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Le Domaine de Chevalier est incontestablement l’une des plus belles signatures de l’appellation Pessac-Léognan. Cette propriété historique n’a eu de cesse de se réinventer et d’évoluer, pour le plus grand plaisir des amateurs qui ont vu progresser toujours plus la qualité des vins. Un modèle à succès que la famille Bernard a depuis exporté dans différentes propriétés dont elle a pris les rênes. Zoom sur ce domaine emblématique, avec l’aide d’Olivier Bernard.

L’œuvre de la famille Bernard

Celui qui se nommait autrefois domaine de Chivaley (chevalier en gascon) et ne comptait que quelques hectares de vignes au XVIIe siècle, a surtout pris son essor à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, avec son rachat par Arnaud Ricard en 1865, qui va beaucoup s’investir sur le domaine avec son fils Jean. Cette exploitation va rester dans les mains de cette famille qui a construit sa réputation (avec notamment sa nomination dans le classement des Graves de 1953), jusqu’en 1983, date à laquelle le domaine est racheté par la famille Bernard. Cette dernière détient un groupe fondé en 1928 par Lucien Bernard et spécialisé dans le négoce d’eaux-de-vie et de grands crus de Bordeaux. Olivier Bernard, l’actuel propriétaire, est le petit-fils de Lucien Bernard et le fils de Liliane Cruse et Jean Bernard.

En 1983, alors âgé de 23 ans, Olivier Bernard à qui sa famille avait confié la responsabilité du domaine, rencontre Claude Ricard qui gérait la propriété depuis plus de 35 ans et lui transmet sa passion. Ils ont ainsi pu travailler ensemble pendant 5 ans, ce qui a permis à Olivier Bernard d’appréhender patiemment et profondément la nature et le terroir du domaine de Chevalier.

Domaine-de-Chevalier-Olivier-Bernard

Le vignoble a progressivement été agrandi, tout comme les bâtiments. La rénovation complète des installations s’est faite entre 1984 et 1991, sur la base de considérations à la fois techniques et esthétiques. Les différents bâtiments du domaine se caractérisent par leur sobriété, qui leur permet de s’intégrer harmonieusement au paysage viticole. Ces ajouts et rénovations sont ainsi venus compléter la structure d’origine, datant du XVIIe siècle.

Le vignoble a lui aussi été agrandi et reconfiguré par Olivier Bernard, passant de 18 hectares lors de la reprise en 1983, à 65 aujourd’hui. Beaucoup de vignes ont été replantées à cette époque et arrivent aujourd’hui à une certaine maturité, d’autres encore jeunes, sont pour l’heure écartées du grand vin, mais paraissent prometteuses pour l’avenir. Avec le réchauffement climatique, la proportion des cépages plantés a elle aussi évolué, avec bien plus de cabernet sauvignon.

Un jardin dans la forêt

Si vous vous êtes déjà rendus au domaine de Chevalier, vous avez certainement dû être étonnés de son emplacement, isolé dans la forêt. Le domaine, qui couvre une centaine d’hectares, comporte environ 65 hectares de vignes. L’encépagement est composé de 63% de cabernet sauvignon, 30% de merlot, 5% de petit verdot et 2% de cabernet franc pour les rouges ; et de 70% de sauvignon et de 30% de sémillon pour les blancs. L’agrandissement progressif du vignoble permet de redécouvrir de grands terroirs qui n’étaient plus en production pendant un temps. Leur ajout progressif dans le grand vin au fil du vieillissement des vignes lui amène une complexité supplémentaire, « les vins de Chevalier n’ont jamais été aussi beaux aujourd’hui et l’extension du vignoble sur d’autres terroirs y a joué un rôle. », précise Olivier Bernard.

La présence de la forêt joue un rôle non négligeable dans ce qui fait les particularités du terroir de Chevalier, contribuant à l’instauration d’un microclimat plus frais et avec plus d’amplitude thermique. Il en découle ainsi un cycle végétatif légèrement décalé par rapport au reste de l’appellation, qui démarre plus tardivement. La forêt permet aussi naturellement la présence d’un écosystème riche.

« Un grand vin nait d’un grand raisin. » : ce sont par ces mots qu’Olivier Bernard nous résume la philosophie du domaine et l’importance pour eux du travail à la vigne. « Et pour avoir un beau fruit, il faut un grand terroir bien sûr, mais que l’on respecte et des vieilles vignes, travaillées respectueusement, tout comme les sols. », poursuit-il. Le domaine a la chance de n’avoir jamais connu de désherbants, mais la famille Bernard va bien plus loin dans le respect du vivant depuis quelques années. En effet, tous les produits CMR ont été bannis depuis 2016 et surtout, depuis quelques années, les 2/3 de la propriété sont travaillés selon les principes biodynamiques. Concrètement, une partie du vignoble est travaillée en biodynamie, une autre en bio et la dernière en raisonné et sans CMR. L’heure n’est pas pour l’instant à la certification, même si la propriété aimerait y parvenir dans les années à venir. « On avance progressivement, mais on commence à bien connaître la biodynamie. C’est un sujet très sensible et fragile, qui nécessite que la plante se réhabitue et recomprenne ses codes, que les hommes changent à 100% leur philosophie de travail. Il faut aussi se doter de matériel nouveau, pour être capable de traiter en 24h par exemple ». L’année 2020, qui s’est pour le moment avérée très pluvieuse (plus de 600mm de pluie sont tombés entre le 1er janvier et mi-juin au domaine de Chevalier), a de nouveau montré à quel point la pratique de la biodynamie dans une région très humide comme Bordeaux est complexe. « Dans les périodes pluvieuses, on s’aperçoit de la grande sensibilité du vignoble travaillé en biodynamie, il faut être d’une vigilance extrême, très proche et à l’écoute du vignoble et de la nature et surtout très engagés. Il faut en effet pouvoir travailler au pied levé, les weekends et jours fériés si besoinC’est un sujet vraiment complexe, particulièrement à Bordeaux, mais aussi un très beau sujet, qui nous oblige à nous rapprocher de la nature. Si on ne le fait pas, on court droit à la catastrophe.».  Si tout va bien, le domaine pourrait ainsi entamer les démarches de certification en biodynamie dès cette année, pour les vins blancs dans un premier temps.

Plus de produits CMR, utilisation de la confusion sexuelle pour les insectes, travail en bio et en biodynamie sur certaines parcelles résument donc le travail effectué dans les vignes. Les sols sont travaillés depuis toujours, tandis que les pratiques comme l’effeuillage et les vendanges en vert sont réalisées au cas par cas selon les millésimes, loin des recettes préétablies et gravées dans le marbre.

Les vendanges sont évidemment manuelles et un triple tri s’opère, d’abord à la vigne, puis au chai sur table de tri et enfin un dernier tri grain par grain, après l’égrappage ; ce dernier tri permet un tri vraiment précis sur la maturité et l’état sanitaire des baies, dont certaines pouvaient être peu visibles dans la masse de la grappe entière. Après ce tri, les équipes font un foulage léger puis les cuves sont remplies par gravité, sans pompage. Pour les vins blancs, les vendanges se font par tris successifs, en petites cagettes.

Enfin, si le travail dans les vignes est primordial pour l’équipe du domaine de Chevalier, Olivier Bernard nous explique que pour lui, « un grand vin est un vin où le cépage s’efface au profit du terroir, où il n’est qu’une courroi de transmission. Dans les grands millésimes par exemple, le cabernet peut avoir des traits communs avec le merlot et inversement. La maturité joue beaucoup justement dans cette capacité à estomper le côté variétal pour laisser le terroir s’exprimer. C’est par exemple très visible pour le sauvignon, mais ça l’est aussi avec le cabernet. » Une affirmation à laquelle on souscrit complétement !

Travailler en douceur au chai, produire des vins délicieux à tout âge

Pour les vinifications, la famille Bernard s’est entourée du célèbre œnologue Stéphane Derenoncourt depuis 2002, notamment pour passer à l’élevage sur lies des vins rouges, mais aussi pour les blancs de Denis Dubourdieu, ce jusqu’à son décès. Sinon le travail au chai est plutôt classique, se faisant en douceur et en prenant son temps.

Le pressurage, doux et lent est réalisé dans un pressoir pneumatique et les vinifications, parcellaires, se font en barriques. Elles démarrent avec des levures sélectionnées dans un premier temps, puis avec les levures indigènes. Pour les vins blancs, des bâtonnages réguliers sont effectués pour conforter la structure du vin et lui apporter un peu de gras.

Les élevages se font avec environ 30% de bois neuf pour les blancs et 40% pour les rouges, sur lies fines pour les deux couleurs ; les assemblages sont réalisés assez tôt, en général au mois de janvier suivant la récolte. La clarification naturelle permet de ne faire qu’une très légère filtration avant la mise en bouteille.

Olivier Bernard explique que différentes avancées de ces dernières années leur ont permis de réduire les taux de soufre ajouté. Tout d’abord les élevages sur lies pour les vins blancs comme les vins rouges permettent de nourrir et protéger les vins contre l’oxydation. Également, les bouchons en liège technologique DIAMS, parce qu’ils apportent une sécurité parfaite et durable permettent eux aussi de réduire les doses de sulfites. Les vins du domaine de Chevalier se retrouvent ainsi avec des doses très raisonnables de soufre, de l’ordre de 25mg/L.

Des suggestions d’accords mets et vins avec les vins du domaine de Chevalier

Sur les vins blancs de la propriété bus jeunes et offrant donc une belle fraîcheur de fruits (pamplemousse, citron vert) et des bouches puissantes, longues et légèrement boisées, Olivier Bernard aime particulièrement les crustacés (crabe, homard, langoustines, gambas) ainsi que les poissons grillés. Des mets cuisinés simplement. Pour les blancs plus âgés, qui vont perdre en tension pour aller vers plus de douceur et une aromatique plus complexe (fruits exotiques, mangue, pêche blanche), il recommande des poissons plus gras et des textures douces comme les cèpes ou le foie gras, mais aussi les volailles, pourquoi pas accompagnées de morilles. Enfin, de nombreux fromages fonctionnent aussi très bien, comme le vieux comté.

Pour les vins rouges bus jeunes qui offrent de la tension, il recommande des poissons ou des plats plus puissants de viandes rouges.

Les vins du domaine de Chevalier

Les vins de la propriété se caractérisent par leur finesse et leur élégance, leur tension, la belle définition de leurs tanins très racés et leur pureté. Ils ont l’avantage, comme les autres plus grands vins de Pessac-Léognan de pouvoir se déguster à merveille jeunes mais aussi bien sûr de gagner en complexité avec une longue garde. Et justement, iDealwine a eu la chance d’obtenir du château de très beaux millésimes matures et parfois en grand format, tels que le domaine de Chevalier 2000 et 2010.

  • Domaine de Chevalier blanc

Un pessac-léognan à l’aromatique très complexe, avec une matière riche et une agréable fraîcheur.

  • Domaine de Chevalier rouge

L’un des pessac-léognan les plus réputés, à la texture incroyablement veloutée et avec une belle profondeur et beaucoup de complexité.

Les autres propriétés de la famille Bernard à Pessac-Léognan et Sauternes

La famille Bernard est également propriétaire ou gestionnaire d’autres très beaux domaines de Pessac-Léognan : le domaine de la Solitude et le château Lespault-Martillac, ainsi que d’un domaine dans le Sauternais, livrant une superbe production de vins blancs secs, le Clos des Lunes.

Le domaine de la Solitude est une très ancienne propriété de Martillac, appartenant à la communauté religieuse de la Sainte Famille et exploitée en fermage par la famille Bernard. Elle livre des vins rouges et blancs souples, fruités et gourmands et conserve des prix particulièrement doux.

Le château Lespault-Martillac, situé lui aussi sur la commune de Martillac, est l’un des plus anciens crus de l’appellation. La famille Bolleau, qui en est propriétaire, en a confié la gestion à Olivier Bernard en 2009. Et ce dernier s’est pleinement investi pour faire progresser ce domaine, dont la reconnaissance grandit d’année en année.

Enfin, en 2011, la famille Bernard a créé une nouvelle propriété dans le Sauternais, le Clos des Lunes, entièrement dédiée à la production de vins blancs secs. Ici, c’est Hugo Bernard, le fils d’Olivier, qui est aux commandes. Le domaine a tout de suite rencontré son public d’amateurs grâce à une production de haut niveau de vins d’une grande finesse, tendus, cristallins et livrant de belle minéralité.

Le domaine de Chevalier, ce qu’en disent les guides

  • La RVF (**)

La famille Bernard met tout en œuvre depuis 1983 pour maintenir cette très belle propriété dans le peloton de tête de l’appellation. Grâce à un outil technique de pointe et un vignoble parfaitement soigné, qui a désormais pris l’âge nécessaire pour produire de grands raisins, les vins sont irréprochables, tant en blanc qu’en rouge. Le vignoble, situé dans l’une des zones froides de l’appellation, est tenu comme un jardin. Les raisins blancs sont triés avec un soin extrême et leur vinification s’est considérablement sophistiquée, sans modifier le style ni la classe des vins. Chevalier incarne la finesse et l’élégance dont peuvent faire preuve les vins de l’appellation, sans que cela hypothèque leur potentiel de garde.

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Nous aurons la chance d’accueillir Olivier Bernard en vidéo Live sur notre page Instagram le lundi 22 juin à 18h30. Si vous manquez ce rendez-vous, vous pouvez bien entendu retrouver la vidéo sur notre IGTV.

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