Frédéric Drouhin interview millésime 2021

La maison Drouhin possède des vignes dans tous les vignobles de cette belle région, entre le Mâconnais, la Côte Chalonnaise, la Côte de Beaune, la Côte de Nuits, et le Chablisien, c’est la raison pour laquelle nous avons décidé de passer un coup de fil de bon matin à Frédéric Drouhin. Deux mots : « séduisant et singulier ». C’est ainsi que celui que l’on appelle le « chef d’orchestre » de la maison résume 2021 en Bourgogne. Zoom sur la qualité de ce millésime.

Une année qui restera dans les corps et les esprits des vignerons bourguignons

En 2021, l’année culturale a été pour le moins que l’on puisse dire, « particulière ». La sortie de l’hiver a été douce, sans grand froid. Quelques pluies ont été les bienvenues, car les nappes phréatiques étaient bien basses à cause d’une pluviométrie plutôt faible dans les derniers mois. Le mois de mars a été frais, laissant place à un début de mois d’avril excessivement chaud, bien plus que la normale, ce qui a donné un coup de fouet à la vigne qui a démarré sa croissance végétative.

Le gel d’avril

Début avril, nous avons vu poindre les premières feuilles, et certains bourgeons étaient sortis de leurs cocons. Là on sait qu’il faut tenir jusqu’en mai, aux Saints de glace, et que cela sera un défi au vu des dernières années. Un gel advectif est tombé sur la Bourgogne dans la nuit du 5 avril (à distinguer du gel radiatif), qui se caractérise par une masse d’air en mouvement. A noter que cette année-là, la plupart des régions de France ont été touchées. De Chablis à Mâcon, nous sommes passés de +5°C à -7°C en quelques heures. A la maison Drouhin, nous étions sur le pied de guerre et avons mis les moyens pour lutter, notamment en installant des bougies dans le Clos des Mouches, le Charlemagne et le Montrachet. J’étais dans les vignes à ce moment-là, et même si finalement notre lutte a été inefficace, nous n’avons pas pu nous mordre les doigts de ne pas y être allés. Certains voisins avaient installé des centrales thermiques, d’autres plus rares ont fait voler des hélicoptères… Le gel a touché entre 50 et 100% dans certaines parcelles, par exemple nous avons fait 5hl/ha dans le Clos des Mouches (normalement l’appellation autorise 48hl/ha pour les premiers crus rouges et 55 pour les premiers crus blancs).

gelees-noires-iDealwine-gel

Et la vie a repris son cours…

Malgré ce triste épisode, la croissance a repris. Ce qui n’a pas gelé, a continué de pousser, et pour ce qui a gelé, et bien il a fallu que ça repousse – bon nombre des vins sont issus de cette 2ème pousse -. Nous avions donc deux rythmes différents à considérer. Le mois de juin a été beau, lumineux, venteux, ce qui a permis une floraison rapide, puis une pollinisation naturelle de toutes les vignes. La fleur est sortie mi-juin pour les chardonnays et le 18-20 juin pour les rouges de la Côte de Nuits. Le mois d’août a été assez sec mais lumineux, comme septembre. Nous avons finalement démarré les vendanges le 17 septembre par une parcelle de pinot noir de Chorey-les-Beaune, le 19 septembre nous étions dans le Montrachet.  

« Small is beautiful ! », quand la qualité dépasse la quantité

Sans surprise, les rendements étaient donc très faibles (surtout en blanc), mais la qualité a été au rendez-vous. Comme le résume bien François Labet, co-Président du BIVB, « Small is beautiful ! ». La vendange a été belle, les équilibres entre sucre et acidité ont été satisfaisants, il s’agissait donc de garder cette belle harmonie dans la vinification.

Les vinifications chez Drouhin

Chez Drouhin, nous aimons la vendange entière pour donner de la matière au vin et lui permettre de bien vieillir, nous avons donc fait un tri drastique en vignes puis avons laissé environ 40% de grappes entières (les rafles étaient très belles en 2021) dans les grandes cuvées. Nous positionnons les raisins en millefeuille dans la cuve, alternant des couches éraflées et des couches non éraflées, on laisse alors patienter un peu puis nous travaillons cette petite compotée de fruits rouges. Pour les blancs, nous pressons les raisins, puis place au débourbage et nous mettons les vins dans les fûts. Nous aimons les longs élevages chez Drouhin, même pour les blancs, et nous gardons nos fûts 5 ans. La fermentation est opérée par l’action des levures indigènes.

Bilan d’un millésime : séduisant, accessible jeune, aux textures agréables

Le millésime 2021 est finalement assez classique, séduisant. Il présente une belle finesse des tanins, une texture de vin très agréable, et ce sont des vins digestes, au taux d’alcool plus bas que ces dernières années. Ils peuvent donc s’apprécier plus jeunes. Si j’avais dans ma cave des 2019, 2020, 2021 et 2022, j’aurais plaisir à boire aujourd’hui des 2021, c’est une caresse ce millésime, le calme après la tempête. J’ai goûté récemment un grands-échézeaux 2021, une bouche multidimensionnelle, une plénitude, une harmonie, une certaine densité, des notes florales et fruitées, un vin très séduisant depuis sa naissance dans la cuve et jusqu’à aujourd’hui. Vous ne pourrez certainement pas les garder aussi longtemps que les 2020 ou les 2022. Mais il n’y en a pas beaucoup… donc foncez !

Un millésime représentatif de son terroir

Ce qui est aussi passionnant, c’est que 2021 est vraiment représentatif de son terroir. Le marquage du millésime s’efface au profit des climats, c’est donc un millésime idéal pour le concours du meilleur sommelier car on y trouve ce qui fait la parcelle. Chaque vignoble, du nord au sud de la Bourgogne, et chaque appellation restent bien à leur place.

Nous remercions Monsieur Drouhin pour cet échange passionnant.

Tous les vins du domaine en vente

Les 2021 en Bourgogne

Lire également dans le Journal iDealwine :

Les notes du millésime 2021

Le millésime 2021, immense pour les blancs de Bordeaux

Laisser un commentaire