Les dernières enchères de l’année sont traditionnellement le théâtre d’enchères nourries sur de grands flacons, destinés à orner les tablées festives de Noël. En décembre dernier, les amateurs ont été nombreux à se pencher sur les catalogues, mais plutôt en quête de bonnes affaires que prêts à débourser n’importe quel prix pour obtenir les lots convoités. Il en résulte un ajustement de cours qui s’est poursuivi sur les grands crus de Bourgogne, touchant principalement les domaines qui avaient vu leur cote s’envoler en 2022. A Bordeaux, l’emblématique Petrus marque lui aussi le pas. Dans les autres régions, si quelques stars comme Rayas ou le Clos Rougeard sont en voie d’achever la stabilisation de leurs cours, la demande demeure nourrie, mais surtout en provenance des amateurs particuliers. Les professionnels ont fait preuve d’attentisme, en quête de certains flacons spécifiques, destinés à nourrir des demandes précises. L’assainissement du marché va permettre de débuter l’année 2024 sur des niveaux de prix corrigés des records enregistrés au premier semestre de l’année 2022. Focus sur quelques enchères phares.
Réajustement de cours sur Petrus
Il n’est pas fréquent d’observer un coup de frein sur les grands millésimes de Petrus. L’icône de Pomerol constitue en effet l’une des valeurs sûres du vignoble bordelais. Dans les plus grands millésimes, tous collectors, le cours est repassé en dessous du seuil des 4 000€. Un niveau record, certes, que ces belles années devraient toutefois retrouver à moyen terme. Le 2018 fait à ce jour exception, adjugé 4 006€ en décembre.
Le mois dernier, de superbes millésimes de Petrus ont enregistré un net repli : le 2009 se vend 2 781€ (-8%), le 2010, 3 756€ (-21%), le 1989, 2 629€ (-14%), et le 1998, 3 042€ (-10%). Pour chacune de ces grandes années, la vente s’est effectuée à la mise à prix, signe que les acheteurs ne sont plus prêts à se disputer ce vin, mais à saisir les opportunités.
Les vieux millésimes, souvent acquis pour marquer un anniversaire, tirent tout de même leur épingle du jeu, à l’instar d’un flacon de 1972, adjugé 1 690€ (+9%), d’un 1984, adjugé au même prix (+13%), ou encore d’un 1980, également vendu 1 690€ (+2%). Le 1981 s’échange lui à 1 628€, en hausse de 4%. Plus près de nous, le 2013 – un chiffre en « 3 », qui se vend bien en 2023 – a lui aussi marqué une progression de 7% de son cours, adjugé 2 754€.
Mouton Rothschild, une verticale aux enchères
Les flacons produits par le Château Mouton Rothschild depuis 1945 sont non seulement prisés pour le prestige dont peut s’honorer ce premier cru classé de Pauillac, mais aussi pour le caractère collector des étiquettes, illustrées chaque année par un artiste différent. De fait, certains amateurs s’attèlent à reconstituer des « verticales » regroupant l’ensemble de millésimes produits depuis la fin de la seconde guerre mondiale. L’une d’entre elle était dispersée en décembre, offrant aux collectionneurs l’occasion de compléter leur série. De grands millésimes ont atteint des niveaux de prix records. Un flacon de 1945 a ainsi été adjugé 11 205€ (+53%), un 1953, 2 103€ (+197%), et un 1961, 1 502€ (+5%). Effet collector oblige, certains millésimes de qualité moyenne, voire franchement médiocre, ont eux aussi atteint des niveaux de prix remarquables, à l’instar du 1954, adjugé 1 239€, ou le 1946, vendu 1 948€.
Repli sur les grands crus de Bourgogne, situation contrastée pour les blancs
La Bourgogne a longtemps été protégée par la rareté des vins, associée à une forte demande en provenance de l’Asie. Jusqu’au dernier trimestre de 2022, les cours des plus grandes signatures avaient enregistré une envolée record, à la faveur d’une situation économique qui conjuguait un euro faible et des taux d’intérêt bas, incitant les amateurs à reporter sur les grands crus leurs choix de placement. Aujourd’hui, la demande se fait plus sélective, et par ailleurs, les taux d’intérêt sont remontés. De fait, le marché marque un net repli, même si le cours des vins demeure élevé et se rétablit généralement aux niveaux atteints à la fin de l’année 2021.
Au Domaine de la Romanée Conti, le cru éponyme voit son cours s’infléchir de 25 à 30%, qu’il s’agisse de millésimes anciens (5 008€ pour le 1970, 5 228€ pour le 1973) ou plus récents (16 902€ pour le 2017). S’agissant du grand cru La Tâche, le repli se situe entre 10 et 15%, un flacon de 1999 ayant été adjugé 6 761€ (-15%). La baisse est plus limitée pour le corton-charlemagne du domaine. Un rare 2020 s’établit à 7 512€ (-9%). D’ailleurs, l’engouement se maintient pour les grands chardonnays de Bourgogne, à l’instar des flacons signés Arnaud Ente. En double-magnum, son puligny-montrachet 1er Cru Les Referts 2009 a atteint 4 382€ en décembre (+32%), tandis que le meursault La sève du clos 2007, dans le même format, se vendait 4 132€ (+9%). Les flacons signés de Lalou-Bize Leroy connaissent des fortunes diverses aux enchères, certains prix demeurent stables, à l’instar du corton-charlemagne 2001 (4 507€), ou du meursault Les Narvaux 2000 (3 390€). En revanche dans les millésimes plus récents, après les adjudications record de 2022, l’ampleur du réajustement est significative, même si les niveaux de prix demeurent élevés : le puligny-montrachet Les Enseignères 2015 s’établit à 4 257€, soit une baisse de près de 50% de son cours. Les vins du domaine Coche-Dury s’infléchissent de 10% environ, à l’instar du Meursault Perrières 2013, adjugé 1 753€ (-12%), ou du meursault Genevrières 2008, vendu 1753€ (-10%).
Le marché retrouve son équilibre dans la vallée du Rhône
Dans la vallée du Rhône, les réajustements de cours concernant Rayas touchent à leur fin. Si quelques millésimes s’inscrivent encore en baisse comme l’iconique 1990 (adjugé 2254€, -18%), ou le 1999 (877€, -12%), le marché retrouve son équilibre et la plupart des lots sont adjugés à des niveaux de cours pratiquement stables. Les LA-LA-LA de Guigal conservent leur attrait, de même que, à Cornas, les grands formats signés Thierry Allemand (un magnum de Reynards 1997 s’est vendu 751€, +4%), ou encore Hirotake Ooka (un jeroboam 2015 adjugé 689€).
Après une période de réajustement de cours qui aura duré plusieurs mois, le marché semble ainsi paré pour débuter l’année 2024 sur des bases assainies. A la clé, de belles opportunités méritent d’être guettées.
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