En cette saison estivale, éloignons-nous un peu de la mer et de l’océan et plongeons au cœur de la France profonde, dans les monts arrondis du Massif Central et de l’Auvergne. On y goûte ici une cuisine de terroir, généralement simple mais délicieuse, qu’il faudra accompagner de vins accordés. Oui, mais lesquels ?
Si la mer Méditerranée est le berceau de la civilisation européenne, l’Auvergne est celui de la culture paysanne à la française. Des paysans et des éleveurs au regard terriblement malicieux, qui incarnent parfaitement la France rurale fleurant bon le temps où les excès de la société moderne n’avaient pas encore cours… A France paysanne, cuisine paysanne, cuisine d’une région sans sophistication superflue, cuisine “solide” également, qui se veut avant tout nourrissante et riche. Petit tour d’horizon des spécialités de cette région sans prétention, qui réserve pourtant milles surprises.
La saucisse à l’aligot ou à la truffade
L’aligot est sans doute le plat auvergnat le plus connu des touristes venus des autres régions de France. Cette purée à laquelle on ajoute de la tome fraiche de Cantal accompagne souvent une grosse saucisse “au couteau”, généralement lentement grillée. Mais l’accompagnement de cette saucisse locale peut aussi être une truffade : des pommes de terre coupées en rondelles, sautées à la poêle avec un peu d’oignon et des lardons. On la recouvre en fin de cuisson de lamelles de tome fraiche que l’on mélange aux pommes de terre avec un peu de crème fraiche, une fois que le fromage a fondu. Un plat pas très régime, mais si bon ! Ces deux préparations peuvent également accompagner une grillade de bœuf des superbes races locales, Salers et Aubrac, qui donnent des viandes délicieuses.
Les accords
Le vin qui accompagnera ce plat dépendra évidemment de la viande qui est servie. Avec la saucisse grillée, on pourra l’assortir d’un blanc bien sec, pas trop aromatique et à l’acidité assez marquée, qui se mariera parfaitement au gras de la viande et du fromage. Par exemple une jacquère de Savoie (Apremont, Abymes, Chignin) ou un jurançon sec. Si on préfère le rouge, ne pas hésiter à puiser dans les très bons gamays de la région, tels que des côtes-d’Auvergne et ses déclinaisons “village” comme Boudes, Chanturgue ou Chateaugay, côtes-roannaise et côtes-du-Forez. Si l’on est peu sensible aux accords régionaux, on peut également privilégier des vins issus de régions un peu comparables comme le Jura et ses rouges légers de trousseau ou de poulsard. Ceux-ci s’accorderont parfaitement à ce plat rustique, notamment quand il est servi avec une grillade de bœuf saignante. Malgré la viande rouge qui appelle a priori un vin tannique, il vaudra mieux, en effet, opter pour des vins avec peu de tannins en raison du fromage fondu qui les ferait horriblement ressortir.
Les tripoux
Voilà encore une autre préparation emblématique du Massif Central et de l’Auvergne. Comme toutes les recettes régionales, rien n’est figé. Si tout le monde s’accorde sur l’aspect physique du plat (une sorte de petits sacs rebondis et rempli d’une farce), certains vous jurent qu’on n’y trouve que du veau (panse de veau à l’extérieur et hachis de fraise de veau et de jambon à l’intérieur), d’autres exclusivement de l’agneau (estomac de l’animal qui entoure une farce de porc et d’agneau aux herbes). En fait, tout dépend de la région du Massif Central où ils sont confectionnés, le Rouergue semblant privilégier le veau et l’Aubrac l’agneau… Agneau ou veau, peu importe, les tripoux sont cuits à l’étouffée dans un bouillon où l’on peut mettre un peu de vin blanc, une julienne de légumes variés et éventuellement un pied de mouton.
Les accords
Encore un plat un peu rustique, avec une texture un peu particulière (tripes de veau ou d’agneau) qui appelle un vin peu tannique, un peu acide et pas trop sophistiqué. En blanc, on pourra choisir un chardonnay des appellations auvergnates ou un chardonnay du Jura. En rouge, on privilégiera également les gamays (ou les pinots noirs) auvergnats, mais on peut aussi associer à ce plat un beaujolais ou un simple bourgogne, par exemple un côte-d ’Auxerre ou un irancy. Et si l’on ne craint pas les vins un peu plus solides, un côtes-du-rhône (plutôt de grenache et cinsault que de syrah et mouvèdre, quand même !) pourra également accompagner ces tripoux. L’été, on peut également imaginer boire un bon rosé bien coloré sur ce plat !
Chou farci et potée
Ces deux grands classiques locaux se rejoignent pour les accords mets et vins, car ils sont bâtis sur une même base d’association de viande de porc et de légumes.
Les accords
On pourra sans risque se reporter aux accords avec l’aligot et la truffade (option vins rouges), gamays auvergnats et rouges du Jura. Mais un simple beaujolais sera également à son aise.
Les fromages auvergnats
L’Auvergne (et le Massif Central en général) est le plus grand plateau de fromages de France. Cantal, laguiole, salers, bleu d’Auvergne, fourme d’Ambert, saint-nectaire, roquefort, bleu des causses, la liste est longue de ces fromages célèbres qui viennent de cette région. Et, contrairement à la majorité des fromages, plusieurs tommes locales s’accordent bien à du vin rouge !
Les accords
Le cantal, et surtout ses déclinaisons plus fortes (laguiole et encore plus salers) est un fromage qui s’accorde bien à des rouges peu tanniques comme des gamays d’Auvergne ou du Beaujolais, mais aussi à des pinots d’Auvergne ou de Bourgogne (plutôt en appellation Bourgogne ou en “Village”). On peut également penser à des cabernets francs de Loire dans des cuvées sur le fruit comme à Saumur-Champigny, Bourgueil ou Chinon. Le saint-nectaire s’accordera avec les mêmes vins auxquels on pourra ajouter un rouge de Sancerre, par exemple.
Parmi les nombreux “bleus” de la région, il faut réserver une place à part la fourme d’Ambert (et au bleu d’Auvergne) qui ne craignent pas trop le rouge à condition qu’il ne soit pas du tout tannique (par exemple les gamays régionaux). Mais ces deux fromages s’accorderont également à un blanc sec doté d’un peu de gras, comme un bourgogne blanc générique (ou une appellation “Village”), un chardonnay du Jura, un blanc du nord du Rhône (Crozes-Hermitage ou Saint-Joseph), à condition de ne pas être boisé. On vous dira un peu partout que le roquefort (et accessoirement le bleu des causses) s’accorde parfaitement avec un blanc liquoreux. Pas plus qu’avec le foie gras, cet accord “gras sur gras” ou “riche sur riche” n’est totalement satisfaisant, à notre avis. L’accord avec un blanc tendu et puissant nous paraît bien plus intéressant comme avec un jurançon sec, un irouléguy, un montlouis ou un vouvray.
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