Un auxey-duresses blanc au profil droit et minéral : c’est la cuvée signature d’Agnès Paquet. Loin de la rondeur murisaltienne que l’on retrouve souvent sur cette appellation de Côte de Beaune, Agnès a choisi le chemin de la finesse empyreumatique et de la fraîcheur comme fil conducteur de l’ensemble de ses cuvées. Nous avons souhaité mettre en lumière ce domaine au cœur de la Bourgogne, que cette talentueuse vigneronne conduit depuis 20 ans, bien loin de la carrière commerciale à laquelle elle se destinait.
Les parcelles du domaine d’Agnès Paquet en appellation Auxey-Duresses dans le village de Melin appartenaient à sa famille depuis les années 50. Celle-ci les louait à des vignerons locaux. Toutefois en 2001, ses parents font le choix de céder ce terrain au plus offrant. Voir ce patrimoine viticole s’envoler et la tradition familiale se perdre ont été les éléments déterminants dans sa décision de reprendre ces terres et d’en faire son propre vin. Rare femme dans un monde très masculin, Agnès quitte ses projets pour revenir en Bourgogne et se lancer le défi de constituer son propre domaine. Enceinte, néophyte et âgée de 27 ans : chez iDealwine, nous sommes impressionnés par l’énergie et la détermination de cette vigneronne. Sa vocation était née : tirer le vin de son terroir et le faire découvrir autour de soi.
Millésime après millésime à l’écoute de son terroir
Ce n’est pas sur les bancs de l’école qu’Agnès apprend la viticulture et la vinification. Malgré l’appui de quelques manuels, elle considère que sa personnalité créative et instinctive a pris le dessus dès les premières années dans son travail. C’est par l’effort et l’expérience qu’elle explique tirer tout son savoir-faire. Avec le temps, ses cuvées ont gagné en précision pour arriver aujourd’hui à un style épuré à la verticalité affirmée.
Cette philosophie de l’instinct incite Agnès à privilégier un domaine à taille humaine qu’elle puisse parcourir et inspecter en une journée avec son équipe de 5 salariés. Ainsi, bien qu’elle ambitionne de pouvoir récupérer certaines parcelles dans une appellation voisine, cette bourguignonne se garde bien de faire grossir ses terres à plus de 10 hectares. Plutôt que de les voir s’étendre, elle cherche à choyer au mieux ce qu’elle s’est battue pour conserver. En plus de cette observation quotidienne, tous les 5 ans, les analyses des sols lui permettent d’affiner sa connaissance de son terroir et d’en tirer le meilleur lors des vinifications.
La minutie qu’Agnès Paquet s’impose par le soin prodigué à la vigne est à l’image de l’attention qu’elle porte au sol. En commençant à travailler ses vignes, alors qu’elle attendait sa fille, elle réalise combien il était contradictoire d’instiller dans la terre des produits dangereux pour sa propre santé, sur lesquels on voit explicitement une femme enceinte barrée. Comment prendre le risque de polluer les sols et les eaux, et indéniablement la nourriture que l’on ingère, si c’est pour nous contaminer nous-mêmes ensuite ? Ainsi, comme une évidence, elle s’est très vite tournée vers une conduite très respectueuse de l’environnement. C’est à partir de 2004 qu’elle supprime l’intégralité des traitements chimiques et conduit son domaine en agriculture biologique depuis. Ayant fait une demande de certification en 2019, le domaine a pu avec fierté revendiquer cette sensibilité environnementale dès le millésime 2021.
Des vins au style droit et épuré
Loin du style traditionnellement ample, rond et gras des blancs de Côte de Beaune, Agnès a choisi dès ses débuts de produire des cuvées à la trame plus verticale. Ce style provient d’une part des sols de son domaine, où la proportion de calcaire actif est supérieure à 50%, là où les sols bourguignons sont souvent plus argileux. D’autre part, le travail au chai est étudié pour sublimer cette prévalence calcaire. En effet, le domaine utilise des tonneaux de 228 à 500 litres, à la chauffe très longue, permettant de brûler les tanins du bois et de diminuer l’influence de l’élevage sur le vin. La proportion de fûts neufs sur chacune de ses cuvées ne dépasse pas les 15% : l’idée n’est absolument pas de marquer le vin.
Les premières vignes d’Agnès, en appellation Auxey-Duresses, s’étendent dans une combe fraîche protectrice du vent et exposée plein sud. Les chardonnay et pinot noir proviennent de sélections massales pour planter la vigne des parcelles venues enrichir le domaine. Les deux cuvées qu’elle tire de cette appellation, en rouge comme en blanc, sont les premières de son domaine et elle y est particulièrement attachée.
De son côté, le pommard du domaine provient d’une parcelle à la frontière de Volnay et au sol assez similaire. Son profil cède à la puissance contenue des pommards, la délicatesse du toucher de bouche de son voisin.
De sa parcelle de pinot noir d’Auxey-Duresses, Agnès Paquet tire un rouge au grain tannique adoucit, dont le fruit rouge et le parfum d’eucalyptus apportent une joyeuse vivacité. Les pinots noirs âgés de 70 ans et ceux plus jeunes sont vinifiés et élevés séparément avant mise en bouteille. Les grappes sont pigées au pied puis le moût est fermenté en cuve béton. Elevé par la suite 12 mois en fûts, le vin est enfin laissé 2 mois en cuves inox pour conserver toute sa délicatesse. Cette cuvée propose une interprétation fine du terroir d’Auxey-Duresses, où le cassis et les fraises des bois se marient à merveille avec la profondeur de notes plus musquées.
L’auxey-duresses blanc quant à lui, est issu de vigne de plus de 90 ans. Après avoir achevé sa fermentation malolactique en barrique, celui-ci est vieilli 12 mois en fûts anciens, sans bâtonnage. À l’image du rouge, il fait l’objet d’un transfert en cuve inox pendant 3 mois pour aiguiser l’éclat de sa fraîcheur. Au nez, il révèle un panier de fruits d’été mûrs et juteux que nous vous invitons à découvrir.
C’est d’ailleurs par la haute qualité de son auxey-duresses Les Hoz blanc que la bourguignonne a gagné le respect de ses pairs et s’est taillée une réputation chez les amateurs à la hauteur de son talent. D’ailleurs, cette renommée dépasse largement les frontières bourguignonnes puisque la fille de Xavier Braujou, père du domaine d’Elise dans l’Hérault, a fait ses armes chez elle à l’été 2021 pour apprendre le métier de vigneron.
L’élégance de la simplicité
Loin des cérémonies que précèdent parfois la dégustation de grands vins, notamment bourguignons, Agnès tient à la valeur de la convivialité. Pour elle, le vin est fait pour être bu et se faire plaisir avec ceux que l’on aime, en s’abandonnant à un plaisir simple et lumineux. Ses vins ne sont pas taillés pour la garde sur le temps long, et n’attendent qu’à être appréciés dans les 5 à 10 ans.
Dans cette perspective, elle nous invite à déguster la cuvée Ali Boitboit et les 40 buveurs. Ce vin est selon elle une belle entrée en matière pour comprendre l’âme de son domaine : il met à l’honneur un cépage parfois sous-estimé, l’aligoté. C’est un pétillant naturel dont on garderait volontiers toujours une bouteille au frais pour accueillir des invités à l’improviste. Sémillant et facile, il peut être dégusté en bonne compagnie à toute heure, et c’est là tout le bonheur qu’elle nous souhaite.
De même, Le Clou et la Plume, cuvée au nom poétique assemblant deux climats d’aligoté, est une création de 2019 visant à réhabiliter le cépage aligoté et le faire apprécier à sa juste valeur. Cette cuvée aux notes très printanières de jasmin et de fruits à chaire blanche sera ravir un palais en quête d’un plaisir instantané et authentique.
Découvrir les cuvées du domaine d’Agnès Paquet, c’est faire l’expérience d’une œuvre passionnée, sensible et exigeante. Au-delà du courage que nous saluons de s’être lancée dans une telle aventure, la qualité déjà très prometteuse de ses vins font aujourd’hui d’Agnès Paquet une vigneronne de haut vol et sans aucun doute une incontournable de demain.