interview BFM angélique de lencquesaing champagne investissement

A l’approche de la saison des fêtes, une boisson s’invite – en toute modération bien sûr – dans notre quotidien : il s’agit du champagne, bien sûr. Festif par essence, il occupe une place à part dans l’univers des vins effervescents. Une question se pose : le champagne se valorise-t-il avec le temps, a-t-il sa place dans une cave constituée dans un objectif patrimonial ? Angélique de Lencquesaing, récemment interrogée sur BFM par Lorraine Goumot dans l’émission « Tout pour investir », apporte quelques éléments de réponse.

Le champagne, synonyme de moments joyeux est-il vraiment à la fête dans la conjoncture actuelle ? 

Il est extrêmement délicat de donner une tendance, en ce moment même, car les fluctuations sont importantes, presque d’une semaine à l’autre. Cette volatilité est, d’une manière générale, une caractéristique du marché des grands crus dans son ensemble depuis la pandémie
Les ventes de Champagne ont connu des variations importantes ces dernières années. Après la période de la pandémie de COVID 19 qui avait vu les ventes s’écrouler, le rebond avait pris tout le monde de court, à commencer par les maisons de Champagne elles-mêmes. De fait, fin 2021, puis en 2022 la région avait renoué avec des niveaux de ventes records. Pas moins de 339 millions de cols sont ainsi sortis des caves, un montant qui frôle les chiffres les plus hauts, enregistrés en 2007. Et ce, pour un total qui a dépassé les 6 milliards d’euros. Un chiffre loin d’être symbolique, notamment en termes d’exportation. En 2023, la demande s’est calmée, le contraire eut été étonnant dans la conjoncture actuelle.

La région connait-elle une crise de sur-production ?

Non, nous en sommes loin, la Champagne occupe une position vraiment à part, elle dispose d’une marque « ombrelle » pour l’ensemble des producteurs, d’une puissance sans équivalent dans l’univers de la production de vin.

Toutefois, effectivement, d’une manière générale, les ventes ont reculé de 8,3% – selon les données disponibles à fin septembre 2023 – pour 195,6 millions de bouteilles expédiées. Et ce n’est sans doute pas le mois d’octobre, avec le déclenchement de la guerre entre Israël et le Hamas, qui a rétabli la situation.

Sur iDealwine, qui ne fait jamais rien comme tout le monde, les ventes de champagne affichent une progression de 10%, portée par la recherche de nouveautés et de signatures encore confidentielles et abordables.

Vous évoquiez l’export, le Champagne est essentiellement exporté ?

Le marché français, première zone d’expédition du Champagne, reste stratégique pour cette région viticole. En 2022, sur les 339 millions de bouteilles expédiées, la France en a absorbé 138 millions. Depuis le début de l’année 2023, l’Hexagone enregistre un repli un peu supérieur à la moyenne (-9%). L’export a considérablement progressé, sa part dans les ventes est passée de 45% il y a 10 ans à un peu près de 60% aujourd’hui. La Champagne exporte ses effervescents dans plus de 190 pays. Les Etats-Unis et la Grande Bretagne restent les premiers marchés à l’export.

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Ce repli concerne-t-il tous les segments du marché, de l’entrée de gamme aux plus grandes signatures ?

Aucun segment n’est complètement à l’abri d’une stabilisation de la demande. Même le groupe LVMH, propriétaire de marques iconiques comme Dom Pérignon, Krug, ou encore Ruinart, a annoncé une stabilisation de ses ventes au 3ème trimestre. Toutefois, il convient de nuancer ces résultats a priori décevants, car le marché secondaire est le théâtre de belles batailles d’enchères, avec à la clé des résultats records sur des cuvées d’exception. La demande reste soutenue pour les flacons rares, d’autant que l’inflation enregistrée sur la vente de flacons récents, issus des maisons, a pour effet de reporter certains achats sur le marché secondaire des enchères.

Flacons rares… vous voulez dire flacons millésimés ? Ou anciens ?

Sur le marché secondaire des ventes aux enchères, ce sont pour l’essentiel les champagnes millésimés qui se valorisent bien. Tout d’abord, ce sont les plus prestigieux. Les champagnes non millésimés résultent d’un assemblage de plusieurs récoltes, la réserve perpétuelle de la maison, ils se combinent pour créer une cuvée qui respecte le style de la maison. Dans les belles années, une maison peut décider d’isoler les raisins de sa récolte pour produire une cuvée millésimée. Non seulement elle est plus prestigieuse car issue d’une année remarquable, mais en plus elle va se conserver plus longtemps. Et, bien sûr, le millésime donne une indication de son ancienneté, contrairement à un Brut sans année dont on ne connait pas l’âge. Même si depuis plusieurs années, les maisons ajoutent sur la contre-étiquette des mentions permettant de connaître la date de dégorgement du champagne, et donc de sa production.

Quels sont les champagnes les plus chers du moment dans vos ventes aux enchères ?

Dans les palmarès des champagnes les plus chers, on retrouve deux types de champagne. Ceux produits par les grandes maisons, et là, nous pouvons citer le Champagne Krug, au sommet, avec la cuvée Clos du Mesnil, dont le millésime 1979 – le premier à avoir été produit – a été adjugé 4 132€ il y a quelques mois. Ou encore la cuvée Dom Pérignon 1976 dans une version P3 (Plénitude 3). Il s’agit d’un champagne vieillit longuement au sein des caves de la maison, sur ses lies. Il a été adjugé 3 968€ sur iDealwine. Nous enregistrons aussi de beaux résultats sur des cuvées telles que Cristal (de la maison Roederer) ou Comtes de Champagne de chez Taittinger, pour lesquelles les millésimes matures sont très prisés.

Et d’un autre côté, le marché valorise les champagnes dits « de vignerons », issus d’exploitations de tailles plus réduites, qui connaissent un succès foudroyant auprès des amateurs. A la maison Selosse, notamment, qui adopte une approche parcellaire de la vinification de ses champagnes (une approche par terroir, comme en Bourgogne), l’Extra-Brut 1er Cru Millésimé 2008 atteint 3 000€ aux enchères. Des noms comme Ulysse Collin, Raphaël Bérêche, Jérôme Savart ou encore Romain Hénin sont extrêmement recherchés par les amateurs pointus.

Le champagne, ça se conserve ?  

La preuve… oui, avec l’âge, les champagnes évoluent, perdent une partie de leur effervescence, et se muent en de très grands vins blancs. C’est le cas de ce Clos du Mesnil de la maison Krug, le plus cher de l’année pour l’instant dans les enchères iDealwine. C’est aussi le cas du champagne Bollinger. La Grande Année 2002, que j’ai récemment eu l’occasion de dégustation, offre une bulle délicate, déjà bien fondue, qui dévoile une texture enveloppante, intense, absolument magnifique. Surtout ne jetez pas vos champagnes anciens ! Certains ont pris de la valeur, à condition d’avoir été bien conservés. Le niveau du vin dans la bouteille en fournira une excellente indication (petite astuce : pour mesurer si la bouteille est encore remplie, retournez-là délicatement). Et, bien sûr, n’hésitez pas à demander une estimation à iDealwine…. Le champagne a donc toute sa place dans une cave patrimoniale, à condition, comme pour tous les vins, de se montrer sélectif, de privilégier les cuvées millésimées, et de les conserver dans de bonnes conditions.

Voir l’interview d’Angélique de Lencquesaing sur BFM

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