Combien coûte un hectare de vigne ?

En France, le prix des vignes a été multiplié par 2,5 en 20 ans. Nous nous sommes procuré le rapport annuel de la Safer sur le prix des terres, et en voici la synthèse. Après une faste année 2022 avec un prix des vignes à la hausse quasiment partout, l’année 2023 a été plus mitigée et l’année 2024 a plutôt marqué une stabilisation du marché des vignes. Mais quel est donc le prix des vignes ? A Bordeaux, en Bourgogne, en Champagne ou dans le Rhône ? On vous dit tout ici !

1. Stabilisation du marché des vignes françaises en 2024
2. Le marché des vignes françaises en demi-teinte en 2023
3. Le marché des vignes françaises en progression en 2022
4. Région par région : des inégalités de prix marquées
5. Le prix moyen des vignes des principales appellations
6. Combien rapporte un hectare de vigne ?

Stabilisation du marché des vignes françaises en 2024

Rappel de la conjoncture de 2024 :

• Côté volumes, la récolte viticole française est en baisse de 24 % par rapport à 2023, un niveau historiquement bas en raison de conditions météorologiques très défavorables et du mildiou. On remarque des baisses particulièrement sévères dans le Jura, en Champagne et en Bourgogne notamment.
• Sur le marché français, les ventes en volume de vins tranquilles en grandes et moyennes surfaces continuent de baisser (- 5 %), particulièrement les rouges (- 7 %) et les rosés (- 6 %).
• Dans la période août-décembre 2024, on constate un léger rebond des exportations de vins français, hors spiritueux en volume et en valeur (+ 4 %) par rapport à l’année précédente sur la même période. Cela s’explique par le succès des vins sans IG et un retour du marché nord-américain. En même temps, le cognac continue de progresser en volume exporté là où celui du champagne baisse pour atteindre son niveau de 2020.

En 2024, le prix moyen de vignes AOP s’élève à 176 400€ / hectare, soit une hausse de +1,4% (vs 2023). On note, pour toutes les vignes confondues (avec ou sans AOP), 8 650 transactions (- 1,4 %) pour 16 000 ha (+ 0,1 %) vendus à une valeur totale de 1 111 M€ (- 4,8 %). A noter que la valeur totale des échanges est pour la 4ème année consécutive au dessus du milliard d’euros. Quelques éléments d’explication : un net repli des exportations de cognac depuis 2022, un marché en repli (valeur et surface) dans le Languedoc-Roussillon et le Sud-Ouest. À l’inverse, en Vallée du Rhône et Provence, on gagne en nombre de transactions (+ 7,5 %) et en surface (+ 34,1 %). On constate que les transactions repartent à la hausse en Bordeaux-Aquitaine (+ 7,2 %) après une nette diminution en 2023 (- 20,6 %), tandis que la valeur décroche (- 38,2 %) pour atteindre son niveau le plus bas depuis 2011. Côté Bourgogne-Beaujolais-Savoie-Jura et Val de Loire-Centre, la valeur continue de progresser.

Le marché des vignes françaises en demi-teinte en 2023

Après une belle progression en 2022, le marché des vignes françaises en 2023 est plus mitigé.

Voici un rappel de la conjoncture en 2023 :

• Une récolte française en hausse de 4% (et +8% par rapport à 2018-2022), bien que le sud soit en repli, ayant été touché par le mildiou et la sécheresse
• Une baisse des ventes sur le marché intérieur (-4% de volume en grandes et moyennes surfaces) et à l’export, à l’image du deuxième semestre où les volumes et la valeur diminuent (respectivement -4% et -10%). La Chine continue sur sa tendance en marquant un fort recul.
• L’année 2023 enregistre une baisse de transactions (-7,6% pour retrouver le niveau de 2018) et des surfaces échangées (-12,8%). Toutefois, grâce à quelques ventes exceptionnelles, la valeur est en hausse (+15,8%).

En 2023, le prix moyen de vignes AOP s’élève à 153 700€, soit une hausse de +1,6% (vs 2022). Les régions Bordeaux, Sud-Ouest et Languedoc-Roussillon connaissent, elles, une baisse. Hors AOP, le prix moyen des vignes baisse de 1,8% (après 13 années de hausse). Une grande disparité entre les régions existe : le bassin viticole Bourgogne-Beaujolais-Savoie-Jura augmente sa valeur de +8% tandis qu’une crise frappe Bordeaux (-4,3% cette année après -3% l’année dernière) et les côtes-du-rhône. A Bordeaux, alors que seules les AOC Bordeaux et Côtes de Bordeaux étaient impactées, le Médoc (-29%), Haut-Médoc (-17%) et Pessac-Léognan (-10%) accusent le coup.

Le marché des vignes françaises en progression en 2022

Pour rappel, voici la conjoncture en 2022 :

• La production viticole avait augmenté de 21% par rapport à la faible année 2021 (frappée par le gel, -29% par rapport à 2020).
• Les exportations de vins étaient à la hausse en valeur, mais peu en volume. Les raisons ? Inflation générale et confinement en Chine (représentant quelques 45% des ventes en AOP Bordeaux, même si en baisse depuis quelques années).
• L’année 2022 avait enregistré un très grand nombre de transactions viticoles, avec 9 490 opérations (+1,1% par rapport à 2021), concernant 18 400 hectares (+5,4%) pour un montant de 1 milliard d’euros (-7,9%). Le niveau de surface échangé attint un record, mais le montant échangé fut en baisse. Y avait-il trop de vignes sur le marché ?

En 2022, le prix moyen de vignes AOP s’élevait à 151 200€/ha, soit une hausse de +2,3% (vs 2021) selon la Safer, qui observait également un mouvement de concentration des achats de vignes sous la forme d’un montage actionnarial, au détriment des vignerons qui détiennent aujourd’hui de moins en moins de surface. En 2017, les vignerons détenaient 43% des surfaces, contre 63% en 1993. Ainsi, en 2022, les personnes morales agricoles (sociétés d’exploitations et de portage) confirmaient leur présence (+6% en nombre et +27,5% en surface). Une tendance qui, avec l’augmentation constante des prix du foncier ne devrait pas s’atténuer dans les prochaines années. D’énormes frais de succession freinent également considérablement les vignerons. Par exemple, en Champagne selon le syndicat général des vignerons, il faut s’acquitter de plus de 100.000€ de frais à l’administration fiscale afin d’hériter d’un hectare (valorisé en moyenne à 1 million d’euro).

Région par région : des inégalités de prix marquées

En 2024, l’évolution du prix des vignes évolue selon la catégories de vins :

• -1,1% pour les AOP
• -3,9% pour les AOP hors Champagne
• -7,0% pour les hors AOP
• -9,8% pour les eaux-de-vie AOP

Voici les évolutions de prix à l’hectare entre 2023 et 2024 :

• Alsace-Est : -0,7%, pour atteindre 117 000€/hectare (beaucoup de disparités entre les cépages, terroirs et niveaux d’appellations)
• Bordeaux-Aquitaine : -18,4%, pour atteindre 101 100€/hectare (les appellations Bordeaux et Côtes de Bordeaux se vendent à 8 000 euros/hectare en moyenne, toutes les appellations baissent désormais : Saint-Emilion, Pauillac, Margaux…)
• Bourgogne-Beaujolais-Savoie-Jura : +11%, pour atteindre 295 900€/hectare (porté par les appellations de Côte-d’Or et notamment les premiers crus en blanc, ainsi que par Chablis)
• Champagne : +1,7%, pour atteindre 1 121 800€/hectare (une récolte très impactée)
• Corse : 0%, pour atteindre 23 700€/hectare
• Languedoc-Roussillon : -5,1%, pour atteindre 14 300€/hectare (vins rouges en baisse, sécheresse, des campagnes d’arrachage ont débuté)
• Sud-Ouest : -9,1%, pour atteindre 13 400€/hectare (vins rouges en baisse, excès d’eau et mildiou, des campagnes d’arrachage ont débuté)
• Val de Loire-Centre : -2,2%, pour atteindre 51 000€/hectare (Pouilly-Fumé, Reuilly montent, Touraine, Anjou et Saumur baissent)
• Vallée du Rhône-Provence : -0,5%, pour atteindre 58 700€/hectare (situation contrastée, chute des Côtes du Rhône vs hausse de certaines appellations, Châteauneuf-du-Pape, Saint-Joseph… Dans le Var, une conjoncture moins bonne pour le rosé)

La valeur du patrimoine foncier viticole AOP est concentrée pour plus de la moitié (51%) en Champagne, et pour 85% dans trois bassins qui ne couvrent pourtant que près de la moitié des surfaces : la Champagne, Bordeaux-Aquitaine et le bassin Bourgogne-Beaujolais-Savoie-Jura.

Entre 1997 et 2017, le prix moyen national des vignes AOP a été multiplié par 2,5 (en valeur constante).  Le premier facteur d’augmentation du prix des vignes reste la baisse des taux d’intérêts, associé à une augmentation du revenu viticole. Le prix des vignes hors AOP, qui avait nettement diminué entre 2000 et 2010, remonte depuis 2010. Une remontée qui peut s’expliquer en partie par le dynamisme du Languedoc sur ce segment (qui représente la majorité des surfaces hors AOP) et aussi par l’arrachage et la replantation de cépages plus qualitatifs.

Le prix moyen des vignes des principales appellations

La méthodologie choisie par la Safer tend à lisser l’évolution des prix, en éliminant les transactions les plus élevées et les transactions les moins élevées. Pour certaines valeurs, les derniers prix communiqués par la Safer datent de 2019. Pour d’autres, les évolutions montrent les prix en 2024 et les tendances de marché entre 2023 et 2024 (dernier rapport publié en 2025), ou bien lorsqu’aucune donnée nouvelle n’a été communiquée les tendances de marché entre 2022 et 2021.

A Bordeaux

• Pauillac : 2 500 000 €/ha en 2024 (-17% par rapport à 2023)
• Saint-Estèphe : 400 000 €/ha en 2024 (-20% par rapport à 2023)
• Saint-Julien : 1 800 000  €/ha en 2023 (stable par rapport à 2022)
• Moulis : 40 000 €/ha en 2024 (-43% par rapport à 2023)
• Margaux : 1 400 000 €/ha en 2024 (-7% par rapport à 2023)
• Pessac-Léognan :  450 000 €/ha en 2024 (stable par rapport à 2023)
• Sauternes : 28 000 €/ha en 2024 (stable par rapport à 2023)
• Pomerol : 2 000 000 €/ha en 2023 (stable par rapport à 2022)
• Saint-Emilion : 250 000 €/ha en 2024 (-7% par rapport à 2023)
• Fronsac : 21 000 €/ha en 2023 (-5% par rapport à 2022)

En Bourgogne

Par appellation

• Les grands crus : 6 500 000 €/ha (en 2019)
• Les premiers crus blancs : 1 650 000 €/ha (en 2019)
• Les premiers crus rouges : 710 000 €/ha (en 2019)

Par département

• Yonne (Chablisien et Auxerrois) : 204 900 €/ha (en 2024, +21% par rapport à 2023)
• Côte d’Or (Côte de Nuits et Côte de Beaune) : 1 022 600€/ha (en 2024, +11% par rapport à 2023)
• Saône-et-Loire (Côte Chalonnaise, Mâconnais, Beaujolais) : 92 400€/ha (en 2024, +4% par rapport à 2023)

Quelques détails

Premiers crus blancs de Côte d’Or : +13% entre 2023 et 2024
Chablis premier cru : 525 000 €/ha (+ 25 % entre 2023 et 2024)

En Champagne

Côte des Blancs : 1 631 700 €/ha (-3% par rapport à 2023)
Montagne de Reims et Grande Vallée (Grands crus et premiers crus) : 1 229 200 €/ha (+4% par rapport à 2023)

• Aisne : 882 200 €/ha en 2024 (+2% par rapport à 2023)
• Marne : 1 202 600 €/ha en 2024 (+2% par rapport à 2023)
• Aube : 950 300 €/ha en 2024 (+4% par rapport à 2023)

Prix moyen des vignes en Champagne : 1 121 800 €/ha en 2024 (+1,7% par rapport à 2023)

Dans le Rhône

• Saint-Joseph : 150 000 €/ha en 2024 (+7% par rapport à 2023)
• Côte Rôtie : 1 350 000 €/ha en 2024 (+8% par rapport à 2023)
• Cornas : 500 000 €/ha en 2024 (stable par rapport à 2023)
• Crozes-Hermitage : 155 000 €/ha en 2024 (+3% par rapport à 2023)
• Châteauneuf-du-Pape : 520 000 €/ha en 2024 (+2% par rapport à 2023)

Combien rapporte un hectare de vigne ?

Une fois que l’on connaît la valeur moyenne d’un hectare de vigne, on peut raisonnablement se poser la question : combien rapporte 1 hectare de vigne ? C’est à vrai dire, très difficile à estimer, dépendant de nombreux facteurs comme la manière dont le vigneron travaille, le millésime et ses aléas climatiques, etc. Le rendement à l’hectare dépendra ainsi de tous ces facteurs. Ceci étant dit, afin d’avoir une idée plus précise de ce que rapporte une hectare de vigne, on peut voir qu’en France le rendement moyen à l’hectare est de 57 hectolitres (soit 5.700 litres). Ainsi, un hectare représente en général une production de 7.600 bouteilles.

Si vous souhaitiez devenir riche en étant vigneron, le pari est audacieux. Le métier de vigneron n’est pas un métier facile, bien qu’il soit l’un des plus beau métier du monde (oui, oui !) et il faut être suffisamment passionné pour se lancer. Une certaine blague dit d’ailleurs que « pour devenir un vigneron millionnaire, il faut commencer milliardaire« . Rappelons au passage que le domaine le plus réputé au monde, la Romanée-Conti n’est devenue rentable qu’à partir de 1972 !

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Sources : www.le-prix-des-terres.fr et www.safer.fr