Château Lafite-Rothschild

Pas besoin d’être un expert pour savoir que Château Lafite est une valeur sûre. Mais savez-vous pourquoi ce vin est devenu en quelques siècles le graal de tous les amateurs de grands vins ? Flashback sur ce cru mythique : hier à la table de Louis XIV, et demain dans votre cave… Qui sait ? Découvrons ensemble ce mythe bordelais.

Naissance sous une bonne étoile

Contrairement à l’habitude des châteaux et domaines bordelais, le Château Lafite-Rothschild ne tire pas d’abord son nom de celui d’une famille. Il fut d’abord la seigneurerie Lafite, nom tiré du vieux gascon « la hite », signifiant « la butte », enracinée ici sur un territoire au nord -ouest de la commune de Pauillac depuis le XIIIe siècle. Il produisait blé et vin sur 110 hectares dans les lieux de Milon, Loubeyres, Anseillan et Pauillac. Mais c’est la famille Ségur des Francs qui au XVIIe siècle structure le domaine viticole et lui donne ses lettres de noblesse. Un mariage scellé entre les Ségur et les Clauzel, propriétaires du Château Latour, valut à l’héritier Nicolas Alexandre de Ségur le surnom de « Prince des Vignes ». On comprend pourquoi…

Lafite, le séducteur

1706 c’est l’envol outre-Manche : Lafite et Latour apparaissent pour la première fois sur les registres de vente de marchands britanniques. Les grands hommes du Grand Siècle invitent Lafite à leur table : Richelieu l’introduit à la cour de Versailles et le baptise « Fontaine de Jouvence », Louis XV s’en délecte et le couronne « vin du roi », Thomas Jefferson, conquis par ce vin lors d’un voyage diplomatique en France, devint un ambassadeur de choix pour faire rayonner Lafite jusqu’en Amérique ! Un temps propriété d’une maison de négoce néerlandaise puis confisqué et devenu bien national à la Révolution, pendant près d’un siècle le beau bébé passe de mains en mains pour terminer dans les bras de la branche française de la famille Rothschild qui l’adopte pour de bon en 1868 avec en tête une idée fixe : faire de Lafite le porte-étendard de Bordeaux, l’icône de Pauillac. Il faut dire que le vin bordelais coule dans les veines de cette famille de banquiers : 15 ans auparavant, Nathaniel de Rothschild s’était offert le Château Mouton.

Chateau Lafite Rothschild James de Rothschild
Le 8 août 1868, le Baron James de Rothschild, banquier passionné de vin, acquiert le Château Lafite

Gloires et déboires

Déjà au début du XIXe, Lafite est en tête en termes de cote : en 1814 le tonneau est vendu à 3000 francs (summum pour le millésime) contre 2 600 francs pour Latour et Margaux. A l’occasion de l’Exposition Universelle en 1855 le classement des vins de la Rive Gauche reconnaît officiellement et définitivement le statut particulier de Lafite-Rothschild comme premier cru classé de Pauillac. La propriété entre dans la légende du club des 5 premiers crus classés (Margaux, Latour, Haut Brion et Yquem). A la gloire succèdent des fléaux qui endommagent le vignoble et ternissent l’éclat de la maison : crise pour la vigne (phylloxéra et mildiou), crise économique de 1929 et occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale. Quatre millésimes exceptionnels ponctueront tout de même la période, venant éclaircir ce sombre tableau : 1899, 1900, 1926 et 1929.

Un mythe désormais mondial

Après la tempête, le calme : parce que la famille Rothschild raisonne sur le temps long, de génération en génération elle s’attèle à asseoir la notoriété du cru, mais aussi à enrichir son patrimoine viticole. A partir de 1946, à la sortie de la guerre, le baron Elie de Rothschild s’attelle à remettre le domaine en état : il rachète son voisin, le Château Duhart-Milon. Le tandem que forment pendant plus de 30 ans, Eric de Rothschild et Christophe Salin reprenne le relais avec talent. Ce dernier œuvra au rachat de propriétés françaises (Château Rieussec à Sauternes, Château L’Evangile à Pomerol et le domaine d’Aussières, en Languedoc). Et cet infatigable voyageur va également conquérir le monde pour implanter le groupe au Chili (Vina Los Vascos), en Argentine (Bodegas Caro) et jusqu’en Chine (dans la province du Shandong), pays ou l’étoile de Lafite fait briller le regard des amateurs depuis déjà plusieurs décennies.

Chateau Lafite Rothschild Prooftag

Victime de son succès, Lafite a fait l’objet d’une spéculation intense dans l’Empire du Milieu, et s’est également trouvé confronté à la production de faux. D’où l’adoption en 2012 du système d’authentification Prooftag.

Le journaliste et critique américain Robert Parker a lui aussi joué un rôle déterminant en plaçant Lafite sur le podium à plusieurs reprises : quatre millésimes – 1986, 1996, 2003 et 2010 – ont en effet reçu la note maximale de 100/100.

Les cours de Château Lafite, au sommet jusqu’à la fin des années 2000, ont retrouvé des niveaux plus sages lorsque la Chine a adopté des mesures destinées à lutter contre la corruption, et la politique des « cadeaux » qui l’accompagnait.

Un nouveau tandem

chateau lafite rothschild

En 2017, Eric de Rothschild passe la barre du navire à sa fille, Saskia. Assistée par Eric Kolher, directeur technique et de l’œnologue Eric Boissenot, elle s’attache à perpétuer cette tradition d’excellence et de raffinement. Si elle incarne la sixième génération à la tête du domaine, elle s’autorise à moderniser le domaine et ses vins : en 2022, elle dévoile une nouvelle cuvée parcellaire nommée Anseillan. Eric Kolher le souligne : « On ne sort pas de nouvelle cuvée très souvent à Lafite Rothschild. La dernière fois cela devait être à la fin du XIXème siècle avec Carruades, notre second vin. C’est donc un petit événement ». Elle a été pensée comme une cuvée plus accessible, sans rien sacrifier de l’esprit et de la qualité Lafite. Prête à affronter les défis du changement climatique, Saskia de Rothschild se pose également en gardienne de ce terroir : des essais en bio et en biodynamie sont menés au domaine depuis 2016. Le domaine a obtenu le label B Corp cette année, signe d’un engagement environnemental fort.

Un terroir unique pour un vin mirifique

Le domaine de 112 hectares dispose d’un sol de graves fines et profondes apportant un bon drainage ainsi que de sables éoliens sur un sous-sol de calcaire tertiaire. Le vignoble comprend trois grandes zones : les coteaux autour du Château, le plateau des Carruades contigu à l’ouest et – originalité – une parcelle de 4,5 ha sur la commune voisine de Saint-Estèphe mais faisant partie historiquement du domaine.

Chateau Lafite Rothschild vignes

Viticulture et elevage : entre tradition et modernité

Eric Kohler, le directeur technique du domaine privilégie une culture raisonnée. L’équipe technique veille aussi aux destinées du Château Duhart-Milon. Les chais allient grandes cuves en chênes et cuves inox de petite taille pour assurer un tri parcellaire jusqu’à la fin de la vinification. Le chai circulaire de forme orthogonale et voûté construit en 1987 par l’architecte Ricardo Bofill est destiné à l’élevage des vins de seconde année. Cette véritable cathédrale souterraine peut accueillir jusqu’à … 2 200 barriques ! Pour la vinification, le domaine dispose d’une belle collection de cuves en inox et en ciment de petite capacité pour le merlot. En 2010, le domaine a investi dans un cuvier divisionnaire, c’est-à-dire dans de petites cuves en inox, afin de prolonger la sélection parcellaire.

Chateau Lafite Rothschild

Le passage dans les tonneaux est une étape si importante que les domaines Barons de Rothschild ont investi dans une tonnellerie à demeure. Cinq tonneliers fabriquent 2 000 barriques utilisées dans les différentes propriétés du groupe. Le grand vin du Château passe dans ces barriques neuves, tandis que le second vin est vieilli dans des barriques anciennes.

Dans les coulisses où est modelé ce vin de légende, l’équipe relève à chaque millésime le défi de perpétuer, dans la tradition, l’esprit Lafite.

Chateau Lafite Rothschild Eric Kohler
Château Lafite-Rothschild: ce qu’en disent les guides :

Cru suprême de Pauillac, Lafite doit son inégalable finesse à ses graves du nord de l’appellation, sur socle calcaire, avec des sélections extrêmement rigoureuses qui écartent plus de la moitié de la récolte. Fortement marqué par le cabernet-sauvignon, souvent supérieur à 90 % de l’assemblage, Lafite brille par ses notes de cèdre et de graphite qui demandent plus de quinze ans pour s’épanouir.

Bettane et Desseauve : cinq étoiles sur cinq

Lafite s’impose comme le plus raffiné des vins du Médoc lorsqu’il déploie, après quelques années de vieillissement, ses arômes envoûtants de graphite et de mine de crayon. Le déguster revient à découvrir un toucher et une sève uniques.

La Revue du vin de France : quatre étoiles sur quatre
Château Lafite-Rothschild

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  • Château Lafite Rothschild 1er Grand Cru Classé : Comment parler du Château Lafite Rothschild sans parler de ce vin qui en fait sa renommée ? Nectar d’une finesse sans égale, aux notes de fruits rouges, noirs, de buis et d’épices, à la bouche dense, à la finale complexe. 
  • Carruades de Lafite Rothschild : C’est ici un second vin qui ne dit pas son nom. Produit avec les mêmes soins que son grand frère, il livre de délicieux arômes de cassis et framboise, équilibrés par des notes mentholées. Le vin est complet, égalant, opulent et soyeux. Une très belle introduction au domaine.
  • Cognac Lafite Rothschild Très Vieille Réserve : Qui a dit que les vins rouges étaient les seuls hommages à la région bordelaise ? La famille Rothschild a ici souhaité mettre en valeur sa collection de cognac en sélectionnant les meilleures eaux de vie. Et le pari n’est pas manqué avec ce vin de méditation aux notes florales et d’épices douces.
  • Armagnac Lafite Rothschild Très Vieille Réserve : Ce vin de méditation a été sélectionné avec les même soins que le cognac afin de ne proposer que le meilleur : un armagnac extraordinaire aux notes de cannelle et de sous-bois et aux parfums de noix fraiche.

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