carafe sont les blancs jeunes et fruités (et pas ou très peu boisés). L’aération a tendance à développer leurs arômes primaires fruités et très plaisants.

–      Enfin, si l’on tient absolument à carafer une grande bouteille pour des raisons techniques et bénéfiques à coup sûr pour le vin, mais qu’on a envie de montrer à ses amis qu’il s’agit d’une vraie grande bouteille avant que l’un deux vous sorte un : « Il est pas mal ton petit bordeaux » alors que c’est un Pontet-Canet 2009 noté 100/100 par Parker, rien ne vous empêche de remettre le vin dans sa bouteille (avec un entonnoir) après son passage d’une heure en carafe !

 

Et comme toujours dans la dégustation, c’est votre expérience personnelle acquise au fil des ans qui vous dira le mieux ce qu’il convient de faire. N’hésitez pas à nous la faire partager !

 

 

Tous les vins actuellement en vente sur iDealwine

 

Recherchez le prix d’un vin

A lire dans le Blog iDealwine :

Les mots du vin : pigeage, délestage, remontage, vous avez pigé ?

Pourquoi y a-t-il des bulles dans le champagne ?

Les mots du vin : le soufre, ange ou démon ?

Les mots du vin : ni collé, ni filtré, pourquoi ?

Les mots du vin : petits mensonges sur les rendements

Les vieilles vignes sont-elles toujours vieilles ?

Les vendanges en vert, à quoi ça sert ?

On sert le vin blanc très frais et le rouge à température ambiante. Vrai ou faux ?

Le vin blanc c’est pour le poisson et le rouge pour la viande. Vrai ou faux ?

Il faut toujours servir les blancs avant les rouges. Vrai ou faux ?

Pourquoi le vin rouge… est-il rouge ?

Pourquoi les vins sucrés sont-ils … sucrés ?

 

Cet article a 2 commentaires

  1. LUCOT

    Bonjour
    Merci pour votre intéressante étude sur la décantation des vins. Toutefois et à titre indicatif, tous les vins ont en principe deux types d’acidité, à savoir:
    1. L’acidité volatile qui se dissipe lors, du débouchage cinq à six heures avant dégustation ou pendant la décantation.
    2. L’acidité résiduelle indispensable pour le bon vieillissement.
    Bref , je partage votre avis, la décantation, souvent positive n’est pas toujours souhaitable en fonction de la qualité et de l’age du vin. Il est utile de bien connaître sa cave qui réserve fréquemment des surprises. Une belle étiquette fait toujours réver comme une femme en robe longue !……..
    Paul LUCOT.

  2. Frydman Charles

    Dans l’épisode de Columbo , « quand le vin est tiré », Columbo invite le suspect et sa secretaire au restaurane et commande un très vieux vin, très cher. En fait la propre bouteille du suspect dérobée par Columbo. Le sommelier apporte la bouteille très rare et une carafe remplie de vin. Il sert le vin de la carafe et non celui de la bouteille. On peut s’en étonner, le vin exceptionnel à dû être décante et carafé.

Répondre à LUCOT Annuler la réponse