Degustation-verticale-haut-bailly-1A l’invitation de Véronique Sanders, nous avons eu l’occasion exceptionnelle de déguster dans les meilleures conditions les 20 millésimes produits sous l’ère de Bob Wilmers, propriétaire du Château Haut-Bailly de 1998 à 2017. La première partie de l’article (Dégustation | Château Haut-Bailly 1998-2017, l’étoffe des plus grands (1)), décrivait les vins de 1998 à 2009, poursuivons maintenant avec les huit millésimes qui suivent.

Château Haut-Bailly 2010 « L’excellence »

Haut-Bailly fait partie de ces propriétés qui ont réussi un doublé fantastique dans les millésimes 2009 et 2010.

Après avoir goûté tout ce qui précède, à savoir les vins des années 1998 à 2009, on apprend à repérer rapidement les marqueurs d’excellence de la propriété. Et avec ce 2010, inutile de préciser qu’ils sont tous présents.

Ce 2010 figure, c’est évident, parmi les tout premiers de la classe. Et pourtant, voici encore un vin qui s’annonce, un peu plus sérieux, un peu plus distant que le 2009. Serait-ce l’un des marqueurs de Haut-Bailly que de conserver une certaine pudeur dans les grands millésimes ? L’excellence n’a pas toujours besoin de tambours et trompettes pour s’annoncer. Donc, haut-bailly 2010 s’avance, tranquille, avec un nez à la fraîcheur légendaire, une élégance proverbiale, un fruit parfaitement pur. Le charme agit instantanément, discrètement. A Haut-Bailly, on est bien élevé, pas de racolage, même si de discrète notes poivrées viennent pimenter la rencontre, faire rosir nos joues… En bouche, c’est une matière ample, concentrée, puissante qui envahit le palais. Une puissance contenue, car l’équilibre du vin est magistral, porté par une belle structure, pleine de fraîcheur. Le bouquet complexe de fruits est présent jusqu’au bout de la finale, intense et d’une admirable longueur. On a beau savoir qu’il est indéniablement taillé pour la garde, on le trouve déjà délicieux. On en redemanderait. N’est-ce pas la marque supplémentaire d’un grand vin que d’avoir l’élégance de se montrer délicieux dès son très jeune âge ?

Son étoffe : mieux encore qu’un beau cachemire, un manteau de vigogne. Irrésistible.

Château Haut-Bailly 2011 « La marque du sceau de son terroir »

La robe de ce 2011 apporte la preuve que l’on est bel et bien entré dans une décennie de vin beaucoup plus jeunes, encore en devenir. Intense, elle impressionne à l’œil  par ses nuances rubis noir. Le nez discrètement réglissé précède une attaque en bouche douce, qui déploie une matière ample et pleine d’énergie, portée par une belle acidité. Les fruits bien mûrs sont parfaitement présents, jusqu’à la finale, un vrai feu d’artifice de fruits. L’ensemble est dense, doté d’une belle structure, avec une texture caressante. Ce vin sera un régal à table, c’est certain.

Son étoffe : un pashmina enveloppant et soyeux.

Château Haut-Bailly 2012 « Virtuose »

Avec son printemps pluvieux, marqué par les caprices d’une météo délicate jusqu’à la fin du mois de juillet, 2012 n’aura pas été un millésime de tout repos pour l’équipe de la propriété. Et pourtant, c’est sans doute à cela que l’on reconnait la grande classe de Haut-Bailly : rien de tous les efforts mis en œuvre pour surmonter les obstacles ne transparait. Souffrir en silence et garder le sourire. Le vin s’avance, éclatant avec sa robe lumineuse, rubis pourpre. Le nez quant à lui joue une partition joyeuse, gourmande, gorgée de fruit. Dans ce bouquet complexe viennent éclore des arômes de réglisse, des notes florales et des flaveurs délicatement boisées et torréfiées. En bouche les tannins, déjà bien fondus, sont encore perceptibles et viennent mettre un peu d’ordre et de structure dans toute cette joyeuse exubérance. La finale est vive, virtuose, brillante. Quelle belle énergie dans ce vin ! Un concerto pour violon de Mendelssohn lui irait comme un gant.

Son étoffe : pour la finesse de sa trame, un organza

Château Haut-Bailly 2013 « Miraculé »

Miraculé le 2013 ? Il a fallu à l’équipe de Haut-Bailly beaucoup de patience, des soins méticuleux apportés à un vignoble attaqué par l’humidité à la veille des vendanges, alors même qu’il avait déjà eu à souffrir du manque de soleil durant toute la première partie de l’année. Un millésime délicat, donc, qui aura nécessité un travail de sélection rigoureux et implacable, pour ne garder que le meilleur de la vendange. Si le nez est classique, l’attaque surprend par sa souplesse, son caractère velouté. Et pourtant la structure est solide, ce 2013 surprend par sa vigueur, son caractère presque… masculin, tannique. Puissante, la matière tapisse énergiquement le palais. Et que dire de sa persistance ! Voilà un vin racé, assurément.

Son étoffe : une belle laine vierge, qui réchauffe et revigore

Château Haut-Bailly 2014 « Intensité et énergie »

Ce 2014 fait la démonstration d’un exercice parfaitement maitrisé entre élégance et puissance. Puissance et densité de la robe, séduction intense des arômes, au nez d’une grande pureté, au fruité d’une gourmandise irrésistible. Elégance dans l’attaque, précisément maîtrisée pour ne pas tout emporter sur son passage et risquer de saturer le palais. La matière, intense et vibrante se déploie en bouche, déversant un fruit que l’on sent cueilli à sa parfaite maturité. Voilà un superbe vin de gastronomie que l’on veut réserver à des mets nobles. On l’accompagnerait également d’une cantate de Bach pour sa structure, son énergie. Son génie, aussi.

Son étoffe : un voile de cachemire

Château Haut-Bailly 2015 « Plénitude »

Je me souviens de Véronique qui nous avait dit à quel point l’année 2015 avait réuni tous les qualificatifs qui rendent heureux les vignerons. Je me souviens de cette photo pleine de joie, prise à l’arrière d’un tracteur durant les vendanges, Véronique, radieuse, aux côtés de Denis Dubourdieu… Un beau millésime serein qui produira un grand millésime.

. Décidément, les vins de Haut-Bailly n’ont pas la victoire triomphante. Un grand millésime appelle, avant tout, la discrétion. Ce 2015 livre un nez plein de fraîcheur, gorgé d’arômes d’un fruit intense, d’une pureté remarquable. Le bouquet offre aussi quelques notes fumées élégantes, relevées d’épices et de truffe. Et ensuite, quelle douceur dans ce vin, quelle délicatesse ! La suavité est exceptionnelle, de l’attaque à la fin de bouche, la matière délicatement enveloppante s’achève sur une finale finement poivrée. Du velours, de la rondeur, de la douceur.

Son étoffe : un velours de soie

Château Haut-Bailly 2016 « Le bonheur »

Issu d’un millésime solaire et généreux, Haut-Bailly 2016 constitue le point d’orgue de cette dégustation. Il réunit tout ce que l’on a le plus aimé dans les vins de cette propriété d’exception. La discrétion de sa première approche, cette façon délicate de conserver une certaine réserve avant de se laisser approcher. Douceur de la texture, finesse des tannins, un style empreint d’une grande pureté et d’une remarquable précision dans l’expression des arômes et de la maturité du fruit. Sensation douce de voir se déployer en bouche une matière issue de raisins maniés avec la plus grande délicatesse, infusés pour en extraire subtilement les arômes. Finesse et concentration d’un jus caressant et vibrant qui tapisse délicatement le palais, avec une élégance infinie. Longueur merveilleuse qui laisse perdurer longtemps l’empreinte de ses effluves parfumés.

Son étoffe : un satin de soie

Château Haut-Bailly 2017 « La beauté de la nature »

Haut-Bailly n’a pas été épargné par l’épisode de gel qui a ravagé une partie du vignoble bordelais au cours du mois d’avril. Heureusement, la topographie du terroir est favorable à la propriété et les parcelles historiques ont bien résisté. Si la récolte est faible, le vin est de belle facture.

Nous l’avions déjà beaucoup aimé en primeur. « Est-ce parce qu’il nous est présenté par Véronique Sanders elle-même ? Le 2017 de Château Haut-Bailly s’avance, tout en discrétion, et sous la robe étincelante le nez, délicat, conserve une certaine réserve. On y distingue peu à peu de jolis arômes de fruits rouges, gourmands d’ailleurs (cerise griotte, groseille), accompagnés d’un bouquet floral qui confère de l’élégance à l’ensemble. Puis c’est un beau jus parfaitement mûr qui se déploie en bouche. Les tannins sont serrés, maîtrisés, la trame soyeuse. L’ensemble s’achève sur une finale précise. La longueur en bouche, superbe, et le bel équilibre de ce 2017 permettent de présagent d’un bel avenir pour ce remarquable représentant de l’appellation Pessac-Léognan. » En bouteille, on retrouve son caractère floral délicat, associé à un fruit toujours éclatant, gourmand. L’attaque est caressante, la trame serrée et le grain particulièrement fin, le vin se montre encore un peu sur la réserve, associant beaucoup de douceur et une jolie acidité. Finale tout en fraîcheur, délicate.

Son étoffe : une délicate soie sauvage

A l’issue de ce passionnant exercice, le style des vins de Château Haut-Bailly se détache : élégant, précis, vibrant et délicat. Véronique Sanders s’émerveille et s’efface devant la qualité du terroir qui, millésime après millésime, se laisse découvrir et décrypter. C’est pourtant elle qui, avec son équipe, travaille avec ardeur et passion, dans l’ombre de ce terroir magnifique, pour insuffler aux vins de Haut-Bailly ce supplément d’élégance et de douceur qui les rend si uniques.

Dans la lignée de l’exercice auquel Véronique Sanders s’astreint chaque année pour qualifier un millésime, osons à notre tour résumer l’esprit de Haut-Bailly : la quête de la pureté.

Cet article a 2 commentaires

  1. Jean

    Joli compte-rendu ! Et s’il ne fallait en avoir qu’un : 2009, 2010 ou 2016 ?

    1. iDealwine

      Pourquoi choisir 🙂 ?

Répondre à iDealwine Annuler la réponse