Quintarelli

Père de l’Amarone et vigneron italien émérite, Giuseppe Quintarelli a laissé un héritage inestimable à sa famille qui dirige aujourd’hui le domaine à sa suite. Excellence, tradition, artisanat, patience et authenticité définissent le travail titanesque fourni par cette propriété qui ne produit que lorsque le millésime le permet. Extrêmement élégants, les vins sont dotés d’une grande douceur et d’une persistance aromatique merveilleuse. Nous avons pu nous entretenir par le passé avec son petit-fils Francesco Quintarelli, à qui nous avons ensuite rendu visite en novembre 2023.

Giuseppe Quintarelli iDealwine Italie
Notre visite au domaine Giuseppe Quintarelli en novembre 2023

Giuseppe Quintarelli  – ou Bepi comme on le surnomme en dialecte vénétien – est considéré comme le père de l’Amarone et l’un des plus grands vignerons italiens. Si l’homme est resté discret, il a tout de même laissé derrière lui un héritage considérable et a marqué toute une génération de vignerons italiens. Il est décédé en 2012, après une longue et sublime carrière de près de 60 ans, laissant le domaine à sa fille Fiorenza, son gendre Giampaolo, et ses petits-fils Francesco et Lorenzo. Le vignoble de 12 hectares se situe dans le village de Negrar, sur les collines au nord de Vérone au cœur du Valpolicella, à une altitude d’environ 500 mètres. La famille affiche la ferme intention que rien ne change dans la manière de produire les vins afin de respecter au mieux le style et la tradition de l’œuvre de Giuseppe. Pour l’anecdote, Giuseppe Quintarelli avait la réputation de ne pas apprécier du tout que l’on recrache son vin, politique qui perdure encore aujourd’hui au domaine… En dégustant une jolie gamme de nectars lors de notre passage en 2023, nous avons tout de même dû contourner cette règle !

Vins-Jura-acheter

L’Amarone – littéralement, ‘le Grand Amer’ – est en effet produit par une technique ancienne appelée appassimento, qui consiste à sécher les raisins pendant plusieurs mois jusqu’à ce qu’ils ressemblent à des raisins secs, avant qu’ils ne soient pressés. Cela donne des vins très concentrés en saveur, en sucres (qui manquent, c’est la raison pour laquelle les vignerons de cette région utilisent cette méthode) et un peu en alcool. Les ventes d’amarone ont surtout décollé à partir des années 1980-1990, la « Denominazione di Origine Controllata » (DOC) n’a d’ailleurs été reconnue qu’en 1990. En 2009, l’Amarone et le Recioto della Valpolicella (un vin plus sucré, produit selon les mêmes méthodes de production) ont été promus au statut de « Dénomination d’origine contrôlée et garantie » (DOCG). Chez Quintarelli, après l’appassimento, le vin est pressé puis vinifié à basse température, avant d’être élevé en barriques de chêne de Slavonie pendant de longues années, 8 ans pour l’amarone et même 10 ans pour l’amarone Riserva. Sur certains millésimes, lorsque la qualité est jugée insuffisante, le domaine ne produit pas du tout d’amarone. Le résultat est bluffant et l’amarone de Quintarelli émerveille par sa douceur, son élégance et sa longueur en bouche impressionnante.

Pouvez-vous raconter l’histoire du domaine ?

L’histoire débute au début du siècle dernier, lorsque Silvio Quintarelli cultivait des vignes en métayage à Figari, dans la commune de Marano di Valpolicella avec ses frères. Après la première guerre mondiale, la société déménage dans la vallée de Negrar et Silvio Quintarelli crée son propre domaine en 1924, avec l’aide de sa femme et ses fils. Puis, dans les années 1950, il passe le flambeau à son fils cadet, Giuseppe Quintarelli (né en 1927). D’emblée, Giuseppe travaille sans relâche pour améliorer la qualité des vins et le succès commence à pointer son nez autour des années 1960 et 1970.

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Comment l’arrivée de Giuseppe a fait évoluer le domaine ?

Les vins produits par mon arrière-grand-père étaient déjà de bonne qualité – explique Francesco -, mais c’est Giuseppe qui a vraiment fait avancer les choses au domaine. Il a augmenté la taille du vignoble et introduit d’autres cépages tels que la corvina, le nebbiolo, la croatina, le cabernet franc et le cabernet sauvignon, le sangiovese, la garganega, le trebbiano toscano, le sauvignon blanc, le chardonnay et le saorin. Le vigneron cultivait un profond respect pour la tradition et l’innovation, grâce à un travail constant qui permettait sans cesse d’améliorer les vins. Seuls les meilleurs raisins étaient utiliser pour produire les vins. Premier à croire au potentiel de ce terroir, Giuseppe a beaucoup œuvré pour le paysage viticole de la région, auparavant peu valorisé.

Lors de notre visite, nous avons pu voir dans la cave la plus vieille bouteille étiquetée du domaine, qui est millésimée 1961. Petit point sur les étiquettes, que vous reconnaitrez à coup sûr une fois que vous y aurez fait attention. Cette jolie police est l’écriture de la femme de Giuseppe, qui écrivait les étiquettes à la main pendant de longues années, avant que le domaine décide de numériser cette écriture. Un bel héritage également. 

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La bouteille de 1961

Il a donc inspiré tout une génération de vignerons dans la région…

Oui, et plusieurs sont passés par le domaine pour travailler et apprendre le métier de vigneron. Dans les années 80, Romano dal Forno venait très souvent discuter avec Giuseppe avant de créer son domaine. Tommaso Bussola a aussi fait ses classes ici. D’autres encore, mais je ne vais pas tous vous les citer ! 

Qui s’occupe du domaine maintenant ?

Après le décès de mon grand-père en 2012, sa fille Fiorenza, ma mère, a pris sa suite accompagnée de son mari. Et aujourd’hui nous sommes revenus avec mon frère Lorenzo. Il y a aussi une équipe de quatre employés qui travaille au domaine tout au long de l’année.

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Quelle est votre vision de la viticulture ?

Nous ne travaillons pas en bio ou en biodynamie, mais notre viticulture reste traditionnelle : nous répétons les gestes de nos ancêtres. Nous traitons les vignes uniquement quand cela est nécessaire, en cas de fortes pluies, par exemple. Nous n’utilisons jamais de désherbants, préférant travailler le sol. La viticulture n’a pas changé depuis des décennies ; nous privilégions toujours les produits les plus naturels.

Les rendements sont maintenus au minimum par une taille rigoureuse et des vendanges en vert. Les vendanges s’effectuent assez tard, à bonne maturité, ce qui requiert souvent trois passages dans les vignes, les vendanges peuvent durer aisément jusqu’en octobre ou novembre. Les raisins sont récoltés à la main, dans des petites caisses en bois. Dans beaucoup d’autres domaines, des caisses en plastique sont utilisées, qui sont peut-être plus faciles à laver et à ranger, mais nous trouvons que le bois absorbe l’humidité des grappes et conserve mieux les raisins sans qu’ils ne pourrissent.

Les grappes sont ensuite inspectées et retriées avant d’être séchées pendant six mois dans des chambres de séchage (pour l’amarone). Nous utilisons trois méthodes différentes pour sécher les grappes : traditionnellement, nous accrochons les raisins le long d’une ficelle, en grappe comme les oignons ; la 2ème méthode est le séchage dans les caisses de bois ; et la troisième sur des claies de bois. 

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Les trois méthodes de séchage des raisins

Là où les choses ont plus changé, c’est du côté du chai.

De quelle manière le chai a-t-il changé ?

Le chai a été modernisé pour améliorer la qualité des vins. Par exemple, nous avons introduit des pompes plus délicates qui permettent de transporter les raisins sans les abîmer.

Quel est le type de vin que vous cherchez à produire ? Quel est votre style ?

Nous cherchons avant tout l’élégance, avec des tannins pas trop forts. Nous privilégions l’acidité et la fraîcheur, pour produire des vins épurés et racés. Les vinifications sont donc assez délicates, avec des macérations à froid pas trop longues et des remontages manuels (pas de pigeages). Nous en réalisons plusieurs par mois à partir de mi-octobre et jusqu’à mars. 

L’élevage joue aussi son rôle, et nous favorisons donc des périodes de maturation très longues, avec six, sept ou huit ans en grands botti di rovere (fûts de chêne) pour 90% des vins. Nous achetons de nouveaux fûts au fur et à mesure, de tailles différentes, et utilisons environ 30% de chêne neuf dans nos élevages. Tout est ensuite assemblé en cuve inox avant la mise en bouteille. Le reste de la production, 10%, est élevé uniquement dans ces cuves en inox, et il s’agit plutôt des blancs qui passent six à sept mois dans ces contenants. Après la mise en bouteille, nous gardons les vins au moins trois ou quatre mois avant la commercialisation. 

A noter que le plus gros foudre que nous avons vu lors de notre passage en Italie, peut contenir jusqu’à 1200L de vin. Tous les foudres sont également de véritables œuvres d’art, sculptés de symboles viticoles, d’animaux bibliques, des armes de la famille ou du village ou encore des étapes de fabrication du vin. 

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Eloïse au milieu des foudres sculptés

Il est souvent dit que discrétion et tradition prévalent au domaine Quintarelli… Vous n’avez pas de site internet ni de réseaux sociaux, est-ce un choix personnel ou par hasard ?

Ça correspond au profil bas de mon grand-père Giuseppe. C’était un homme très discret et peu attaché à l’image, et il n’a donc jamais voulu faire de la « publicité » de cette façon. D’autre part, notre production est assez limitée – 60 000 bouteilles par an – et nous ne voulons pas agrandir le domaine, nous sommes arrivés à la taille parfaite pour nous.

Pour finir, quels sont vos conseils en ce qui concerne les accords mets-vins ?

Le structure du plat doit équilibrer la structure du vin. L’amarone requiert donc des plats consistants, de la viande rouge en sauce ou du gibier, par exemple i bigoli al sugo d’anatra – une spécialité de la région constituée de pâtes dans une ragû de canard – est un très bon accord. Pour les valpolicellas, un vin plus léger, des plats plus légers fonctionnent bien, des volailles ou encore une viande rouge pas trop lourde. Le recioto s’accorde surtout avec des desserts au chocolat, des tartes au fruit, ou encore des fromages à pâte molle.

Nous tenons à remercier Francesco Quintarelli pour le temps qu’il nous a accordé… et nous vous conseillons vivement de tester les vins du domaine Quintarelli, pour goûter à la tradition, la patience, la finesse ainsi que son style artisanal et authentique.

Tous les vins du domaine Giuseppe Quintarelli en vente sur iDealwine

Retour sur la dégustation à laquelle nous avons assistée dans la salle de dégustation restée dans son jus, comme Giuseppe l’aimait. On peut encore y apercevoir des bouteilles entourées de papier journal pour en protéger les étiquettes. 

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Amarone della Valpolicella Classico DOC (rouge) :

  • Lorsque le millésime est très bon, le domaine ne produit pas la cuvée Bepi mais bien cette grande cuvée d’amarone.
  • Le 2015 : Un nez infusé et profond. La bouche, puissante et intense, mérite encore de la patience pour être appréciée. La finale est très longue.

IGT Veneto Rosso Ca’Del Merlo (rouge) :

  • Un des plus grands vins d’Italie, réputé pour son élégance, sa richesse et son extrême complexité.

IGT Veneto Rosso del Bepi (rouge) :

  • Bepi, c’était le surnom de grand-père de Giuseppe. Parfois, ce dernier ne voulait pas produire un vin sous le nom d’amarone car le millésime n’était pas assez bien à son goût. Ainsi aujourd’hui encore, les amarones peuvent être « déclassés » dans cette cuvée réalisée comme sa grande sœur lorsque l’année n’est pas exceptionnelle.
  • Le 2016 : Un nez gourmand de cacao mêlé à du poivron et à quelques notes légèrement animales. La bouche est complexe et épicée.

Recioto della Valpolicella Classico DOCG (rouge) :

  • Ce vin doux traditionnel de Valpolicella prend des accents d’élixir sous l’égide de la famille Quintarelli. 
  • Le 2011 : Un nez végétal et alcooleux, qui laisse place à une bouche soyeuse et empreinte de fruits secs.

Valpolicella Classico Superiore (rouge) :

  • Ce vin est issu à 50% de grappes fraîches et à 50% de grappes séchées pendant deux mois, et a été élevé pendant deux ans dans de vieux foudres et barriques.
  • Le 2016 : Un nez de poivron, assez végétal et poivré. La bouche est une bombe de puissance, également fraîche et complexe.

Veneto IGT Primofiore (rouge) :

  • Une belle introduction aux vins de ce domaine de référence. Une cuvée expressive, fruitée, florale et épicée, à la bouche structurée tout en demeurant équilibrée.

Alzero cabernet (rouge) :

  • Un passito à la bordelaise, issu des terres italiennes.
  • Le 2015 : Le nez très noble s’ouvre avec des notes de poivron et de fruits noirs. En bouche, la puissance est équilibrée par une belle acidité, c’est un nectar soyeux et énergique.

Amabile del Cerè IGT (blanc liquoreux) :

  • Figure mythique du vignoble vénitien, Quintarelli propose une spécialité locale d’une grande richesse et taillée pour la très longue garde.

IGT Veneto Bianco Secco (blanc) :

  • Un assemblage atypique de 5 cépages blancs que sont la garganega, le chardonnay, le saorin, le trebbiano et le sauvignon blanc.
  • Le 2022 : Très aromatique en bouche, un mélange de fruits exotiques et de fruits blancs. La bouche, salivante, est épicée et bien digeste.
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Cette publication a un commentaire

  1. Bigot

    J’ai bu de ce vin lors d’un déplacement en Italie,et j’ai vraiment apprécié ce nectar.Ou puis-je en trouver en région Rhône Alpes
    Merci

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