Les communes de Bourgogne ont, pour la plupart, adjoint à leur nom celui de la meilleure parcelle – le Musigny pour Chambolle-Musigny, ou le Chambertin pour Gevrey-Chambertin -, à la fin du XIX° siècle. Le climat « Saint-Georges » fut ainsi accolé au nom du village de Nuits en 1898. Pleins feux sur cette appellation, la plus méridionale de la côte de Nuits, et sur sa carte !
Une appellation étendue en surface
Petite bourgade de 5 000 âmes, Nuits-Saint-Georges peut se prévaloir de très nombreux premiers crus répertoriés sur l’appellation communale. Celle-ci couvre en effet un peu plus de 305 hectares, étendus entre les villages de Nuits et de Premeaux-Prissey, dont 143 classés en premiers crus (au nombre de 41). Nuits-Saint-Georges est aussi l’appellation communale la plus méridionale de la Côte de Nuits.
Collection Pierre Poupon www.collection-pierrepoupon.com
Climats et lieux-dits des grands vignobles de Bourgogne (Éditions de Monza – Éditions du Meurger, 2025)
Collection Pierre Poupon www.collection-pierrepoupon.com
Les climats de Nuits Saint-Georges sont les témoins de l’histoire séculaire qui a coulé ici, à l’instar des Saint-Georges, dont on dit qu’ils portaient déjà des vignes en l’an 1000, ou des Vaucrains aux vins robustes, mais aussi des Cailles, Champs-Perdrix, Porets, et les Clos de la Maréchale, des Argillières, des Forêts-Saint-Georges, des Corvées, de l’Arlot. Tous ces noms évocateurs résonnent aux oreilles des amateurs de grands vins.
Une mosaïque de climats et de vins
Les rouges
Produits à partir d’un sol formé de calcaires bruns et d’argile, les nuits-saint-georges rouges arborent généralement une couleur intense et sombre. Puissants, complexes, et bien équilibrés, leurs arômes mêlent à la fois la cerise, le cassis, la truffe, et souvent les épices. En bouche, ils montrent de la vinosité, de la sève, de la charpente et du velours à la fois. Particulièrement robustes, ils sont taillés pour une longue garde.
Jean-Marc Moron, régisseur du domaine des Hospices de Nuits-Saint-Georges, que nous avons contacté pour cet article, élargit un peu notre vision à ce sujet : « L’appellation village est très étendue en surface par rapport aux autres appellations village de Côte de Beaune ou de Nuits, elle va même jusqu’au village de Premeaux-Prissey. C’est donc une des premières caractéristiques de Nuits-Saint-Georges en plus d’être une véritable mosaïque de parcelles quand on se penche sur ses climats. On a souvent une image d’une appellation qui donne des vins structurés, riches, qu’il faut attendre quelques années pour les apprécier.
En vérité au cœur de Nuits vous pouvez trouver des climats qui vous proposent des vins tout à fait différents. Par exemple à l’échelle des Hospices de Nuits, si l’on part au nord sur un parcellaire comme Les Vignerondes, c’est un 1er cru élégant, délicat, des notes florales sur tous les millésimes, un nez très complexe et un plaisir immédiat dès la jeunesse. Alors que plus au sud, prenez notre monopole Les Didiers, c’est bien un vin structuré, puissant, qui ne se caractérise pas spécialement par son élégance et a besoin de quelques années pour se révéler. Ce sont des vérités de terroir, pas de patte du vigneron ou d’effet millésime. J’ai l’habitude de dire qu’à Nuits-Saint-Georges il y a un vin pour chacun car tout le monde s’y retrouve selon ses goûts. »
Les blancs
Les quelques vins blancs de Nuits-Saint-Georges sont issus du chardonnay. Très rares, ils représentent à peine 5% de la production et constituent pour l’amateur des vins d’anthologie.
Jean-Marc nous précise : « Les blancs, et nous avons une parcelle au domaine des Hospices de Nuits, sont rares. Je pense que les blancs de Nuits se caractérisent plus par leur onctuosité et leur gourmandise que par leur tension. »
Une ville ambassadrice des vins de Bourgogne
C’est dans cette commune que fut créée la Confrérie des Chevaliers de Tastevin, célèbre en Bourgogne, et dont le premier « chapitre » se tint en 1934. Le succès croissant des réunions des chevaliers les a ensuite contraints à se déplacer pour tenir leurs réunions au château du Clos-Vougeot.
Nuits abrite également un hospice civil, fondé à la fin du XVII° siècle. Une vente aux enchères des vins s’y tient chaque année sur le même modèle que la vente des Hospices de Beaune, elle permet de vendre aux enchères la production du vignoble des hospices (fruit de donations), pour l’essentiel issue des premiers crus de la commune. iDealwine a d’ailleurs été choisi pour être le commissaire-priseur de l’édition du 9 mars 2025 de la vente aux enchères des vins des Hospices-de-Nuits-Georges.
Une appellation à la page
Jean-Marc nous parle du travail réalisé aujourd’hui par les vignerons de l’appellation : « Depuis quelques années, les amateurs souhaitent consommer les vins plus jeunes, qu’ils soient accessibles plus vite. Les vignerons de Nuits-Saint-Georges ont donc fait évoluer leur travail pour y répondre. Au domaine des Hospices de Nuits nous avons pu avoir un tournant en 2002 depuis la construction de notre nouvelle cuverie. Elle a été pensée pour adapter nos vins : nouvelle réception de vendanges pour mieux chouchouter notre matière première avant la mise en cuves, un travail moins interventionniste en cuves. Le résultat : des vins plus gourmands et aux tanins soyeux, qui sont déjà plaisants en février ou mars. Les millésimes frais s’expriment également mieux, ils étaient souvent très fermés dans leur jeunesse. Et pour le coup le changement climatique va dans notre sens, les raisins sont bien mûrs au moment de la vendange. »
Quel avenir pour l’appellation ?
Nous avons posé la question à Jean-Marc Moron qui fête ses 30 ans aux Hospices de Nuits, et avait travaillé quelques années sur la Côte.
« La demande du passage en grand cru du 1er cru Les Saint Georges, portée par l’appellation, va être remise au comité national de l’INAO courant 2025. Ce serait une belle avancée qu’elle soit acceptée car elle permettrait une reconnaissance par rapport aux villages voisins « concurrents » qui, parce qu’ils ont des grands crus, portent la Côte de Nuits en tous cas dans le cœur des amateurs du monde entier. L’objectif de Nuits est pour moi de coller au peloton Vosne-Chambolle-Gevrey, dont les grands crus se confondent d’ailleurs à l’aveugle avec Les Saint Georges. C’est LE dossier prioritaire pour Nuits, pour lequel non seulement les 13 propriétaires du climat en question se mobilisent, mais également les autres vignerons de Nuits. Tout le monde travaille dans ce sens-là.
L’avenir je le vois aussi par des vins toujours plus appréciés car plus faciles à ouvrir jeunes et plus élégants ; en plus de sortir à des prix plus doux que dans les villages voisins. Cela s’explique notamment car l’appellation est comme je vous disais étendue, ce qui fait que les vins sont moins rares et n’entraînent pas une flambée des prix. C’est aussi la raison pour laquelle les nouvelles maisons de négoce, crées dans les domaines familiaux de la côte qui ne peuvent pas acheter de nouvelles parcelles, se tournent spécialement vers Nuits-Saint-Georges quand ils n’en n’ont pas encore à leur carte.
En règle générale, je suis très optimiste pour l’avenir de l’appellation, qui n’a cessé de progresser depuis les 35 ans où j’y travaille. Nous avons aussi la chance de pouvoir compter sur des têtes d’affiche qui nous portent comme Gouges ou Thibault Liger-Belair. »
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