degorgement bollinger

Le champagne n’est pas un vin comme les autres. Déjà il pétille ; ensuite c’est un blanc souvent produit à partir de raisins noirs ; enfin sa vinification comprend des étapes mystérieuses comme le dosage ou le dégorgement. Justement, à propos de ce dernier, une (petite) polémique agite la Champagne…

C’est le chef de cave de Ruinart, Frédéric Panaiotis, qui a jeté le pavé dans la barrique en déclarant, dans la revue britannique Decanter, qu’il n’était pas favorable à l’inscription de la date de dégorgement sur les étiquettes de champagnes non millésimés.

Pour mieux comprendre les enjeux de cette polémique, commençons par un petit rappel. Dans le processus de champagnisation, on ajoute au vin “tranquille” un mélange de sucre et de levures qui va provoquer une seconde fermentation en bouteille (d’où les bulles…). On laisse ensuite le vin se reposer plus ou moins longtemps (de quelques mois à quelques années) et le dépôt des levures mortes se concentre dans le goulot des bouteilles progressivement inclinées en fin de parcours. Le dégorgement consiste à éliminer ce dépôt (en général par une congélation du goulot qui permet ensuite d ‘éliminer facilement le petit “glaçon” ainsi formé.

Sur un champagne millésimé, la date de dégorgement (indiquée généralement sur la contre étiquette) est une information essentielle pour le consommateur car elle indique le temps que le vin a passé à vieillir sur lattes, c’est à dire le temps écoulé entre le début et la fin du processus de champagnisation : en gros, un millésime 2004 qui a été dégorgé en octobre 2013 aura un peu plus de 8 ans de vieillissement sur lattes (de juin 2005 à octobre 2013), ce qui, normalement, lui assure plus de complexité et d’évolution aromatique qu’un millésime 2004 qui aurait été dégorgé en 2008.

Un champagne non millésimé est produit sur la base du dernier millésime disponible (au minimum 15 mois de décalage, c’est à dire que pour un champagne dégorgé en septembre 2014, ce serait un millésime 2012) avec un assemblage de différents millésimes afin de garder un équilibre et un goût le plus constant possible année après année. Du coup l’information de la date de dégorgement peut paraître moins importante, comme le revendique Frédéric Panaiotis. En effet, dans ce cas, le consommateur achète surtout une marque et un style d’assemblage qui lui plaît, sans se soucier le moins du monde du processus d’élaboration du champagne qu’il vient d’acquérir…

Néanmoins l’information de la date de dégorgement  peut avoir un intérêt, même pour les champagnes non millésimés. Elle indique quand même une idée de la fraîcheur du vin. Plus la date est proche, plus le vin est frais, sur des arômes de jeunesse, et ce quelle que soit la date exacte du millésime qui a servi de base.

Accessoirement, elle permet aussi de mieux gérer nos champagnes en cave. Quand on achète tous les ans le même champagne, si on n’est pas rigoureux dans son rangement, seule la date de dégorgement permettra de savoir lequel est lequel.

Enfin, pour un amateur un peu averti, deux champagnes théoriquement identiques, dégorgés à six mois d’écart peuvent se révéler assez différents. Le vin aura passé six mois de plus en élevage, ce qui n’est pas négligeable, ou on aura même changé de millésime de base entre les deux dates !

Les grandes maisons ont facilement tendance à nier l’importance de ces précisions : « Quand nous mettons nos cuvées sur le marché, cela signifie qu’elles rencontrent nos standards de qualité et que, dès lors, elles sont prêtes à être consommées. Aussi, nous ne voyons pas l’intérêt d’indiquer la date de dégorgement », disait récemment un représentant de la maison Billecart-Salmon.

Mais certains critiques comme Antonio Galloni (qui a longtemps assuré la critique des champagnes pour Robert Parker), ont laissé entendre qu’ils n’allaient plus commenter les champagnes non millésimés quand la date de dégorgement n’est pas indiquée. Antonio Galloni justifie cette exigence : « Quand je donne une note à un champagne non millésimé, je veux être sûr que mes lecteurs achèteront le même vin. Sans la mention d’un millésime sur la bouteille, c’est la seule façon pour le consommateur de savoir si ce qu’il achète correspond à ce qu’il a lu. »

Cette petite polémique, certainement loin d’être close, ne fait que diversifier l’éternel débat qui divise la région : le champagne doit-il être un vin de marque avec un style et un équilibre immuable, comme on pourrait le dire d’un whisky ou d’autres boissons moins nobles. Ou bien peut-il être, à l’image de toutes les grandes bouteilles, un vin qui reflète un terroir et un millésime ? L’évolution récente de la Champagne semble montrer que l’influence des partisans de l’option “terroir et millésimes” semble progresser, avec le succès croissant de nombreux vignerons indépendants qui cherchent à produire avant tout des champagnes de caractère.

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