Château Siran vient d’organiser en petit comité une dégustation de son grand vin de Margaux sur un siècle de millésimes (1914-2014). Un moment rare et magique et la confirmation que les grands bordeaux sont (presque !) éternels…
Goûter un vin plus vieux que soi est toujours un peu excitant et surtout très émouvant. Qui prend évidemment encore plus de sens quand on a dépassé la soixantaine… L’idée même de goûter et d’avaler un aliment élaboré il y a plus de cent ans est tout simplement quelque chose de véritablement magique… Quand on est face à son verre empli d’un vin rouge produit au moment même où des millions de Français et d’Allemands viennent de s’engouffrer dans la plus sanglante des guerres, donne une dimension incroyable à un geste pourtant très simple : lever son verre, l’incliner vers ses lèvres et prendre une gorgée du Château Siran 1914…
L’histoire de cette fabuleuse dégustation a débuté lors d’une visite au château de Jane Anson, l’envoyée spéciale permanente à Bordeaux du magazine britannique Decanter. Découvrant la collection de tous les millésimes dormant dans l’incroyable abri anti atomique construit à la lisière de la propriété, elle a immédiatement suggéré au propriétaire actuel, Edouard Miailhe, d’organiser une grande verticale de tous ces vins.
Passer de la suggestion à l’organisation ne s’est pas révélé très compliqué et nous voilà quelques privilégiés réunis autour de 24 millésimes choisis parmi ceux qui avaient, bien entendu, la meilleure réputation de conservation. Les vins étaient proposés en quatre séries de six millésimes, servis dans le sens chronologique des années.
1914
Encore de la fraîcheur, pas trop usé. Toujours un peu d’énergie. Finale nette sur des notes de roses fanées. Conforme à ce qu’on pouvait imaginer d’un vin de cet âge dans un millésime plutôt moyen dans le Médoc.
1916
Un vin qui a encore un peu de corps, pas du tout fatigué, sans ces notes habituelles de vin très vieux et monocordes. Une certaine densité de matière, notes de tabac.
1921
Trop marqué par une évolution acétique pour être apprécié.
1928
Avec ce nez encore très présent on a du mal à imaginer que ce vin avoue 86 ans ! Il y a encore des notes de fruit à l’attaque de bouche, cette dernière se durcissant néanmoins un peu en finale en raison d’une acidité volatile un peu marquée.
1929
Nez retenu sur des notes de fruits très mûrs. Bouche dans la lignée avec encore une sensation de belle maturité des raisins, à la limite d’une très légère sucrosité, mais équilibrée par une belle acidité. Incroyable de présence encore !
1937
Très joli nez, arômes de maturité, notes de cuir usé et de vieux bois patiné. En bouche on est un peu sur la même trame aromatique que le 1929 mais un ton en dessous en intensité, surtout à partir du milieu de bouche. Finale très salivante.
1947
Au nez, on franchit une marche dans la sensation de jeunesse. Très fin, agréable, pur et net. La bouche est particulièrement douce et soyeuse. Belle persistance sur des notes florales/végétales délicates.
1949
Nez assez proche du 1947, toujours sur ces notes florales très agréables. Bouche dans le même esprit que le 1947 mais avec un supplément d’intensité, plus de matière, plus de longueur. Notes de griotte, toujours dans la dentelle, la finesse et la délicatesse. Un vin qui évoque aussi la Bourgogne et le pinot.
1955
Nez retenu avec des notes un peu alcooleuses auxquelles se mêlent des touches mentholées. Bouche plus carrée, plus en muscle et en puissance que les deux millésimes précédents. Moins de finesse, alcool également sensible en finale.
1959
Nouveau cran dans la sensation de jeunesse. Très conforme à ce qu’on peut s’imaginer d’un bordeaux classique à maturité avec des notes de cuir et de tabac. Bouche qui présente encore une sensation tannique, mais qui reste très dynamique, presque vibrante avec une belle tension intégrée à la matière. Peut-être un léger manque de délicatesse.
1961
Nez dense et profond. Notes de graphite. Très net, belle complexité, sensation là encore du classicisme bordelais, avec une jolie droiture possédant juste ce qu’il faut d’une élégante austérité. Bouche à l’unisson, très classique bordelaise, belle évolution sur des notes de sous-bois de fleurs rouges fanées. Peut-être un peu trop sérieux.
1966
Fait très jeune au nez. Notes de poivron rouge mûr, très cabernet (bien que le merlot soit presque à égalité, comme presque toujours sur ce cru). Bouche assez dense, encore un peu tannique, finale sur des notes un peu fumées.
1970
Comme le 1921, trop marqué par une évolution acétique pour être apprécié.
1978
On retrouve ces notes très cabernet-sauvignon au nez comme en bouche. Celle-ci semble encore très jeune, assez puissante avec une finale dynamique.
1983
Poivron un peu confit au nez, notes fumées, de mine de crayon. Sensation d’une grosse maturité du fruit. On retrouve cette maturité en bouche, avec une petite sensation tannique également, signe de la jeunesse incroyable de ce vin.
1985
Jolie maturité là encore avec toujours ces notes de poivron rouge mûr. Belle densité de bouche, beaucoup de mâche, sensation de matière musclée mais bien maîtrisée. On reste dans l’élégance raffinée. Belle finale longue sur un végétal/floral très noble.
1989
Ici le nez présente à la fois des notes de poivron rouge et de prune bien mûrs. La bouche possède quelque chose de voluptueux, belle matière, notes de graphite, un peu fumées aussi. Une matière puissante qui manque peut-être, en faisant le difficile, un tout petit peu d’élégance. Mais un beau vin, assurément !
1998
Nez très jeune encore sur un fruité délicat, très pur, très net, ciselé. Un superbe équilibre en bouche alliant richesse et tension. Finale très dynamique et salivante. Un vin pas extraverti mais avec du fond. Un vin dont l’équilibre frais donne faim ! Donc un beau vin de repas.
2000
Nez dense, très profond, très « droit dans ses bottes. » Bouche dans le même esprit, belle densité de matière, jolie maturité, mais s’exprimant pour l’instant plutôt dans une certaine discrétion. Pas un vin hédoniste.
2003
Nez très mûr mais sans la sensation de pruneau un peu confit que l’on trouve souvent sur ce millésime si spécial. C’est compoté mais pas cuit. Bouche dense, très pleine, mais offrant une puissance manquant un peu trop de finesse et offrant une finale basculant assez vite sur une certaine sécheresse des tannins.
2005
Très joli nez retenu, plein, dense, très élégant, belle maturité juste des raisins. Bouche pleine, très équilibrée, sans aucun excès, encore très jeune bien entendu, avec une élégance folle, de la classe sans être austère.
2009
Le merlot (prune) semble très dominant au nez, très mûr mais sans tomber dans la surmaturité. La bouche par contre est un peu encombrante et saturante, vite fatigante. Un vin qui a sans doute besoin d’une longue garde pour s’affiner.
2010
Très joli nez fin, délicat, plein, montrant une juste maturité. La bouche est très élégante, avec tous les curseurs au sommet, mais dans un équilibre parfait. Matière pleine et très dynamique en bouche, beaucoup de fraîcheur et la classe du grand vin. Superbe.
2014
Il s’agit là bien entendu d’un « prototype », un assemblage reflétant sans doute ce qui sera finalement élaboré mais avec des merlots (majoritaires) qui n’étaient pas encore passés dans le bois. Nez très net, très pur, joli fruité frais, tannins élégants, en finesse. Prometteur, probablement plus proche d’un 2008 que d’un 2005 ou d’un 2010.
Petit bilan
- Une qualité très homogène de tous les vins goûtés, avec des nuances, bien entendu, et un style basé sur la finesse et la délicatesse
- Une évidence s’impose : un grand bordeaux est au mieux de sa forme entre 20 et 30 ans de garde (pour un beau millésime bien entendu). C’est là qu’il présente la plus belle harmonie entre jeunesse des arômes et patine des tannins.
- Les millésimes qui nous ont le plus « parlé », que ce soit pour leur qualité absolue ou par rapport à un millésime théoriquement moins coté (dans l’ordre inverse de la dégustation). Un cran au-dessus : 2010, 2005, 1998, 1983, 1949, 1929. Une (toute) petite marche plus bas : 1989, 1985, 1961, 1959, 1947, 1937.
Tableau de la cote de Château Siran:
Millésime | Cote iDealwine |
Château Siran 2011 | 20 € |
Château Siran 2010 | 22 € |
Château Siran 2009 | 26 € |
Château Siran 2008 | 21 € |
Château Siran 2007 | 18 € |
Château Siran 2006 | 20 € |
Château Siran 2005 | 27 € |
Château Siran 2004 | 22 € |
Château Siran 2003 | 23 € |
Château Siran 2002 | 18 € |
Château Siran 2001 | 25 € |
Château Siran 2000 | 28 € |
Château Siran 1999 | 16 € |
Château Siran 1998 | 22 € |
Château Siran 1997 | 22 € |
Château Siran 1996 | 29 € |
Château Siran 1995 | 32 € |
Château Siran 1994 | 20 € |
Château Siran 1993 | 15 € |
Château Siran 1992 | 26 € |
Château Siran 1991 | 24 € |
Château Siran 1990 | 30 € |
Château Siran 1989 | 29 € |
Château Siran 1988 | 30 € |
Château Siran 1987 | 24 € |
Château Siran 1986 | 41 € |
Château Siran 1985 | 25 € |
Château Siran 1984 | 33 € |
Château Siran 1983 | 29 € |
Château Siran 1982 | 32 € |
Château Siran 1981 | 19 € |
Château Siran 1980 | 27 € |
Château Siran 1979 | 21 € |
Château Siran 1978 | 31 € |
Château Siran 1976 | 17 € |
Château Siran 1975 | 20 € |
Château Siran 1971 | 37 € |
Château Siran 1970 | 27 € |
Château Siran 1969 | 73 € |
Château Siran 1966 | 37 € |
Château Siran 1964 | 38 € |
Château Siran 1962 | 25 € |
Château Siran 1961 | 88 € |
Château Siran 1957 | 97 € |
Château Siran 1955 | 72 € |
Château Siran 1950 | 63 € |
Château Siran 1949 | 186 € |
Château Siran 1947 | 123 € |
Château Siran 1943 | 69 € |
Château Siran 1914 | 178 € |
Accédez aux vins du Château Siran actuellement en vente
Consultez le prix d’un vin
Pas encore inscrit(e) pour participer aux ventes ? Complétez votre inscription, c’est gratuit !