Les vins blancs liquoreux, charmeurs et souvent plébiscités, ne sont pas tous logés à la même enseigne. Leur richesse en sucre très variable, leur acidité et leur complexité sont dues avant tout à leur méthode d’élaboration, en fonction de leur origine et des cépages utilisés.
En règle générale, les vins doux doivent leur richesse en sucre à un arrêt de la fermentation alcoolique ; ainsi, les levures ne pouvant « aller au bout », il subsiste des sucres résiduels. Cela nécessite à la base des raisins très riches, c’est-à-dire très mûrs, qui ne peuvent être obtenus que par un processus de surmaturation, passerillage ou pourriture noble (botrytis cinerea).
Le passerillage
Le passerillage est une dessiccation naturelle des baies. Il peut se faire sur pied (ou sur souche), impliquant une vendange tardive sur des raisins que le vent et le soleil ont séchés. Il peut également se produire sur des claies en bois ou sur de la paille. Qu’importe la méthode, cela permet d’obtenir un raisin très concentré en sucres et donc un vin moelleux voire liquoreux. Le vin de paille du Jura en est une bonne illustration.
Les raisins (savagnin, chardonnay, poulsard…) sont mis à sécher pendant six semaines sur un lit de paille ou sur des claies. On sélectionne ensuite les plus beaux grains qui se sont ainsi concentrés naturellement en sucres. Puis on presse les baies déshydratées pour obtenir un jus dense et sirupeux (il faut environ cent kilos de raisins pour obtenir une vingtaine de litres de moût). On procède de la même façon en Hermitage, Alsace, Italie (avec la spécialité de l’Amarone della Valpolicella notammennt), et au cas par cas, dans d’autres vignobles.
Le botrytis
Dans le cas du botrytis, que l’on retrouve à Sauternes (vinification avec les cépages sauvignon, sémillon, muscadelle) mais aussi à Tokay (fürmint, zeta, harslevelu), en Alsace (en sélections de grains nobles où il y a 100% de botrytis) ou dans la Loire (Coteaux du Layon) la méthode diffère.
Le botrytis cinerea est un champignon microscopique qui attaque les raisins, à la faveur de brumes matinales et d’après-midi ensoleillées. Les peaux se flétrissent, les sucres se concentrent jusqu’à ne laisser sur pied qu’un raisin desséché, rôti. Les raisins sont cueillis à la main, minutieusement, par tries successives. Ensuite la vinification se déroule comme pour un vin blanc.
Quelles différences ?
En règle générale, le passerillage laisse un peu plus d’acidité dans les vins, les rendant un peu moins sirupeux. Tout l’art des grands liquoreux de botrytis consiste donc à équilibrer le sucre et la fraîcheur, ce que les plus grands (Yquem, Suduiraut et Guiraud entre autres) réussissent à la perfection !
En revanche, les vins issus à 100% de botrytis ont un potentiel de garde immense, supérieur aux vins issus de raisins en surmaturité ou passerillés. En effet, le botrytis a des propriétés le rendant très résistant à l’oxygène. Faites l’expérience d’une bouteille de sélection de grains nobles ouverte au frais, sans la reboucher. Elle peut durer plusieurs semaines sans s’oxyder !
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