Suite de notre saga sur le millésime 2015, mettons le cap sur les vignobles du sud de l’hexagone. De grandes réussites à la clé, notamment pour les grands crus de Bordeaux.
Bordeaux, un millésime 2015 « du siècle » ?
Après une série de millésimes corrects, moyens ou médiocres depuis les excellents 2009 et 2010, Bordeaux tient enfin un nouveau grand millésime avec 2015. Toutes les conditions qui concourent à une grande année de vins rouges à Bordeaux étaient réunies :
– floraison et nouaison précoces et relativement rapides pour assurer une bonne fécondation et prédisposer à une maturité homogène
– un mois de juillet chaud et sec, provoquant le ralentissement puis l’arrêt définitif de la croissance de la vigne avant la véraison. Les pluies abondantes d’hiver avaient créé des réserves suffisantes pour empêcher les vignes de trop souffrir pendant un été très chaud, mais moins caniculaire dans ses pointes de chaleur qu’en 2003 ou 2009
– une maturation complète des différents cépages grâce à des mois d’août et de septembre assez secs, mais sans chaleurs excessives
– un beau temps, moyennement chaud et faiblement arrosé pendant les vendanges, permettant d’attendre la maturité optimum de chaque parcelle sans redouter la dilution ou la pourriture. Les merlots ont atteint souvent les 14° et les cabernets 13°. L’état sanitaire était absolument parfait avec des acidités plus élevées que dans les autres millésimes très chauds de la région (2003 et 2009 par exemple) avec des peaux épaisses et bien mûres.
La rive gauche semble proposer une meilleure réussite d’ensemble que la rive droite. C’est particulièrement vrai dans sa partie sud, moins touchée par des pluies début septembre que la partie nord du Médoc. Margaux tire sans doute le mieux son épingle du jeu grâce à une très belle maturité des tannins du cabernet-sauvignon. Pessac n’est pas bien loin dans cette réussite globale. Saint-Julien et Pauilac sont très réussis, sans doute un petit cran au-dessus de Saint-Estèphe, un peu plus affecté par ces mêmes pluies de début septembre.
Rive droite, le risque tenait à des merlots un peu plus affectés par la chaleur estivale, avec des côtés un peu chauds et alcooleux. Mais la grande majorité des meilleurs domaines de Pomerol et surtout de Saint-Émilion ont évité cet écueil grâce aussi à des vinifications plus en douceur qu’à une époque relativement récente, ce qui a permis de mieux maîtriser la richesse naturelle du millésime. De très belles réussites également en Côte de Castillon.
La réussite des vins blancs secs a également été générale avec des raisins sains, sucrés, fruités et dotés d’une acidité largement suffisante pour équilibrer cette belle richesse. Les vins se révèlent riches, fruités et plus ronds que les 2014.
Enfin, une belle pourriture noble et précoce à Sauternes et Barsac (avec de bonnes pluies dans la seconde moitié du mois de septembre) a permis de produire de très beaux liquoreux, nets et purs, associant fraîcheur, richesse et élégance. Les teneurs en sucre sont très élevées et l’intensité aromatique assez exceptionnelle.
Notes de vins rouges 2015 de Bordeaux (rive gauche) : 18/20
Notes de vins rouges 2015 de Bordeaux (rive droite) : 17/20
Notes de vins blancs secs 2015 de Bordeaux : 17/20
Notes de vins blancs liquoreux 2015 de Bordeaux: 18/20
De grandes réussites dans le Nord de la vallée du Rhône
Si l’ensemble de la vallée du Rhône a sans doute connu un de ses meilleurs millésimes historiques, c’est dans sa partie nord que c’est le plus vrai, particulièrement pour les vins rouges qui s’annoncent probablement au niveau des plus grandes années comme 1990. L’année a été comme partout caniculaire, à l’image de 2003, 2005 ou 2009, mais ces excès ont parfaitement été compensés par des pluies fin août et un vent bienvenu juste avant les vendanges qui a parfaitement séché les vignes, laissant des raisins parfaitement mûrs dans un état sanitaire frôlant la perfection. Des conditions idéales pour réaliser un très grand millésime surtout en rouge. Ces derniers sont denses et profonds, très concentrés, avec un fruité bien mûr, des niveaux d’alcool raisonnables (surtout en Côte Rôtie) pour une année aussi chaude, et des tanins d’une qualité et d’un soyeux rares.
Les blancs ont parfois souffert de cette année chaude, sans doute un peu plus à Condrieu où le viognier a besoin d’acidité pour répondre à sa tendresse naturelle, qu’en Hermitage ou à Saint-Joseph où les vins blancs, sont certes riches et puissants, mais restent équilibrés.
Notes de vins rouges 2015 de la vallée du Rhône Nord : 18/20
Notes de vins blancs 2015 de la vallée du Rhône Nord : 16/20
Rhône Sud, une année chaude
Dans le Rhône sud on retrouve ce côté bien mûr des vins rouges, mais sans un caractère trop chaud ou marqué par un excès d’alcool. La masse tannique est parfois impressionnante mais en souplesse et elle reste veloutée, autant de signes d’un futur très grand millésime. Le fruit est très pur et les équilibres parfaits malgré la richesse des matières grâce à des extractions en général délicates, plus en finesse qu’un autre millésime très solaire comme 2007.
Comme toujours dans les années très chaudes, les blancs se situent un cran légèrement en-dessous des rouges, manquant parfois un peu d’énergie, mais le niveau global reste sans doute légèrement supérieur à 2014, avec quelques domaines réussissant des blancs de très haut vol quand la densité et la richesse de leurs jus ont été équilibrés par une tension bienfaitrice.
Notes de vins rouges 2015 de la vallée du Rhône Sud : 18/20
Notes de vins blancs 2015 de la vallée du Rhône Sud : 16/20
Vallée de la Loire : des conditions climatiques d’exception
On a frôlé ici le millésime exceptionnel, l’année ayant été idéale, avec une chaleur un peu moins excessive qu’ailleurs grâce à des nuits suffisamment fraîches. Malheureusement des pluies un peu marquées en septembre sont venues ternir cette quasi-perfection, surtout pour les rouges que certains domaines ont récoltés dans la précipitation par peur de pluies encore plus importantes. C’est pourquoi il sera possible de trouver des rouges un peu “raides” aux tannins secs malgré une année perçue comme chaude. Pour autant, la majorité des rouges, chez les meilleurs vignerons, s’annonce d’un très bon niveau, supérieur à 2011, 2012 et 2013. Les vins se montreront sans doute plus ronds et charmeurs que les 2014, mais peut-être de moins longue garde. Chinon semble tenir une année particulièrement réussie. La Loire étant une vaste région (et un très long fleuve !) les conditions peuvent être assez différentes selon les vignobles. Sancerre a ainsi produit un très grand millésime en rouge, tout comme la Bourgogne dont elle est finalement bien plus proche que de la Touraine ou du Muscadet, et les sauvignons se montrent prometteurs, pas trop marqués par la chaleur.
Les blancs sont mieux passés entre les gouttes. Les muscadets seront très jolis, les vins de Montlouis et de Vouvray seront riches et denses mais sans lourdeur, gardant cette légendaire fraîcheur ligérienne. La grande réussite de l’année concerne les moelleux et liquoreux qui ont bénéficié d’un très beau botrytis. Il est probable que l’on atteigne un millésime du niveau des plus grands.
Notes de vins rouges 2015 de la vallée de la Loire : 16/20
Notes des vins blancs 2015 de la vallée de la Loire: 17/20
Notes des vins blancs moelleux 2015 de la vallée de la Loire : 18/20
Vins du Languedoc : soyez sélectifs
Régulièrement le Sud n’en fait qu’à sa tête. Quand toute la France viticole ou presque a connu un millésime chaud (presque trop parfois) réveillé par quelques pluies bienvenues en août, ce qui a favorisé de belles maturités homogènes, surtout pour les cépages rouges, les vignobles sudistes ont fait sécession. Si, au printemps et en début de l’été, une bonne partie de la région a connu comme ailleurs une sécheresse encore plus marquée, d’autres secteurs ont eu droit à une humidité persistante favorable aux maladies, ce qui est plutôt rare dans la région. Si les pluies d’août ont joué par endroit leur rôle bénéfique pour débloquer les maturités, la bande littorale du Languedoc a connu fin août et début septembre de gros orages et une humidité stagnante.
Le millésime 2015 est donc ici assez hétérogène et il est même assez difficile de délimiter de vastes sous-ensembles homogènes. En rouge on trouvera donc des vins aux arômes un peu trop confiturés et lourds (sécheresse et soleil excessifs) comme des cuvées aux notes un peu végétales. Mais ces deux extrêmes ne sont pas la norme. Le Languedoc propose quand même une majorité de rouges équilibrés, mais il faudra sans doute privilégier les achats chez les vignerons les plus réputés pour leur sérieux et leur expérience dans un millésime parfois délicat à négocier et à vinifier (il fallait par exemple avoir l’extraction “légère” en cave).
Les blancs sont également extrêmement variables et toujours un cran en-dessous des cuvées remarquables du Roussillon voisin, à la fois pour les mêmes raisons climatiques que les rouges, mais aussi parfois par un encépagement (très différent du Roussillon) pas toujours adapté au climat généralement chaud et sec de la région.
Notes de vins rouges 2015 du Languedoc : 16/20
Notes de vins blancs 2015 du Languedoc : 14/20
Vins du Roussillon : une année classique
Comme un peu partout, le Roussillon a connu une année chaude et un été très chaud, mais comme le constatent la plupart des vignerons locaux, c’est finalement un peu la norme ici. Au final le Roussillon a donc connu un millésime sans doute un peu moins marqué par les excès de chaleur et de sécheresse qu’ailleurs. D’autant que de fortes pluies et une certaine humidité maritime ont fait le plus grand bien aux vignes peu de temps avant les vendanges.
Les niveaux de maturité sont donc excellents, tant pour les raisins rouges que les blancs. Comme souvent dans le Roussillon, les blancs sont de très haut niveau cette année, sans doute un léger cran au-dessus des rouges. Et ce grâce à un terroir exceptionnel, donnant beaucoup de caractère à ces blancs sudistes mais frais, et à un encépagement parfaitement adapté aux conditions locales (macabeu, grenache blanc et surtout grenache gris, carignan blanc et gris). Les blancs seront donc riches, avec une matière dense, mais parfaitement équilibrés par une tension qui est la marque de la région. Les rouges sont un peu plus hétérogènes, mais globalement ils gagnent chaque année en finesse grâce à des vinifications de plus en plus délicates. Il est loin le temps du “gros rouge” sudiste !
Notes de vins rouges 2015 du Roussillon : 16/20
Notes de vins blancs 2015 du Roussillon : 17/20
Provence Corse : un grand millésime à Bandol
La Provence n’a pas échappé à la chaleur estivale, même si les vignobles locaux en ont plus l’habitude que ceux de la Bourgogne ou du Jura. Des conditions globalement favorables aux vins rouges (même si ici les rosés représentent près de 90 % de la production !), bien que certains excès de sécheresse aient pu bloquer la maturité de quelques parcelles. Les rouges provençaux seront donc globalement d’un bon niveau (mais ici, il est rare que le climat soit très défavorable…), en particulier à Bandol, le fief des grands vins rouges de Provence. Un peu comme en 2005, les bandols rouges seront assez charmeurs, ce qui est rare pour le mourvèdre, et relativement faciles à aborder jeunes, mais ce ne sera sans doute pas une année de très longue garde. Les blancs provençaux ont un peu souffert des excès climatiques et se révèleront également ronds et charmeurs, mais parfois un peu en déficit de tension.
On peut faire à peu près le même constat en Corse (chaleur et sécheresse) mais globalement, à part quelques rares parcelles, le vignoble a bien résisté. Les rouges dans leur ensemble seront d’un très haut niveau avec des vins riches et puissants, avec une belle masse tannique mûre, surtout à Patrimonio où les blancs sont également de haut niveau, denses, concentrés, mais avec une belle tension fraîche. L’appellation Ajaccio, avec les rouges issus du cépage sciacarello, fin et délicat comme un pinot noir, est également au sommet de ce millésime.
Notes de vins rouges 2015 de Provence – Corse : 16/20
Notes de vins blancs 2015 de Provence – Corse : 15/20
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