C’est dans un décor espagnol qu’iDealwine vous emmène à la rencontre du domaine de Cantalapiedra Viticultores. Menée par des mains passionnées, cette aventure familiale nourrit l’ambition de proposer des vins sincères, plus respectueux de la nature et de celui qui en savourera les arômes. Une vision que tous les producteurs du terroir ne partagent pas, poussant la famille à renoncer à l’appellation régionale pour s’affranchir d’une structure trop rigide à leurs yeux. Une belle histoire d’amour et de liberté sur le sol chaud du pays de Cervantès.
L’Espagne : un vignoble spacieux mais…
Grande nation de vin, il est toujours bon de rappeler que l’Espagne possède le plus vaste vignoble du monde, avec presque un million d’hectares cultivés*, plaçant le pays de la péninsule ibérique juste devant la France (800 000 hectares) et la Chine (780 000 hectares). Un titre qu’elle doit en grande partie à la région de Castille-La-Manche. Forte de ses 500 000 hectares cultivés, elle est la plus grande région viticole du monde, mais s’est pourtant souvent vue décriée dans son histoire pour son importante production de vin de qualité médiocre.
*Source : statista, chiffres pour 2021
Dirigeons-nous un peu plus au nord du pays, dans une région située entre Madrid et Bilbao et dont le cœur névralgique se concentre autour de la ville médiévale de Valladolid : Castilla y León. Au sein de ce territoire, le plus vaste d’Espagne, se trame certaines des plus belles impulsions vinicoles. Plus précisément, les collines de Rueda ont attiré de nombreuses attentions, pour se voir attribuer en 1980 une appellation d’origine contrôlée (DO selon le système espagnol). Dans ce paysage aux reliefs doux, le climat est continental et le sol riche : cailloux, argile, sable et calcaire se partagent la composition des sols, et sont recouverts d’un large manteau de galets, spécificité propre à ce terroir.
Cet ensemble naturel propice à la viticulture a fait naître des vins blancs figurant parmi les plus distinctifs d’Espagne, principalement composés de verdejo. Ce cépage s’est naturellement imposé dans la région grâce à son immense capacité à transmettre la minéralité des sols de Rueda, à condition d’y apporter une vinification précise et soigneuse. Or, succès peut bien vite rimer avec rentabilité, et nombreux sont les producteurs qui ont choisi de sacrifier la superbe de ces vins pour répondre à une demande forte, industrielle et formatée. Entre alors en scène la famille Cantalapiedra.
Une famille d’irréductibles vignerons
Comme d’autres producteurs de la région, les membres de la famille Cantalapiedra, craintifs de voir leur terroir assigné au rang d’usine à vin de qualité minime, se sont donné pour mission de produire des vins rendant tous les honneurs au verdejo authentique, quitte à se délier de l’appellation Rueda.
L’histoire du domaine Cantalapiedra Viticultores remonte à plus de cent ans, où plusieurs générations de vignerons se sont succédé dans les vignes, plantées aux alentours du village de La Seca. Ce petit hameau – ici, à peine plus de 1 000 âmes combattent vaillamment la poussière envahissante – est aujourd’hui considéré comme le cœur de la D.O. Rueda. Les traces du travail des ancêtres de la famille sont plus anciennes, mais la première pierre du domaine actuel est posée en 1949, lorsque Heliodoro Cantalapiedra plante sa première vigne à l’âge de… 15 ans seulement. Aidé par son fils Isaac, ils établissent une propriété plus importante de 20 hectares, et vendent l’ensemble des raisins cueillis à des producteurs locaux. C’est Manuel, incarnant la troisième génération, qui apporte l’envol définitif du domaine. Il organise la création de la cave personnelle de la propriété, et le premier millésime du domaine est embouteillé en 2014. Dès ce premier essai, le vin se démarque de ses contemporains par une qualité de fruit irréprochable et une approche de la vinification restée fidèle à la tradition régionale.
Tradition et bio orchestrés d’une main de maître
L’influence de Manuel ne s’arrête pas là. Loin d’être satisfait de l’état actuel de la production dans la région, il entreprend un travail colossal de conversion des vignes en agriculture biologique, et applique avec rigueur les préceptes de la biodynamie dans son art. La notion d’art est par ailleurs indissociable de Manuel puisque le vigneron laisse de côté une carrière de pianiste professionnel pour faire de la vigne son nouvel instrument. Se concentrant sur une approche parcellaire, peu interventionniste, et inspiré par le potentiel fantastique de son terroir et du verdejo, ses vins chantent l’amour porté à ses terres et à l’héritage unique de Rueda. Il étend en parallèle sa vision et livre des expressions naturelles et personnelles de cépages diverses, comme le grenache (avec sa cuvée Las Cuestas) ou le tempranillo (cuvée Arenisca Paraje Los Pilones), cultivés aux alentours de La Seca.
Les vieilles parcelles du domaine sont aujourd’hui minutieusement travaillées, en bio et sans irrigation, permettant aux baies d’être récoltées plus tardivement que la plupart des parcelles voisines, tout en gardant l’acidité vibrante que le fruit capte des sols. En cave, très peu d’actions sont engagées : seules les levures indigènes enclenchent les fermentations et une dose minime de souffre est ajoutée aux jus. Les cuvées du domaine, désormais nombreuses et variées, livrent de sublimes saveurs, et montrent que, peu importe l’approbation de telle ou telle appellation, c’est le profond respect pour la terre et la vigne qui fait du vin fini un produit mémorable.