Vins de fête valeur patrimoniale

A Noël et durant la période de fêtes de fin d’année, les amateurs sabrent le Champagne, dégustent des vins liquoreux autour du foie gras, et s’offrent du vin en cadeau sous le sapin. Tous ces produits festifs ont-ils un intérêt patrimonial, et peuvent-ils également constituer des valeurs de placement pour un amateur en quête de diversification ? Angélique de Lencquesaing, co-fondatrice d’iDealwine, répondait aux questions d’Antoine Larigaudrie, dans l’émission Tout pour investir, sur BFM Business.

A l’approche de Noël, les Français s’apprêtent-ils à ouvrir de grandes bouteilles, et particulièrement du Champagne ? En toute modération, bien sûr…

Il peut paraître contre-intuitif d’évoquer des vins qui seront bus, et donc consommés dans une émission consacrée au placement. Mais c’est bien l’attractivité de ce marché, le fait que les produits soient appréciés et fassent rêver l’amateur qui vont asseoir leur attrait, en termes de placement. Car un vin n’est pas nécessairement acquis en vue d’être bu immédiatement. En patientant dans une cave, bien conservé, il va prendre de la valeur. C’est vrai pour les vins rouges et blancs, les liquoreux, et aussi les effervescents comme le champagne. Car oui, le champagne peut se conserver. Donc si les amateurs boivent du champagne à Noël, c’est un bon signal pour le marché. La réponse d’un sondage mené récemment par l’IFOP, à la demande de l’organisme Vin et Société, est claire : les vins effervescents figurent au menu de 57% de Français qui envisagent d’ouvrir des boissons alcoolisées à ce moment de l’année.

Oui, mais pas spécifiquement du Champagne, alors, vous évoquez les vins effervescents.

C’est vrai, des vins effervescents sont produits dans de nombreuses régions, on peut citer les crémants d’Alsace ou de Bourgogne, les effervescents de Loire, de Savoie… Mais le champagne véhicule l’image de LA boisson festive par excellence.

Les ventes de Champagne subissent un net repli depuis de longs mois, tout de même…

Certes après 2021 et 2022, deux années fastes de la période post-COVID, l’heure est toujours à la normalisation. Après une année 2023 dans le rouge (-8,2% de ventes, 299M de cols expédiés), les grandes maisons de Champagne ont encore vu leurs ventes reculer au cours du premier semestre 2024 (-10% environ). Le contexte international, tant sur le plan économique que géo-politique n’est pas particulièrement festif, et pourtant le Champagne reste un segment actif du marché des grands vins, si l’on considère l’indicateur que représente le marché secondaire des enchères, que nous suivons à la loupe sur iDealwine.

Quelle est la part du Champagne dans les ventes aux enchères, les ventes se concentrent en fin d’année ?

Avec 4,1% en volume, et 5,6% de la valeur adjugée sur iDealwine en 2023, la part du champagne dans les ventes aux enchères de vin est minime, mais elle a tout de même pratiquement doublé en deux ans. Car il s’agit là d’un segment très suivi, et très dynamique du marché des enchères de vin.

C’est un prisme bien français que de considérer le champagne comme un bien à réserver aux fêtes de fin d’année. Sur les marchés étrangers, les amateurs n’observent pas une telle saisonnalité dans leur consommation et les clients pointus sont en permanence à l’affût de cuvées rares. Résultat, les champagnes se vendent bien tout au long de l’année.

Vins de fête valeur patrimoniale
Angélique de Lencquesaing, co-fondatrice d’iDealwine, sur BFM Patrimoine

Donc le champagne peut être considéré comme un vin de placement, se conserve-t-il ? N’est-ce pas risqué d’acheter aux enchères un vieux champagne ?

La région Champagne bénéfice de plusieurs atouts : sa notoriété, qui est mondiale, associée à celle de grandes maisons renommées. Et aussi, contrairement à certaines idées reçues, la capacité de conservation des cuvées, à condition de respecter les règles de température et d’hygrométrie propres à une bonne cave.

Il faut savoir que deux catégories de champagne co-existent. Le champagne « brut sans année » est la cuvée phare d’une maison, celle qui exprime, année après année, la signature de la marque, reflet du style que le chef de cave veut donner au champagne, et que l’amateur retrouvera, à chaque fois qu’il achètera une bouteille. Cette cuvée résulte d’un assemblage de différentes années, éventuellement de différentes parcelles, qui patientent à l’ombre des caves de la maison. Et, dans les grandes années, lorsque les conditions climatiques sont favorables, le chef de cave décide de réaliser parallèlement une cuvée millésimée d’une seule année. Elle sera produite en quantités bien moindres, donc elle sera plus rare, et plus recherchée, notamment dans les ventes aux enchères.

Les champagnes millésimés sont ceux qui se conserveront le mieux. Ce sont eux qui se valoriseront le mieux sur le marché secondaire des enchères, car non seulement ils bénéficient d’une plus grande renommée, mais leur ancienneté est également identifiable, à l’inverse d’un brut sans année.

Il faut donc privilégier les champagnes des grandes maisons, dans une perspective d’investissement ?

Sur le marché secondaire des enchères, la demande se répartit de façon équitable entre champagnes de grandes maisons et producteurs plus confidentiels. L’an dernier, les grandes maisons renommées trustaient sans surprise le haut du palmarès en termes de volumes de ventes. Dom Pérignon, Krug, Roederer, Salon et bien sûr Selosse occupent les premières places. Récemment, une bouteille de Krug Clos du Mesnil 1985 a été adjugée 2 379€. D’autres maisons, de plus petite taille, bénéficient d’une superbe renommée qui leur assure de beaux succès aux enchères, c’est le cas pour les champagnes Ruinart, Bollinger ou Drappier, par exemple.

Mais les champagnes de producteurs, issus d’exploitations plus confidentielles, ont désormais aussi les faveurs des amateurs. L’émulation est forte parmi la nouvelle génération de producteurs, c’est une région passionnante pour les adeptes de vins effervescents. Nombre de ces vignerons travaillent en bio, en biodynamie et parfois selon des méthodes nature. Parmi les signatures qui font régulièrement la Une des enchères sur iDealwine, on peut citer Cédric Bouchard, Ulysse Collin, Pierre Peters, Egly-Ouriet, ou encore Raphaël Bérêche.

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