Astringence vin

Alors que dernièrement, le Lallemand Tour s’est longuement penché sur la question de l’astringence dans le vin, chez iDealwine aussi on a voulu en savoir plus sur cet aspect si particulier du vin, à la fois essentiel et déstabilisant lorsqu’il est trop marqué.

Pour sa 8e édition, le Lallemand Tour (groupe produisant des biotechnologies dédiées à l’œnologie) qui s’est tenu à Nîmes, le 19 janvier, a réuni des experts autour du thème de la dimension tactile du vin. Les différents intervenants ont accordé une place de choix à l’astringence, une composante décrite comme assez mystérieuse. Ils ont bien sûr insisté sur son rôle nécessaire dans l’équilibre du vin, tout en soulignant qu’elle est paradoxalement souvent « rejetée par la majorité des consommateurs », comme l’a rappelé Barry Dick, Master of Wine 2013.

Pour commencer, faisons le point sur ce qu’est précisément l’astringence ainsi que sur ses origines.

Qu’est-ce que l’astringence d’un vin ?

L’astringence est une composante de la dimension tactile du vin, qui se manifeste par cette sensation de resserrement de la muqueuse buccale, un caractère un peu âpre et rude en bouche, comme une sensation de sécheresse. Cette sensation ne se manifeste pas qu’avec les vins rouges, on la retrouve par exemple en dégustant un thé trop infusé, ou encore en goûtant un artichaut cru.

D’où provient l’astringence du vin ?

Lors des conférences du Lallemand Tour, Julie Mékoué, chargée R&D pour le groupe a rappelé l’origine de l’astringence : « On sait que les sels de cations, l’alcool, les acides organiques et les tanins interagissent avec les protéines salivaires et les cellules buccales. Ces interactions font baisser le pouvoir lubrifiant de la salive. En plus, les précipités tanins-protéines salivaires donnent la sensation de particules en bouche »1. L’astringence reste un caractère du vin assez mystérieux qui demeure encore en partie mal compris, mais en résumé, les propriétés astringentes des tanins sont dues à leur aptitude à précipiter les protéines salivaires, entraînant ainsi une diminution des sécrétions salivaires et de la lubrification des muqueuses buccales.

Astringence vin

L’astringence provient donc principalement des tanins. Pour rappel, les tanins, ce sont ces substances organiques que l’on trouve dans la plupart des végétaux (feuilles de thé, fruits, écorce d’arbre…) mais aussi dans le raisin, où ils sont présents à la fois dans la peau, les pépins et la rafle.  Mais on trouve aussi dans le vin des tanins issus de l’élevage en fûts de chêne (du fait de la libération d’éllagitanins du bois). C’est lors des macérations que l’essentiel des tanins se transmettent au vin, ce qui explique qu’ils soient beaucoup moins présents dans les vins blancs, qui ne macèrent pas.

Il existe différents types et différentes qualité de tanins et ces différences influent sur le degré d’astringence du vin. Selon l’Inra et l’Australian Wine Research Institute, la taille des molécules est par exemple particulièrement importante du point de vue des caractéristiques organoleptiques du vin : plus les tanins sont gros, plus ils ressortent astringents en bouche2. Pourtant, les tanins présents dans la peau des raisins, dont la taille est plus importante que celle des tanins des pépins, apparaissent plus doux que ces derniers. Cela s’explique par les autres paramètres influant sur l’astringence des tanins, à savoir leur composition chimique. En effet, si les tanins des pépins semblent être plus rugueux que ceux des pellicules, c’est parce qu’ils sont plus « galloylés » : ils contiennent de l’acide gallique qui augmentent leurs interactions avec les protéines salivaires et augmente donc l’astringence ; au contraire, les seconds seraient plus « trihydroxylés »2. C’est ce qu’expliquent Patrick Vuchot et Stéphane Vidal : « Le pourcentage de galloylation (plus élevé dans les pépins) renforce le niveau d’astringence, alors que le niveau de trihydroxylation (spécificité des pellicules) le réduit ». Évitons le carnage en ne rentrant pas dans les détails chimiques très complexes et résumons comme ceci : Plus les molécules des tanins sont complexes (polymérisées) plus elles sont astringentes car elles interagissent plus avec les protéines de la salive. Elles les « assèchent » plus. Or les tanins issus des pépins ont une particularité : ils sont polymérisés par une substance appelée l’acide gallique ; malgré leur petite taille, ils sont donc plus complexes et plus astringents.

Enfin, la sensation d’astringence peut également être renforcée par le degré d’alcool et d’acidité du vin (pH). Et bien sûr les paramètres de dégustation influent également sur la perception de l’astringence (température, environnement, aliments …).

Comment peut-on limiter l’astringence du vin ?

L’astringence diminue naturellement avec l’augmentation de la température, du sucre et du glycerol. Le type d’extraction durant les macérations va également jouer sur l’astringence par la quantité de tanins qui va être extraite : plus les macérations sont longues, plus la quantité de tanins extraite sera importante ; tout comme l’agitation des moûts (pigeage, délestage, remontage …) accentue l’extraction.  De même, le vieillissement d’un vin permet de réduire son astringence puisqu’il assouplit les tanins sous l’effet du temps, de la température et de l’oxygène. L’exposition du vin à l’oxygène entraîne petit à petit la condensation des tanins avec d’autres molécules (les anthocyanes) qui les rendent moins actifs (le degré de polymérisation moyen des tanins diminue).

Certains spécialistes étudient les moyens de réduire l’astringence des vins, comme Fernando Zamora, professeur et chercheur à l’université de Taragone, qui a présenté lors du Lallemand Tour des pistes allant dans ce sens. Il conseille notamment de faire varier la date de récolte et la durée de cuvaison, de une à quatre semaines ; il explique également que les macérations préfermentaires à froid sont intéressantes car même si elles augmentent le nombre de tanins, elles ont l’avantage de diminuer la proportion de tanins galloylés ; enfin, il avance la piste de l’ajout de levures sèches inactives qui diminueraient le degré moyen de polymérisation et donc l’astringence.

Pour autant, l’astringence dans une certaine mesure reste nécessaire à l’équilibre d’un vin et participe à sa qualité, il ne faut donc pas chercher à trop la réduire.

1 In Marion Bazireau, « L’astringence garde ses mystères », vitisphere.com, 21/01/2016

2 In Catherine Bioteau, « Oenologie – Le goût des tanins entre astringence et amertume », vigne.reussir.fr, 31/03/2004

3 In Nancy Terrier, « Vers une compréhension des mécanismes impliqués dans la synthèse de tanins astringents », cepia.inra.fr, 04/06/2013

4 In Patrick Vuchot et Stéphane Vidal, « Piloter l’astringence, la couleur et le niveau aromatique des vins », Guide de la vinification rhodanienne, institut-rhodanien.com, novembre 2005

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