Patrick Baudouin vin iDealwine Anjou

Situé au cœur de l’Anjou noir, le domaine est né d’une exploitation familiale révélée par Patrick Baudouin qui l’a repris en 1990. A force de réflexion et de remise en question, il a su amener son domaine au plus haut niveau. C’est aussi un vigneron particulièrement engagé dans la promotion des grands terroirs de sa région, mais aussi au sujet de la place du chenin en Anjou.

Vins en vente sur iDealwine

Notre visite au domaine, en juin 2023

Patrick Baudouin Anjou iDealwine

Lorsqu’on arrive au domaine de Patrick Baudouin c’est une immersion immédiate dans une bulle de verdure avec le chant des oiseaux en fond sonore.  Le domaine s’étale sur 35 hectares mais seulement 12 sont plantés en vignes sur les communes de St Aubin-de-Luigné, Chaudefonds-sur-Layon, Rochefort-sur-Loire et Savennières. Un énorme travail est fait pour préserver la biodiversité, notamment via l’agroforesterie et la plantation de fruitiers et de haies.

La renaissance du domaine familial

Situé à Chaudefonds-sur-Layon, au sud d’Angers, en plein Anjou noir – vous savez, cette région qui fait pas mal parler d’elle depuis quelques temps, à ce sujet vous pouvez lire notre article “Anjou noir, nouvel eldorado au cœur de la vallée de la Loire” -, le domaine Patrick Baudouin a été créé par les grands-parents de ce dernier, Maria et Louis Juby en 1920. En 1990, Patrick Baudouin décide, après diverses expériences professionnelles, dont une de libraire à Paris, de retourner sur ses terres natales et de reprendre le domaine familial. Pourtant, à ce moment-là, l’exploitation est en friche et les vignes ne comptent plus que quelques hectares. Il entreprend alors un travail considérable de restructuration de la propriété et d’agrandissement du vignoble.

Une viticulture bio et engagée

Le domaine est évidemment en bio depuis 2005. Des semis sont plantés entre les rangs avec un enherbement afin de garder la fraîcheur des sols. Beaucoup de travail est abattu dans les vignes, avec un salarié pour deux hectares en moyenne – ce qui est assez rare dans la région -. L’engagement humain est d’ailleurs fort puisque le domaine travaille notamment avec un ESAT (établissements ou services d’aide par le travail, pour les personnes handicapées) depuis 2008.

Les vignes sont travaillées le plus naturellement possible, avec essentiellement une utilisation du soufre et du cuivre en quantités raisonnables. La traction animale (labour à cheval depuis 2016) est largement adoptée sur l’ensemble des vignes, même si le tracteur est aussi emprunté en complément. “Nos sols ne sont pas simples à travailler, ils sèchent et durcissent très vite” précise-t-il. L’équipe s’intéresse beaucoup à la vie et la microbiologie des sols, elle se forme régulièrement à propos de ces enjeux. Concernant la biodynamie, Patrick Baudouin nous explique ne pas être intéressé par cette tendance, assimilant ce mouvement à de l’occultisme. Idem pour la mouvance des vins nature, qu’il ne cherche pas à rejoindre non plus : pour lui c’est bien l’homme qui fait le vin et il doit prendre toutes les précautions possibles pour que le vin se boive et se conserve parfaitement.

Patrick Baudouin Anjou iDealwine Les Ulis
Les Ulis, derrière le domaine

Derrière les bâtiments du domaine, on aperçoit le coteau Les Ulis. Il faut savoir que toutes les parcelles du domaine sont plantées en coteaux, et sur des sols d’une grande variété et complexité géologique (composés de schistes, de grès et de roches volcaniques). Il était important pour Patrick Baudouin de préserver ce patrimoine historique, qui aurait pu disparaitre avec la mécanisation, puisqu’il n’est pas possible de mécaniser le travail des vignes en coteaux. Les vendanges au domaine sont donc manuelles et les rendements maitrisés : entre 25 et 30 hl à l’hectare.

La sortie des sentiers battus et la remise en cause des pratiques courantes

Après un tour du domaine, s’en suit la dégustation et des discussions passionnantes autour de l’histoire de l’Anjou et des différentes directions prises par le domaine, dont nous vous livrons ici un extrait. C’est également avec beaucoup d’humilité qu’il nous fait part de ses combats pour la valorisation des terroirs de l’Anjou. 

Il faut savoir qu’aujourd’hui, le chenin ne représente que 20% de la surface de vignes plantées en Anjou, au domaine Baudouin, le chenin représente lui 80% de la surface plantée et 20% de cabernet franc. Cela tient d’ailleurs à une volonté forte de Patrick Baudouin de redonner au chenin toute la place qu’il mérite en Anjou : “Autrefois sous Napoléon, on disait déjà que le chenin était le bon cépage d’Anjou et c’était celui qui dominait, alors qu’aujourd’hui, il ne représente plus que 20% de l’encépagement dans la région. On a désormais beaucoup plus de cabernet franc pour une production de rouge et de rosé“, nous explique-t-il.  Sa démarche a ainsi été de mieux comprendre le chenin et de le valoriser sur ses terroirs.

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Le chenin

En effet, après la Seconde Guerre mondiale, le cabernet franc y a été planté de façon massive, à un détail près : les sols d’Anjou sont majoritairement composés de schiste, très filtrant, alors que le cabernet franc n’aime pas le stress hydrique. C’est pour cela que le pressurage direct et donc la production de rosé a été privilégiée par les vignerons, afin d’éliminer le côté végétal du cabernet. La chaptalisation – procédé d’ajout de sucre au moût de raisin pour augmenter le degré d’alcool et/ou la sucrosité du vin – était alors utilisée pour produire du cabernet d’Anjou, qui représente encore 50% de la production aujourd’hui.

Parallèlement, les blancs liquoreux sont également systématiquement chaptalisés dans la deuxième moitié du XXème siècle. Ces vins étaient rares et avaient une valeur marchande élevée, la chaptalisation permettait alors d’assurer leur production au fil des millésime. La création des cahiers des charges dans les années 50, entérine la production de liquoreux sur certaines appellations comme Quart-de-Chaume ou Chaume, alors qu’auparavant les vignerons y produisaient des vins avec différents degrés de sucre résiduels, du sec au liquoreux. Les vignerons de ces appellations se sont aujourd’hui constitués en collectif afin de revenir à cela, et de pouvoir exprimer via leur travail la versatilité du chenin sur différents types de terroirs. L’appellation Quart de Chaume est d’ailleurs aujourd’hui en train de disparaitre car il y a de moins en moins de liquoreux déclarés sur cette appellation au fil des millésimes, les conditions n’étant pas toujours réunies afin d’en produire, et l’effet de mode bien passé, il faut le dire.

Lorsque Patrick Baudouin reprend le domaine familial au début des années 90, il s’inscrit au début dans la tradition de la région et des méthodes de travail les plus répandues à l’époque : la production de vins liquoreux en chaptalisant légèrement et en utilisant des levures du commerce, et la production de quelques vins rouges. Rapidement, il se pose des questions et commence à remettre en cause ces manières de travailler. Il se renseigne, fait des recherches, lis beaucoup sur tous ces sujets et écrit même des documents sur l’histoire et l’économie de la production viticole régionale. Son discours n’est alors pas forcément bien accueilli, surtout lorsqu’il déclare par exemple que l’économie viticole du Layon repose en réalité en partie sur la culture de la betterave (via la chaptalisation) ! Il en vient rapidement à remettre en cause la chaptalisation qui était omniprésente à cette époque dans ce vignoble et décide de s’en passer totalement dès les vendanges 1994. Patrick Baudouin se confronte alors à la même problématique que les “anciens” qui ne chaptalisaient pas : l’irrégularité de la production de vins liquoreux botrytisés – du fait des aléas climatiques, mais aussi de la versatilité du chenin -, par opposition à une production régulière et une économie stable permises par une production basée sur la chaptalisation. Pour pallier cette irrégularité qui mène même à certaines années d’absence (totale ou partielle) de production de liquoreux (son dernier millésime de liquoreux date de 2018), mais aussi par goût et intérêt pour ces vins, Patrick Baudouin décide, avec d’autres vignerons de se lancer aussi dans la production de chenins secs. “Ça fait justement partie de la force du chenin, d’être aussi bien à l’aise sur les vins secs que liquoreux. Pour autant, je ne suis absolument pas contre les liquoreux, j’en produis au contraire dès que c’est possible, mais je ne prends que ce que la nature a à offrir, ” nous précise-t-il. Ainsi, l’économie du domaine repose aujourd’hui à 80% sur les blancs secs, à côté d’une petite production de vins rouges et liquoreux lorsque l’arrière-saison est belle.

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Le combat pour la mise en valeur des terroirs et des vins

Cela fait 30 ans que Patrick Baudouin mène un combat pour avoir le droit de produire des vins secs à liquoreux sur ses différents crus et pour valoriser ces terroirs, mais également contre la chaptalisation des liquoreux. Une bataille pour la production de grands vins, qui se traduit finalement dans sa production.

Il œuvre notamment pour la reconnaissance des crus d’Anjou blanc, une démarche complexe, notamment du fait de l’imbrication avec les appellations, mais en bonne voie, puisqu’une commission d’enquête de l’INAO devrait venir dans la région prochainement pour évaluer ce projet. Patrick Baudouin a ainsi endossé le rôle de co-président de l’appellation Anjou blanc. Pour lui, le système des appellations a été dévoyé, l’objectif initial de ses fondateurs en 1935 étant en effet de protéger ce qu’ils appelaient alors les vins fins, qu’on appelleraient aujourd’hui les « vins de lieux », environ 15% de la production de l’hexagone, alors qu’aujourd’hui, l’appellation ne permet plus de distinguer ces «vins de lieux » des vins  « de volume », de région, 50% des vins pouvant s’en revendiquer ; c’est pour cela qu’il voudrait une segmentation supplémentaire.

Il s’est également engagé dans diverses associations comme la Sapros, créé en 2001 avec Alexandre de Lur Saluces comme président, pour promouvoir les vins liquoreux produits sans chaptalisation ; mais aussi dans l’association Seve, qui a travaillé notamment avec l’ancien président du comité vins de l’INAO, l’angevin René Renou, pour réformer le système des AOC. Enfin, il a beaucoup travaillé à la compréhension et la reconnaissance du chenin en Anjou, il a notamment participé à la tenue du 1er congrès international du chenin à Angers en 2019

Aujourd’hui, la chaptalisation est interdite dans certaines appellations de la région et très limitée dans les autres, ce qui a drastiquement baissé les volumes de production des vins liquoreux. Pour autant, celle de vins secs dans ces appellations (Quarts-de-chaume, Coteaux-du-layon…) n’est plus reconnue depuis 1996 (sauf à Savennières), alors qu’elle était possible avant. Ainsi, tout producteur de blanc sec dans le Layon se doit de commercialiser son flacon sous l’appellation régionale Anjou blanc.

Avec la production de vins secs, le vigneron a également développé la production parcellaire pour mettre au mieux en valeur la diversité de son terroir.

Vinification et élevage : le pari de la tradition

Patrick Baudouin Anjou vinification et élevage

Côté vinification, tout se passe de la façon la plus naturelle : levures indigènes, pas de collage mais une légère filtration. Un peu de souffre au pressoir lorsque le millésime le demande et systématiquement à la mise pour assurer le transport et la garde. Pour les blancs, la fermentation malolactique est réalisée et l’élevage en fût dure minimum 12 mois. Concernant les rouges, les raisins sont égrappés et il n’y a pas d’extraction durant la fermentation. Ils passent ensuite 2 mois en fût de plusieurs vins (aucun bois neuf n’est apporté). Le cabernet franc est selon le vigneron un vin de matière et d’élevage, comme le chenin, et mérite d’être travaillé de la sorte.

Patrick Baudouin Anjou iDealwine Maitre de chai
Le maître de chai du domaine Patrick Baudouin

Les vins du domaine en vente

Les cuvées dégustées au domaine, à découvrir impérativement :

  • Anjou La Fresnaye 2018 (rouge) :

Ce vin dégage des arômes de fruits noirs et la bouche est ronde, a de la matière tout en étant très souple et digeste, avec une belle longueur sur le fruit.

  • Anjou Les Coteaux d’Ardenay 2018, rouge

Cette cuvée est plus portée vers un côté floral (violette) et de fruits noirs, la bouche est charnue et structurée avec des tanins assez présents. Un vin de gastronomie.

  • Anjou Effusion 2021, blanc sec

Il s’agit du vingtième millésime, la cuvée a été créé en 2001.

Le nez s’ouvre avec des fruits blancs et des agrumes, l’attaque est ronde et grasse pour se resserrer en milieu de bouche de façon tonique avec une longueur aux notes d’agrumes.

  • Savennières Bellevue 2021, blanc sec

Un nez d’agrumes, une bouche droite et très vive, avec une belle acidité et une finale sur les amers, et beaucoup de longueur.

  • Anjou Le Cornillard 2020, blanc sec

Le nez présente des notes de fruits jaunes, la bouche est puissante et vive à la fois, avec beaucoup de matière, nous sentons le côté chaleureux du millésime, rafraîchie en finale par de jolis amers.

  • Anjou Le Clos des Bruandières 2019, blanc sec

Le nez dévoile des notes de fleurs d’acacia, de fruits jaunes bien mûrs. La bouche est puissante, avec du gras et se resserre en finale.

  • Anjou Ronceray Les Zeziles 2019, blanc sec

Ronceray se situe sur l’appellation Quart de Chaume mais est vinifié en sec. Les arômes de fruits jaunes et de fleurs blanches laissent place à une bouche large, ronde et concentrée. Une belle cuvée de gastronomie.

  • Anjou Les Gâts 2015, blanc sec

Le nez est complexe et très aromatique, avec des notes de fruits mûrs (coing), des épices et de légères notes d’évolution. La bouche est ronde, grasse avec une finale minérale.

  • Anjou Les Glânées 2016, blanc demi-sec (34g de sucre résiduel)

Le nez dévoile des notes de fruits jaunes et la bouche une belle acidité, enveloppée de matière, des notes d’agrumes et une finale minérale.

  • Coteaux du Layon 1896, 2018, blanc liquoreux

Le nom de cette cuvée est un hommage à un groupe de vignerons qui s’est battu en 1896 contre le procédé de chaptalisation. Des notes de fruits à noyau, de miel et une bouche d’une grande fraîcheur font de ce liquoreux un vin très digeste et complexe.

  • Quart-de-Chaume Les Zerzilles 2017, blanc liquoreux

Très aromatique et complexe, au nez des notes de coing et d’abricot, la bouche est grasse, longue et dense tout en conservant une belle fraîcheur.

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Les autres cuvées en vente sur iDealwine :

  • Coteaux du Layon Les Bruandières (blanc liquoreux)

Issu d’une des plus belles parcelles de l’appellation, ce coteaux-du-layon est le fruit d’une culture biologique et d’une vinification soignée qui révèle dans un registre onctueux toute la vivacité de son terroir. 

  • Coteaux du Layon Sélection Grains Nobles (blanc liquoreux) 50cl

Un grand vin de garde réalisé à partir de chenin cultivé sainement, récolté par tries successives et vinifié de façon peu interventionniste. Un beau moment de méditation vous est promis.

  • Coteaux du Layon Maria Juby (blanc liquoreux) 50cl

Un grand vin de garde qui doit son nom à l’arrière-grand-mère du vigneron actuel. Un hommage confidentiel qui se traduit notamment par une culture bio et une vinification peu interventionniste. Je tiens à remercier Patrick pour ces échanges passionnants, riches d’enseignement et pour son accueil chaleureux, ainsi que celui d’Emilie.

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Le domaine Patrick Baudouin, ce qu’en disent les guides

La RVF, 1 étoile / 3

Patrick Baudouin ne laisse aucun amoureux de vins angevins indifférent. Ses vins parviennent en même temps à offrir un fruit très gourmand tout en exprimant avec droiture l’identité de chaque terroir. 

Bettane et Desseauve : 3 étoiles / 5

Patrick Baudouin est devenu une référence du chenin en Anjou. En puriste, il choisit la voie de l’excellence. Une propriété modèle.

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