La dernière campagne publicitaire anti-alcool issue du Ministère de la Santé cible en priorité le vin, une stigmatisation qui passe mal.
Au motif que 15 000 décès par cancer sont imputables à l’alcool, le Ministère de la Santé appelle à la modération dans sa dernière campagne. Jusque-là, chez iDealwine, ça nous va bien. Car notre équipe œuvre tout au long de l’année à dénicher pour nos clients amateurs des vins toujours plus délicieux, dont nous avons plaisir à partager la découverte. Le but ? Promouvoir et accompagner la tendance actuelle à boire moins, mais boire mieux. En revanche, ce qui nous choque, c’est le visuel. Placer un tire-bouchon sur une affiche de la campagne anti-alcool ? Autant choisir une tête de mort pour illustrer l’étiquette une bouteille de vin ! Brutal et sans explication, ce choix pointe du doigt une filière qui n’avait pas vraiment besoin de cela, alors que les vendanges se révèlent délicates dans nombre de régions à l’issue d’une année lourdement marquée par les intempéries (gel, grêle…).
Chez iDealwine, sans entrer dans des débats stériles, nous souhaitons préciser certains points :
1 – La consommation de vin a baissé de 60% entre 1960 et 2015. Par ailleurs, 51% des Français sont des consommateurs occasionnels de vins (ils boivent un à deux verres par semaine). Ce choix d’un tire-bouchon, discriminant au possible pour l’une des filières, était-il donc approprié pour appeler à la baisse globale de la consommation d’alcool ?
2 – Adulés aux quatre coins de la planète, nos vins français devraient constituer un motif de fierté nationale. Premier secteur agricole français (en valeur), la filière viticole emploie un demi-million de personnes. L’ensemble du secteur représente le deuxième poste contributeur à l’excédent de notre balance commerciale.
3 – Indissociable du repas gastronomique français – rappelons que ce dernier a été inscrit à la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité -, le vin est non seulement synonyme de partage, mais il constitue l’un des fondements de notre culture, de notre histoire, de nos racines.
Joël Forgeau, viticulteur et Président de Vin et Société, s’interrogeait récemment à l’antenne de Radio Classique, comment les viticulteurs français peuvent-ils continuer à vendre à l’export un produit que le gouvernement considère le vin comme cancérigène dès le premier verre ? Si l’on va au bout du raisonnement, ce sont donc nos paysages qu’il va falloir refondre en profondeur ! Ce qui reviendrait à modifier profondément la physionomie de pas moins de 66 départements, en arrachant 750 000 hectares de vignes ; à renvoyer 10 millions d’oeno-touristes chez eux (dont 42% d’étrangers) ; et au passage à licencier 558 000 personnes… Autant dire, à renier un pan gigantesque de notre économie, et de notre patrimoine.
Le vin, entre culture et patrimoine
L’économie n’est pas tout, et on ne saurait considérer la production et la vente de vin sous le seul angle. D’ailleurs, chez iDealwine, nous privilégions – et c’est l’une des valeurs qui nous animent depuis la création du site, en 2000 – l’éducation en matière de consommation, plutôt qu’une interdiction pure et simple. Sans donner aucun repère, mais en appelant seulement à l’application d’un vague principe de précaution, comment les consommateurs, notamment les plus jeunes, peuvent-il s’y retrouver ? Nous considérons qu’il est important de s’approprier notre histoire, nos racines, de découvrir, au-delà du vin, la personnalité et la philosophie de celui qui le fait. Et ce faisant, d’en découvrir toujours plus sur les spécificités de chacune de nos régions viticoles qui font la variété et la richesse de notre patrimoine.
Rappelons les mots d’un sage parmi les sages, Aubert de Villaine, propriétaire du domaine de la Romanée Conti et artisan du classement des Climats de Bourgogne au Patrimoine mondial : « Les Climats de Bourgogne que vous venez d’inscrire sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité sont l’héritage d’une très longue histoire qui unit des hommes, une culture, une terre, une plante noble : la vigne. (…) Je pense aujourd’hui à ces générations de vignerons, qui depuis 2 000 ans, ont travaillé sur les Climats, ces hommes et ces femmes qui ont façonné cette terre noble, mais dure, par un labeur millénaire pour y produire des vins qui sont parmi les plus recherchés de la planète ».
Il va de soi que pour apprécier les subtilités de nos grands vins français, il faut savoir raison garder. Une touche de culture venant s’ajouter aux plaisirs du palais et de la gastronomie à la française, n’est-ce pas là l’un des fondements de ce qui caractérise notre pays, et qui fascine le monde entier ? Faisons nôtres les mots de Dali : « qui sait déguster ne boit plus jamais de vin mais goûte des secrets. ».
La filière vin se mobilise
Une pétition appelant au retrait de la campagne circule actuellement sur la toile : https://letirebouchondetrop.fr/. Par ailleurs, l’ANEV (Association Nationale des Elus de la Vigne et du Vin), dans sa lettre adressée au Président de la République Emmanuel Macron, a réagi en réclamant le retrait du tire-bouchon du visuel, au motif que le code de la Santé publique interdit la « discrimination entre les alcools ».
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Vous cherchez la petite bête. Si vous ne l’aviez pas montré du doigt, je n’aurais jamais remarqué ce tire bouchon. Je me passionne pour le vin fin depuis 1985 et depuis cette date, je constate que le vin a pris une place de plus en plus importante dans la vie française: foires au vin, salons des propriétaires particuliers attirent les foules. Le vin est devenu un objet culturel, la route du vin d’Alsace est devenue une étape incontournable. La Bourgogne que j’affectionne énormément est devenue un mythe qui attire les amateurs du monde entier. Je n’ai pas l’impression de vivre dans un pays où la consommation de vin est limitée.
Ne demandez pas aux pouvoirs publics ce qu’ils n’ont pas vocation à faire. Le problème n’est pas là. Il réside essentiellement dans le prix exagéré du vin au restaurant. C’est en vacances qu’on est le plus enclin de découvrir le vin, or c’est bien connu, les restaurateurs arrondissent leurs marges en faisant payer le vin trois fois et plus son prix ce qui encourage les familles modestes à choisir une autre boisson (la bière est restée abordable).
Merci de votre message et de votre intérêt pour notre article. Il ne nous semble qu’il n’y a pas grand chose d’autre sur cette affiche … qu’un tire-bouchon !
D’ailleurs, comme nous le signalons la profession s’est sentie visée, stigmatisée par cette campagne, au moment même où les vendanges se déroulent dans des conditions difficiles pour la profession. Et au moment aussi où les foires aux vins représentent l’un des moments consacrés à l’achat de vin – donc à la promotion de la production viticole française -.
Cette perception n’est peut-être pas celle du consommateur, mais le point de vue d’une filière qui représente plus de 500 000 emplois en France mérite d’être entendu, non ?
Cordialement,
La rédaction
Merci pour votre réponse. J’apprécie beaucoup ce magnifique BLOG.