Cornas - Noël Verset ©iDealwine.com
Cornas – Noël Verset ©iDealwine.com

A côté de quelques noms mythiques de domaines ou d’appellations universellement connus, tout amateur rêve de découvrir celui ou celle qui sera la vedette de demain. Chez iDealwine nous sommes bien placés pour deviner les mouvements de fond qui s’annoncent. Et nous sommes prêts à parier que l’appellation Cornas et ses meilleurs vignerons se hisseront assez vite au niveau de Côte-Rôtie et d’Hermitage.

Dans la vente de vin, et tout particulièrement dans les ventes aux enchères, l’histoire est toujours la même : quand un nombre important d’amateurs (du monde entier) s’intéresse à un domaine ou une appellation, les prix montent et finissent par s’envoler. Par exemple ceux des grands bordeaux à partir de 1995. Le niveau atteint par certains prix décourage beaucoup de passionnés qui se tournent alors vers une autre région, au hasard la Bourgogne. Et le phénomène se reproduit : les prix grimpent vers des sommets qui finissent par devenir inaccessibles et les amateurs reprennent leur bâton de pèlerin à la recherche de grands vins encore abordables. Ils arrivent donc dans la vallée du Rhône. Et cette région commence à son tour à entrer dans une spirale inflationniste. Cela a commencé il y a déjà un certain temps par quelques cuvées rares en appellation Côte-Rôtie ou avec certains domaines de Châteauneuf-du-Pape. Aujourd’hui on sent que le phénomène s’amplifie et concerne également une autre appellation, au départ moins cotée que Côte-Rôtie ou Hermitage mais qui, sous l’impulsion et avec le talent de quelques vignerons prouve qu’on avait sans doute eu tort de la sous-estimer. Lors de récentes enchères on-line sur notre site (en avril 2015) on a ainsi remarqué la belle percée des vins du domaine Thierry Allemand : un magnum de la cuvée Chaillots 1999 est monté jusqu’à 258€ (+100% par rapport à la cote iDealwine), un autre, millésimé 1998, s’est vendu 180€ (+61%). Quant à sa grande cuvée Reynard, elle dépasse souvent allègrement les 100 euros voire nettement plus dans de beaux millésimes comme 2005 alors que son prix de départ chez un grand caviste parisien se situait autour de 45 euros. Même hausse assez récente des cotes du Cornas d’Auguste Clape qui dépassent également les 100 euros dans les bons millésimes, un montant qui aurait fait rêver ceux qui les achetaient 30 euros au domaine il y a quelques années. D’autres domaines souvent tenus par d’assez jeunes vignerons progressent rapidement dans une saine émulation qui fait « bouger » les lignes dans cette appellation qui est restée longtemps endormie dans la douce torpeur du négoce. Cette emprise du négoce (et d’une puissante cave coopérative, la Cave de Tain) limite d’ailleurs l’évolution de la grande sœur de la rive d’en face, Hermitage. Une relative stagnation de la cote des vins d’Hermitage pourrait bien faire les affaires de Cornas …

Coup de zoom sur le domaine Noël Verset

Dans les dernières enchères on-line de juin 2015 sur iDealwine, un cornas 1985 du domaine Noël Verset a atteint la coquette enchère de 252 €. Ne cherchez pas à acheter une bouteille, par exemple de 2010, de ce domaine demain dans une vente à prix fixe iDealwine car Noël Verset, qui avait commencé à vinifier au côté de son père à l’âge de 12 ans (!) en 1931, a pris sa retraite avec le millésime 2000 après s’être installé à son compte en 1943. Il a ensuite vendu les parcelles de son domaine une par une et seulement à des vignerons pour lesquels il avait du respect, en particulier à Thierry Allemand. Mais il en a aussi cédé au domaine Clape et au domaine Courbis, ainsi qu’à son neveu, Franck Balthazar. Il a aussi continué jusqu’en 2006 (il avait alors 87 ans !) à vinifier pour sa consommation personnelle et celle de ses proches mais aussi pour en vendre une partie au négociant « haute couture » du Rhône, Tardieu-Laurent. Noël Verset est un des personnages légendaires de l’appellation, le premier vigneron de Cornas à connaître une certaine notoriété internationale et surtout un vinificateur de génie qui donnait un style unique à ses vins et un style qui avait la réputation de dominer tous les éventuels excès des millésimes. Il ne faisait évidemment qu’une seule cuvée en assemblant tous ses terroirs, ce qui explique sans doute l’équilibre parfait de ses vins. Ses méthodes étaient tout ce qu’il y a de plus traditionnel : petits rendements, vendange à maturité, vinifications en grappe entière, pigeage au pied, fermentations en cuves ciment, élevage de 15 mois en vieux demi muids. A l’image de Marius Gentaz en Côte-Rôtie ou d’Ernest Trollat à Saint-Joseph, Noël Verset fait partie de ces grands personnages traditionnels du vin qui ont façonné la légende de leurs appellations.

Quelques infos sur Cornas

Cornas est une appellation triplement unique : une seule AOC (en vin rouge), un seul cépage (syrah) et une seule commune de production (Cornas). Situé dans le département de l’Ardèche, sur la rive droite du Rhône, le vignoble de Cornas peut se targuer d’une notoriété établie de longue date, puisqu’elle remonte au Xème siècle. A la veille de la Révolution française, on parlait déjà du vin « noir » de Cornas, et au début du XIXème siècle, il rivalisait en qualité avec les Châteauneuf-du-Pape. Les ravages du phylloxera, puis l’urbanisation croissante de la région ont lourdement menacé ce vignoble, microscopique à l’échelle de la région, et difficile à entretenir en raison de son implantation  sur des terrasses agrippées aux versants abrupts de la vallée. Pourtant, le terroir, composé de sols peu profonds, reposant sur une roche composée de granit et dépôts limoneux s’avère parfaitement adapté à la production de vins d’une magnifique complexité. Vient s’ajouter à cela un micro-climat né de l’orientation sud, sud-est des coteaux du Rhône et du mistral : baignée de soleil, la vigne est précoce, et les raisins souvent vendangés avant tous les autres vignobles de la région.

L’appellation, consacrée AOC depuis 1938, connaît un véritable renouveau depuis le début des années 1980. Sous la houlette de quelques producteurs et œnologues aussi entreprenants que talentueux, la surface en production, qui totalisait 76 hectares à cette date, en compte aujourd’hui 102. Le Cornas est un vin souvent envoûtant et épicé, à la robe presque noire, doté d’une belle structure. Dans ses premières années, il semble parfois rustique, fermé. Pourtant, avec le temps, il déploie une sensualité et un bouquet d’arômes corsés et denses, qui associent aux flaveurs de cassis des notes de cuir, d’herbes et de viande rôtie.

Quelques « climats » sont particulièrement réputés, le premier étant sans doute Reynard, revendiqué en particulier par Thierry Allemand qui en a fait une cuvée parcellaire et un climat qui entre assez majoritairement dans le cornas de Clape. La Geynale, qui donne des vins très fins et délicats est associée à la production de Robert Michel qui a été le premier à la revendiquer. Citons également Chaillot et Sabarotte.

Schématiquement on peut dire il y a comme souvent dans de nombreuses appellation, deux grands styles de Cornas : les modernes et les traditionnels et dans cette dernière famille on pourrait parler de deux sous-familles, les traditionnels « vieux style » et les traditionnels « retour au bio. »

Dans les modernes on rangera sans hésiter les vins de Colombo et dans une moindre mesure ceux d’Alain Voge et du domaine Courbis. Des raisins égrappés, des extractions relativement importantes, des élevages en bois neuf (le plus souvent) et appuyés.

Dans les traditionnels « vieux style » on retrouvera les domaines les plus anciens, ceux qui ont toujours constitué le socle de l’appellation comme Robert Michel, qui a transmis ses vignes en 2007  (en conservant un stock impressionnant de vieux millésimes) à Guillaume Gilles et à son neveu Vincent Paris, deux jeunes très doués à suivre absolument dans les années à venir, Auguste Clape, Marcel Juge (officiellement en retraite mais qui continue à vinifier une petite production confidentielle), le domaine Balthazar ou le domaine Lionnet qui a évolué vers le bio depuis 2003 avec l’arrivée de Corinne, la troisième génération après son grand-père Michel et son père Pierre. Et précisément, dans la (relativement) jeune génération soucieuse de revenir à une véritable tradition, l’approche bio fait partie du projet comme chez Thierry Allemand ou Matthieu Barret. Dans cette famille traditionnelle, qu’elle soit en bio ou non, on retrouve une façon commune de produire le vin : en général peu ou pas d’égrappage, des levures indigènes, de longues cuvaisons, un élevage long, souvent en grands contenants et très rarement en bois neuf, chaptalisation rare. Avec quelques nuances quand même notamment sur l’utilisation du soufre en vinification.

Enfin, depuis une vingtaine d’année on peut citer comme grands millésimes, sans ordre hiérarchique : 2010, 2009, 2007, 2005, 2001, 1999, 1995, 1991, 1990.

Accédez aux rapports mensuels d’iDealwine sur les ventes aux enchères de vins.

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