Fin septembre, sur un balcon parisien, Véronique Sanders et Angélique de Lencquesaing enregistrent un épisode de podcast pour notre chaîne Grappologie. L’occasion d’échanger sur l’histoire du Château Haut-Bailly, les vins, la passion que porte Véronique à son métier et les hommes qui ont partagé son ambition. Extrait.

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Un patrimoine unique

Bonjour Véronique Sanders, c’est un grand plaisir de t’accueillir pour discuter avec toi de ton chemin à travers l’histoire du Château Haut-Bailly et le lien entre ta famille et cette propriété absolument magnifique. Propriété que j’ai eu la chance de bien connaître grâce à toi qui m’a accueillie à Bordeaux dès les débuts d’iDealwine. Haut-Bailly, c’est un vin élégant et qui se révèle d’abord dans la discrétion. Et ce point m’est particulièrement apparu lors d’une très belle dégustation que tu avais organisée pour célébrer les 20 années durant lesquelles la famille Wilmers a été propriétaire du Château Haut-Bailly. J’aimerais bien que nous commencions par te connaître un peu plus, pourrais-tu te présenter ?

J’ai la chance et le privilège de m’occuper d’Haut-Bailly depuis 1998, j’étais arrivée en tant que stagiaire en 1997, un an avant que ma famille ne vende Haut-Bailly à Bob Wilmers et j’avais commencé par un autre parcours parce qu’à l’époque il y avait très peu de femmes dans le monde du vin et je n’étais pas forcément destinée à ça. Mais l’appel du terroir, de cet endroit magique, et puis j’avais toujours eu un coup de cœur très fort pour cette propriété, a été plus fort. Et j’ai rencontré Bob Wilmers au moment où mon grand-père lui passait les rênes et cet homme extraordinaire a eu l’audace de me faire confiance et ça fait maintenant 28 ans que je m’occupe de cette maison.

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Venons-en à Haut-Bailly, tu as très joliment évoqué ton lien affectif avec la propriété, qu’est-ce qui fait la singularité des vins d’Haut-Bailly ?

Haut-Bailly, c’est avant tout un terroir exceptionnel. Un terroir c’est une composante de trois choses, c’est une topographie et on est sur le point culminant de l’appellation avec 20 mètres de dénivelé entre la parcelle la plus haute et la plus basse. C’est un micro-climat qui est spécifique à Haut-Bailly, le micro-climat de Bordeaux est connu. On a des températures en principe modérées, il n’y a rien d’excessif chez nous même si c’est un peu en train de changer. Et puis il y a un sol et un sous-sol très particulier. Le sol est fait de graves. J’aime bien rappeler que nous sommes la seule région viticole qui porte le nom de son sol. Et puis il y a un sous-sol avec une particularité pour notre appellation c’est qu’il y a une grande partie de la propriété qui a beaucoup d’argile. Ce qui nous permet d’assez bien réagir en cas de grande sécheresse.

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Des millésimes exceptionnels

Véronique, tu nous as fait l’amitié d’apporter aujourd’hui un magnifique millésime de la propriété, le 2015 avec ce prisme que vous avez à la propriété de définir chaque millésime avec un mot, une petite expression. 2015 c’est magnifique puisque c’était le mot « Plénitude » donc là tout était parfait. (…)

C’est une année quand je la revois avec un peu de recul assez émouvante parce que je pense que c’est probablement l’avant dernière ou bien la dernière année qui a été faite avec cette définition, « un grand millésime est un millésime facile ». Depuis 2017-2018 on fait des très grands millésimes mais c’est beaucoup plus compliqué, beaucoup plus extrême. On est secoué par le climat tout le temps. On fait de très beaux vins mais pas dans les mêmes conditions. Tandis que là en 2015 ça a été du pur bonheur, depuis les premiers jours du printemps jusque même après les vendanges. Je me souviens très fortement d’apprécier visuellement la beauté de la vigne cette année-là. Ça respirait le grand millésime, les grappes étaient magnifiques, le feuillage était magnifique, tout était beau et tout était facile. C’était vraiment une année de pur bonheur.

Et 2016 ?

2016 pareil, c’était vraiment la dernière paire qu’on a faite et je pense que si à l’époque on avait su que ça serait nos deux derniers grands millésimes faits dans des conditions aussi tranquilles on ne l’aurait pas cru à l’époque. Mais depuis on fait aussi des vins magnifiques, mais c’est un autre sport…

Ce que j’avais remarqué lors de cette grande dégustation c’est que souvent les très belles années, les années iconiques de Haut-Bailly, au premier abord c’est très discret. Le vin ne se révèle pas tout de suite. Alors ça c’était déjà il y a quelques années, je ne sais pas aujourd’hui, comment ce 2015 a évolué.

2015, il appartient à cette définition que j’aime mettre en avant de temps en temps et je reprendrais volontiers l’expression d’un de nos amis Edouard Moueix, à Pomerol, qui dit « DBY », « drink bordeaux young ». Et 2015, on a pu le boire jeune tout de suite, c’était du bonbon, c’était du bonheur. Et on a toujours pu déguster les 2015 avec une grande facilité et une grande précocité. Aujourd’hui il a 10 ans c’est une merveille, il en a encore pour facilement 50 ans. C’est la caractéristique de ces grands bordeaux. On peut les boire jeunes aujourd’hui mais ils vont avoir une capacité de vieillissement qui n’est absolument pas altérée par cette capacité à les boire un peu plus tôt que par le passé.

Une nouvelle page blanche à chaque millésime

J’évoquais ce caractère élégant des vins de Haut-Bailly et je me demandais : comment un vigneron imprime -t-il sa patte ? A quel moment cela se décide-t-il ?

Nous venons de parler de Denis Dubourdieu et je me souviens qu’une des premières fois que Denis est venu à Haut-Bailly, il m’avait demandé une verticale d’une quinzaine de millésimes pour mieux comprendre le terroir, mieux comprendre Haut-Bailly avant de s’engager. Et on lui avait demandé, « Denis qu’est-ce que vous aimeriez faire à Haut-Bailly ? » Sous-entendu quel style de vins, sachant que ce n’est pas lui qui fait le vin mais quel apport il aurait voulu avoir. Il avait eu cette réponse extraordinaire : « A Haut-Bailly, on fera du Haut-Bailly. » Et j’avais trouvé ça tellement fort, parce que c’était aussi l’époque où il y avait beaucoup de personnes qui marquaient fortement les vins. C’est ce à quoi on s’attache tous les jours de faire du Haut-Bailly à Haut-Bailly. Haut-Bailly c’est toute une équipe absolument formidable qui est très dédiée, dévouée. On a la chance incroyable d’avoir des amoureux de la propriété. Je parlais de ma passion pour la propriété mais cette passion je la partage avec beaucoup de membres de mon équipe. Certains sont là depuis peut-être seulement 2, 3, 5 ans mais ils vibrent déjà Haut-Bailly et certains sont là depuis 20, 25, 30 ans et ils comprennent intimement Haut-Bailly. Dans chaque parcelle, ils savent comment il va falloir la tailler, comment il va falloir s’en occuper, quels travaux sur les sols sont à prévoir. Haut-Bailly, il n’y a pas de recette de cuisine qui soit adaptée chaque année. On va avoir comme une feuille blanche et on va commencer chaque millésime en se disant, « on ne sait rien, apprenons ». Et on recommence chaque année à zéro en faisant abstraction de tout ce que l’on sait pour pouvoir s’adapter le mieux possible aux conditions climatiques du millésime. Et puis après pour pouvoir adapter ce que la nature nous aura donné comme grappes de raisins en vinification. Donc notre recette c’est peut-être de ne pas avoir de recette et de commencer une page blanche chaque année…

A l’occasion de la vente aux enchères exceptionnelle en direct de la propriété en ligne jusqu’au 4 décembre, consultez le catalogue de la vente.

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Vente exceptionnelle, Une collection de légendes – Château Haut-Bailly

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