Le vin et l’art, l’art et le cristal, le cristal et le vin… Tout se tient ! Sivio Denz inaugurait en Alsace il y a quelques jours la Villa Lalique, ancienne résidence du fondateur de la célèbre maison. Une occasion rêvée de braquer les projecteurs sur les trésors viticoles de l’Alsace.
Quand on aime les vins d’Alsace ET qu’on collectionne les créations de Lalique, répondre à l’invitation de Silvio Denz sonne comme une évidence. Cet homme d’affaires Suisse, qui a bâti son succès sur la parfumerie – il a revendu son entreprise à Marionnaud au début des années 2000 – a fait l’acquisition de la maison Lalique en 2008. Dans la corbeille de cette cristallerie iconique du début du XXe siècle, figurait la propriété dans laquelle le fondateur de la maison, René Lalique, résidait lors de ses séjours en Alsace. De cette résidence située à une petite heure de Strasbourg, à Wingen sur Moder, Silvio Denz décide d’en faire un petit écrin de luxe au cœur du massif des Vosges. A l’issue de quatre années de travaux pharaoniques, la villa Lalique, inaugurée il y a quelques jours, affiche aujourd’hui de solides ambitions. L’hôtel aligne six suites où les créations de Lalique sont mises à l’honneur, dans un style résolument contemporain. L’art et le vin trouvent ici un point de convergence fort. Le propriétaire n’a en effet pas hésité à faire appel aux signatures les plus en vue pour décorer les lieux : en témoignent ces panneaux de cristal conçus par l’artiste Damien Hirst, qui ornent le couloir d’accès à la cave.
Une vitrine pour les grands vins d’Alsace
Silvio Denz, par ailleurs propriétaire des châteaux Faugères, Péby Faugères à Saint-Emilion et Lafaurie Peyraguey à Sauternes, a voulu faire de cet endroit une vitrine des grands vins d’Alsace et plus largement des grands crus du monde entier. Il a confié la conception de la cave à l’architecte Mario Botta, celui-là même qui avait construit le chai de Château Faugères.
Côté restaurant, le talentueux Jean-Georges Klein et Romain Iltis – meilleur sommelier de France 2012 et MOF 2015 – forment un duo de choc. Résultat : la carte des vins, qui compte pas moins de 2000 références – dont la moitié est issue de la cave personnelle du propriétaire – fait logiquement la part belle aux trésors d’Alsace. Le sommelier a fait un choix résolument didactique, en classant les vins de sa région selon deux profils : ceux issus de terroirs cristallins, et dont la structure « verticale » donne un profil gustatif droit, nerveux, minéral ; et ceux qui proviennent de terroirs sédimentaires, et se révèlent amples et denses en bouche. Un outil précieux pour guider le choix des clients parfois désarçonnés par la complexité des étiquettes des vins d’Alsace. La bouteille la plus chère de la carte ? Elle ne vient pas (encore !) d’Alsace, puisqu’il s’agit d’un château d’Yquem 1865, que le sommelier vous ouvrira pour… on préfère ne pas vous dire le prix ;-).
Un guide des vins d’Alsace
Afin de développer des synergies entre ce nouveau lieu dédié à l’art de vivre et la gastronomie, Silvio Denz a choisi de braquer les projecteurs sur les trésors de cette région, avec la complicité de James Suckling. Le critique de vin Américain vient en effet d’éditer son premier classement des meilleurs vins d’Alsace. Pour mener à bien ce projet, Suckling a dégusté pas moins de 650 crus, tant en rouge qu’en blanc. Les résultats, sans grande surprise, mettent à l’honneur les producteurs phares de la région. A l’issue d’une belle dégustation au cours de laquelle une trentaine de producteurs avaient fait le déplacement – même si, pour certains, les vendanges n’étaient pas achevées – pour présenter leurs vins, le déjeuner était composé autour des cuvées distinguées par le guide.
Le Riesling Grand Cru Geisberg 2009 (Trimbach) était servie sur un dos de bar de ligne parfumée à la bergamotte : un vin à la texture veloutée, marqué par des notes florales (fleurs blanches), agréablement citronnées. Cette cuvée d’une belle acidité et d’une remarquable longueur, s’achève sur une finale élégante.
Jean Trimbach expliquait à son propos qu’elle est issue de raisins provenant du couvent de Ribeauvillé, raisins obtenus au terme d’une âpre discussion avec la sœur principale. 3000 bouteilles seulement ont été produites.
En rouge c’est le pinot noir « Grand H » 2013 d’Albert Mann qui a été distingué par le guide. Une cuvée produite à partir de raisins pleinement mûrs. En bouche, sur une pièce fondante de porcelet croustillant au jus réduit, il déploie une texture de dentelle, ourlée de fines notes d’élevage (vanillées). Pas étonnant pour un vin élevé pour un tiers en barriques neuves, un tiers en barriques d’un vin et le tiers restant en barriques de deux vins.
Au dessert, une variation autour de la mirabelle était accompagnée du riesling Sélection de grains nobles « cuvée S » 2009 de la maison Hugel. Un vin qui provient du « terroir des anges » (Angels Rebens), à dominante granitique. A la dégustation il offre une texture gourmande et déploie une belle minéralité, avec une finale légèrement saline qui confère au vin un caractère aérien.
Ce déjeuner aura aussi été l’occasion d’une jolie découverte et d’un gros coup de cœur pour le crémant d’Alsace Clos Liebenberg d’un producteur moins médiatisé, le domaine Valentin Zusslin : une bouteille remarquable, un pétillant rond et aérien, sans aucune trace de verdeur ou d’acidité mal venue. Ce domaine converti à la biodynamie depuis 1997 est – les amateurs d’iDealwine le savent bien – repéré et apprécié chez nous depuis quelques années.
Vous l’aurez compris, si l’on ne trouve dans ce guide ni révélation, ni découverte fracassante, cette nouvelle publication a le mérite de faire la lumière sur une région méconnue des amateurs, et notamment de la clientèle française : chez Hugel, par exemple, 90% des vins sont en effet commercialisés à l’export. Les vins d’Alsace, qui ont encore de belles perspectives de développement devant eux, méritent d’être suivis de près. D’autant que le millésime 2015 s’annonce, dans cette région aussi, plein de promesses.
Adresse :
Villa Lalique – 18, rue Bellevue, 67290 Wingen-sur-Moder
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