Méo-camuzet

A l’occasion de la vente événement en provenance directe du domaine Méo-Camuzet, Sébastien vous raconte son expérience dans ce domaine bourguignon mythique.

Après un master spécialisé en Management des Vins et Spiritueux à Kedge Bordeaux et des cours de viti-vini culture à l’Institut de la Science de la Vigne et du Vin, j’ai vite compris qu’un passage par la production était inévitable afin de mieux appréhender ma passion et le produit qui me fait tant vibrer. Je suis donc allé apprendre à tailler au château de Montfaucon dans le Rhône méridional, j’ai ensuite effectué les travaux en vert au Chemin des Rêves, sur le Pic-Saint-Loup. Après cet apprentissage du travail de la vigne, j’ai recherché un domaine où je pourrais m’initier au travail de la cave, et j’ai eu la chance de pouvoir intégrer l’équipe du domaine Méo-Camuzet pour les vinifications 2021. Voici le récit de mon expérience riche au cœur de ce grand domaine bourguignon.

Le domaine Méo-Camuzet perpétue la culture de la vigne depuis quatre siècles. Aujourd’hui c’est Jean-Nicolas Méo qui est à la tête de la propriété après que son père lui ai proposé de reprendre l’exploitation. Ayant entamé des études de commerce à Paris, il étudie l’œnologie à l’Université de Bourgogne puis en Pennsylvanie avant de revenir à Vosne-Romanée en 1989. Son père, Jean Méo, engage Henri Jayer qui transmet son savoir-faire à Jean-Nicolas à partir de 1989. Riche de l’apprentissage de son mentor, Jean-Nicolas continue de vinifier dans la même fibre tout en ayant affiné au fil des années son propre style.

Le mois précédent la vendange et le travail à la vigne :

Je suis arrivé au domaine le 20 août 2021, nous avons dès lors commencé les travaux de pré-vendanges, à savoir les vendanges en vert.

Les vendanges en vert sont une opération qui consiste certaines années à couper des grappes en retard de maturité afin de favoriser la concentration de l’eau et des minéraux dans les grappes qui ont le plus de chance d’arriver à une maturité optimale. Cela limite les rendements et permet une meilleure concentration en arôme et en sucre dans les baies des grappes conservées. Cette opération est également salvatrice lorsque les grappes sont trop collées les unes aux autres, cela permet d’aérer les pieds de vignes, d’avoir une meilleure circulation de l’air et donc de diminuer les chances d’apparition de maladies cryptogamiques ou de pourriture grise.

Ce travail est réalisé uniquement par certains domaines ne souhaitant vinifier que des raisins à maturité optimale et dans un état sanitaire parfait. Les rendement chutent drastiquement mais la qualité des vins s’en fait largement ressentir.

La deuxième opération dans la vigne que nous pratiquions, en même temps que la vendange en vert, est l’effeuillage. L’effeuillage consiste comme son nom l’indique à retirer des feuilles du pied de vigne afin de maximiser l’ensoleillement des grappes et ainsi favoriser leur maturité. Les feuilles, bien qu’ayant un rôle essentiel pour la photosynthèse, puisent également l’eau et les minéraux dans les flux de sève pour se développer et privent ainsi d’une partie de ces ressources les grappes qui en ont besoin pour murir. Il est donc important de trouver un juste équilibre dans cette intervention.

Enfin, l’écimage et le rognage sont également pratiqués. Ces opérations consistent à cisailler la cime de la plante, l’extrémité haute de la vigne ainsi que les extrémités des rameaux poussant dans les rangs. Ainsi, la vigueur de la vigne se concentre dans le développement et la maturation des grappes et moins dans le développement de la matière végétale.

Les contrôles de maturité et la préparation de la cuverie :

Environ deux semaines avant la vendange, nous entamons également des prélèvement de baies dans les différents climats du domaine. Cette opération consiste à prélever des baies de différentes tailles sur des grappes exposés différemment et situées à divers endroits de la parcelle. L’idée est d’obtenir une moyenne de maturité représentative pour une parcelle. Une fois récoltées, les baies sont rapportées dans le laboratoire du domaine, comptées et pesées, elles sont ensuite pressées. Entre en jeu un drôle d’outil appelé le réfractomètre, on y dispose une goûte de jus obtenu lors du pressurage des baies afin de mesurer la concentration en sucre et ainsi connaitre le degré d’alcool potentiel du moût. Cette première indication est précieuse dans le choix de date de la vendange. Les échantillons sont ensuite envoyés pour des analyses plus poussées dans un laboratoire.

Méo-camuzet
Le réfractomètre en action

La date de début des vendanges se précise, l’ordre est établi, cette année ce sera le 21 septembre, soit un mois plus tard jour pour jour qu’en 2020. Deux millésimes radicalement différents, l’un généreux et solaire, l’autre peu abondant et frais.

La semaine précédant le début de vendange est destinée à la préparation de la cave, les différentes cuves sont mises en place, les tables de tris installées, les barriques sont poncées et nettoyées afin d’accueillir le nouveau vin en fin de cuvaison.

Les vendanges et les vinifications :

Le 21 au matin, branle-bas de combat dans la cour du domaine, l’équipe de vendangeurs est accueillie par la famille Méo, certains sont fidèles depuis près de vingt ans au domaine. Les rôles sont déterminés, la majorité sont des coupeurs, ils ont pour mission de couper le raisin et de le disposer dans des petites caisses, les plus vaillants sont porteurs, ils réceptionnent les caisses pleines des coupeurs et les rapportent vers les camions, chargés de rapatrier les raisins à la cave. Enfin, un troisième rôle est celui de trieur, au combien important, il consiste à trier les raisins sains des raisins abimés qui ne méritent pas de rentrer dans les cuves.

Méo-camuzet
La table de tri

Un homme renverse les caisses de raisins sur un grand tapis roulant, long d’environ 4 mètres, 5 à 6 trieurs sont disposés de part et d’autre pour isoler les raisins abimés ou touchés par la pourriture grise ou le mildiou qui pourrait altérer le goût du vin.

Jean-Nicolas supervise ce travail, accompagné de son fils Tristan et de David, un employé à plein temps du domaine, qui est le dernier rempart avant que les raisins au bout de la table de trie ne tombent dans la girafe qui mène à l’égrappoir. Un travail méticuleux, qui demande beaucoup de concentration, une étape cruciale dans la qualité finale du vin.

Le raisin, une fois égrappé, est encuvé par Roger et Gabriel qui, grâce à un Fenwick (charriot élévateur), font basculer le raisin dans les grandes cuves en inox ou béton.

Les cuves sont ensuite refroidies pour la phase de macération pré fermentaire grâce soit à leur capacité thermorégulante qui préserve la fraicheur via des tuyaux d’eau froide qui circulent autour de la cuve, soit des « drapeaux » insérés dans les cuves, au milieu du raisin pour les contenants en béton.

Préserver les cuves fraiches, entre 10 et 15 degrés a pour effet de retarder le début de la fermentation alcoolique et développer des arômes fins et élégants. La fraicheur de la cuve est également entretenue via des remontages biquotidiens (opération qui consiste à tirer le mout par le bas de la cuve via une pompe, le faire circuler dans un gros cube où le vin est refroidi puis d’asperger le chapeau par le dessus de la cuve ouverte).

Les vendanges se sont étalées sur une quinzaine de jours. Il faut dire que le domaine vinifie entre ses parcelles en propriété et les raisins qu’il achète sur pieds, une petite trentaine de climats chaque année.

L’équipe d’une quarantaine de vendangeurs sillonne environ 25 hectares sur cette période. La bonne ambiance est de rigueur avec un café croissant le matin avant de partir dans les vignes et un casse-croute à 10h30. Le déjeuner est également offert tous les jours et les vins du domaine sont servis par la famille Méo.

Au fur et à mesure que les cuves se remplissent le travail en cave s’intensifie, les premières cuves partent en fermentation spontanée (sous l’action des levures indigènes), commence alors un contrôle de température et une prise de densité deux fois par jour pour chaque cuve. Ces précieuses informations permettent à Jean-Nicolas de prendre des décisions sur les actions à entreprendre pour chaque cuve.

La dégustation des vins en cours de fermentation permet également d’orienter différents choix de vinification, l’envoi d’échantillons au laboratoire a lieu régulièrement pour contrôler divers points d’attention.

Une fois que les vins ont achevé leur fermentation alcoolique, ils sont refroidis pour une courte macération post-fermentaire à froid. S’en suivent les décuvages qui consistent à tirer le vin par le bas de la cuve pour le stocker dans une autre cuve. Le marc est ensuite évacué à l’aide d’une pelle dans le pressoir pneumatique qui va presser la partie solide du raisin (c’est le jus de presse) qui sera ensuite selon ses qualités, ajouté au vin dans différentes proportions. Après avoir reposé une nuit, les vins sont entonnés par gravitation dans les caves souterraines du domaine où une impressionnante quantité de fûts sont alignés et superposés au millimètre sous l’œil du méticuleux Roger. Cette dernière opération marque la fin des vinifications.

Une fois tous les vins entonnés, un grand nettoyage de la cave a lieu, les outils de vinifications sont rangés en attendant d’être ressortis l’année suivante et les ouillages des fûts entonnés commencent.

L’ouillage est une opération pratiquée tout au long de l’année et qui consiste à remplir les fûts à ras bord pour compenser l’évaporation du vin. Plusieurs fois par semaine pour les fûts neufs qui ont tendance à s’imbiber de manière plus importante que les fûts qui ont déjà servis à élever un ou deux vins.

Ainsi, ces quelques mois au domaine constituent une expérience particulièrement riche que je recommande à tous les amateurs de vins – l’opportunité de se rapprocher de la source d’une passion, de mieux l’appréhender et la comprendre. Je me souviens avec nostalgie des journées à rallonge au cœur des vendanges, de la fatigue physique et mentale que cela engendre, des apéritifs partagés avec l’équipe une fois le travail terminé. L’ambiance qui se dégage d’une cave pendant une vinification est dure à décrire, à imaginer, il faut vivre cette tension, cette excitation de tous les instants, composer avec la fatigue et déployer son énergie au service, à son échelle, de la création de grands vins.

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