vinification vins blancs

La vinification des vins blancs est tout un art, elle nécessite beaucoup d’attention tout au long de son processus, du ramassage des raisins jusqu’à l’élevage. Nous vous aidons à y voir plus clair grâce à ce guide didactique. 

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Quelques rappels pour mémoire. Vous lisez régulièrement ou vous entendez lors de vos visites chez un vigneron des mots comme « levures », « chaptalisation », « soufre », « bâtonnage », « oxydation », « cuves inox », etc. Ces termes qui décrivent les étapes de la vinification donnent souvent des indications sur le style de vin que vous allez déguster, sa texture, son fruité, son goût, etc. Nous allons donc essayer de vous décrypter quelques unes de ces expressions, afin que vous compreniez mieux leur sens caché, tout spécialement aujourd’hui à propos des vins blancs. Rappelons aussi que tout débute avec des raisins et donc dans la vigne. Et que nous partirons d’une hypothèse : celle que les raisins de notre futur vin blanc sont de bonne qualité, car si l’on peut arriver à produire du mauvais vin avec de beaux raisins, il est impossible de vinifier un bon vin à partir de mauvais raisins !

Quelques principes généraux pour commencer. La plupart des vins blancs sont obtenus à partir de raisins blancs. Mais pas que… En effet, la très grande majorité des raisins à peau noire (ou plutôt rouge très foncé) ont, comme les raisins blancs, des jus blancs. Si l’on presse ces raisins noirs sans laisser les peaux macérer, on obtiendra des jus blancs ou à peine “tachés” comme on le dit en œnologie. Tout le monde connaît les champagnes produits à partir de pinot noir ou de pinot meunier dont la couleur est pourtant quasi la même que ceux issus de pur chardonnay et qu’on appelle d’ailleurs “blancs de blancs” pour bien désigner les raisins qui les ont produits.

La vinification des vins blancs est ensuite globalement plus technique que celles des vins rouges. Le plus délicat est la préservation du fruit, de la fraîcheur et de l’acidité, points clés d’appréciation de la plupart des vins blancs. Dès que le raisin est ramassé, le risque d’oxydation est par exemple très important et ses conséquences sont nettement plus perceptibles sur le goût du futur vin que dans le cas des vins rouges qui ont une marge de tolérance supérieure. Pour éviter ce risque, on préfère souvent vendanger les blancs en très légère sous maturité car une vendange très mûre fragilise la peau des raisins. C’est pour cela aussi que, dans les régions chaudes, on vendange parfois les blancs de nuit ou le plus tôt possible le matin. La question du transport des raisins de la vigne au pressoir est également primordiale : l’utilisation de petits contenants (caissettes) pour éviter que les raisins s’abîment et la durée de transport sont ici essentiels.

Presser sans se presser

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Le premier choix du vigneron est soit de presser immédiatement les raisins qui viennent d’arriver au chai soit de pratiquer une courte macération pelliculaire à froid. Dans ce cas, il va égrapper complètement sa vendange puis laisser les baies macérer à froid pendant 12 à 48 heures, les raisins foulés (légèrement écrasés) restant en contact avec les peaux afin d’extraire un maximum d’arômes. La macération pelliculaire donne ainsi aux blancs un caractère fruité et variétal plus prononcé et renforce l’apport aromatique. La durée de cette macération permet de jouer sur l’intensité de ce caractère fruité que le vigneron souhaite donner à son vin.
Le second moment clé est le pressurage. Et en particulier sa progressivité et la douceur (lenteur) avec laquelle il est pratiqué. Un pressurage trop “violent” risque de donner des goûts herbacés et surtout d’écraser les pépins, ce qui pourrait libérer des saveurs amères et végétales. On utilise surtout aujourd’hui des pressoirs horizontaux et de plus en plus des pressoirs pneumatiques (avec une membrane qui se gonfle pour écraser progressivement les raisins) qui permettent une meilleure répartition et surtout un dosage très précis de la pression. Mais quelques vignerons traditionnels aiment utiliser de vieux pressoirs verticaux dont ils pensent qu’ils sont plus précis (on en trouve encore beaucoup en Champagne).

Quelque soit le type de pressoir, le vigneron peut effectuer plusieurs pressions successives en augmentant la pression à chaque fois. Quelquefois on n’utilise que les premières pressions, les dernières presses, de moindre qualité, étant déclassées en vin de table ou n’étant ajoutées que très partiellement à l’assemblage final après avoir été vinifiées à part.

A ce stade, le jus pressé est un liquide de couleur beige/brun qui contient encore beaucoup de matières solides. Pour produire un bon vin blanc, la fermentation doit se dérouler avec des jus clairs. Le vigneron va alors procéder à ce qu’on appelle le “débourbage” qui consiste à éliminer toutes les particules en suspension. Cette opération se fait le plus souvent par gravité, en récupérant les bourbes au fond de la cuve ou parfois par centrifugation, méthode beaucoup plus violente et qui n’est utilisée que pour les vins de moindre qualité.

Quelles levures ?

On en arrive alors au stade de la fermentation alcoolique. Comme pour les vins rouges, cette fermentation peut se déclencher spontanément avec les levures dites “indigènes” qui se trouvaient naturellement sur la peau des raisins ou dans le chai. Sinon le vigneron peut choisir d’utiliser des levures “sélectionnées”, soit produites à partir de levures choisies une fois pour toute et reproduites en laboratoire, soit achetées dans des laboratoires. Lesquelles permettent parfois de jouer très artificiellement sur les arômes, renforçant le côté très “sauvignon” d’un sancerre ou exagérant les arômes beurrés d’un chardonnay. Mais là, on n’est plus dans l’univers des grands vins…

Le but est en tous cas d’obtenir un démarrage rapide et surtout contrôlé de la fermentation. Le levurage (avec des levures neutres si possible !) est souvent plus fréquent que dans la vinification des vins rouges. En effet, dans la vinification des vins blancs, les jus restent peu de temps en contact avec les peaux qui sont la principale source des levures indigènes.

La fermentation d’un vin blanc doit se dérouler à basse température (entre 18 et 20°) afin de préserver les arômes du fruit. Elle dure en général de 10 à 14 jours. A température plus basse (12-13 °), on constate une production accrue d’esters et d’arômes mais les vins sont plus légers, et moins riches en glycérol. On va donc choisir la température de fermentation en fonction du type de vin désiré. Bien entendu plus la température est basse et plus la fermentation sera longue. Cela peut prendre jusqu’à un mois surtout si l’on désire un vin blanc bien sec et que l’on doit attendre que tout le sucre résiduel soit transformé en alcool. Il est donc important de bien maîtriser les températures de fermentation. Pour cela, les cuves en inox sont par exemple refroidies par un ruissellement d’eau froide sur les parois. On peut refroidir aussi par passage dans un réfrigérant ou immersion d’un “drapeau” dans la cuve.

Malo ou pas malo ?

A la fin de la fermentation alcoolique le vigneron est souvent face à un nouveau choix : laisser faire ou empêcher une seconde fermentation appelée fermentation “malolactique”. Cette seconde fermentation, souvent très discrète, transforme l’acide malique contenu naturellement dans les raisins en acide lactique. L’acide lactique étant moins agressif, il est moins ressenti en bouche que l’acide malique. On devine que pour les “petits” vins blancs à boire sur leur fruit et leur fraîcheur, le vigneron aura tout intérêt à empêcher cette seconde fermentation. Même problème pour certains vins du sud dont l’acidité naturelle est souvent assez faible. Inversement le vigneron recherchant une certaine complexité, de gras et de rondeur dans son blanc aura tendance à laisser cette fermentation se faire ou à la faciliter. Schématiquement, pour bloquer toute possibilité de fermentation malolactique, la solution habituelle est d’ajouter une dose de soufre au moût à la fin de sa fermentation. Pour la faciliter on peut au contraire chauffer légèrement ce même moût (ou ajouter des bactéries sélectionnées, mais c’est moins naturel…). La plupart des domaines les plus qualitatifs laissent faire la nature. Certaines années la “malo” se fait, certaines années elle ne se fait pas et c’est très bien ainsi de laisser faire les éléments !

Ensuite, les vins sont soutirés (éventuellement légèrement filtrés) puis versés dans un nouveau contenant pour être élevés. Pour obtenir plus de gras, certains vins sont élevés sur lies et quelquefois on pratique même le bâtonnage pour remettre les lies en suspension, mais ce procédé, très à la mode à une époque, particulièrement en Côte d’Or, est aujourd’hui plus discuté. Comme les vins rouges, les vins blancs peuvent être élevés en cuves (en inox, en résine ou en béton) ou en contenants en bois voire en amphores.

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La question essentielle du soufre

Avant de clore la vinification des vins blancs, ajoutons un petit développement particulier consacré à l’usage du soufre dans le process. On l’a déjà dit, les vins blancs sont plus fragiles que les vins rouges, ils sont en particulier plus sensibles à l’oxydation et ce, dès les vendanges. Le soufre est l’arme numéro un du vigneron contre l’oxydation. C’est pourquoi il peut l’utiliser assez souvent au cours de la vinification de ses blancs en en ajoutant dès la vendange sur les raisins coupés en caisse, puis ensuite tout au long de la vinification, en particulier lors des différents soutirages (quand le moût passe d’un contenant à un autre), et ce jusqu’à la mise en bouteille. C’est pour cela qu’un même vigneron, quelque soit son style (très traditionnel ou se rapprochant d’un style nature) aura toujours tendance à mettre un peu plus de soufre dans ses vins blancs que dans ses vins rouges (dont les tannins jouent un rôle protecteur).

Le problème, c’est que le soufre, qui peut être le meilleur ami du vin pour le protéger, peut aussi être son plus grand ennemi ! Son usage un peu excessif a deux inconvénients majeurs : le premier c’est qu’à fortes doses il est mal toléré par l’organisme (cela va des maux de tête aux réactions allergiques) et le second c’est qu’il altère le goût du vin, surtout du vin blanc. Pas seulement en lui donnant un arôme allant de l’allumette en train de s’enflammer à des touches d’œuf pourri, mais surtout en “comprimant” les arômes, en étouffant leur fruité dans une sorte de carcan dont le vin ne se libère jamais vraiment même après une longue garde.

Pour le vigneron, tout est donc une question de doigté et surtout d’attention. En travaillant bien sa vigne pour obtenir des raisins sains à la vendange, en maintenant des rendements très raisonnables pour obtenir des jus bien concentrés, en soignant le tri des baies avant la vinification, en veillant à une hygiène irréprochable dans son chai, en manipulant le moins possible ses vins en cours de vinification (sur ce plan le bâtonnage n’est pas exemplaire…) et en ne bloquant pas une éventuelle fermentation malolactique, le soufre ne deviendra qu’une petite sécurité rassurante pour le vigneron (et le futur consommateur !). La réglementation autorise 200 mg/l de soufre total pour les vins blancs secs (150 mg/l pour les vins bio) ce qui est en réalité énorme. Un bon vigneron, dans les conditions détaillées ci-dessous, peut sans aucun risque passer largement sous la barre des 100 mg/l pour ses blancs, voire beaucoup moins (on trouve des blancs parfaitement stables avec 50 mg/l de soufre total). On parle bien entendu ici de “soufre total” c’est à dire la totalité de ce qui a été ajouté depuis la vendange jusqu’à la mise en bouteille. Le taux de soufre dit “libre” (ce qui reste dans la bouteille qu’on achète) est bien moins important car une bonne partie du soufre ajouté au cours de la vinification se combine chimiquement et disparaît donc en tant que tel. Néanmoins, plus il y a de soufre total dans un vin, plus il en reste de libre au bout de la chaîne…

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Cet article a 5 commentaires

  1. ob

    les vignerons de Vouvray qui ne font pas la malo dans une très grande majorité apprécieront de faire des PETITS vins
    d’autres part ce sont des bactéries et non des levures qu’on peut rajouter pour enclencher les malos

    1. Rédaction iDealwine

      Bonjour et merci pour votre message qui nous a permis de rectifier une petite erreur : on utilise effectivement des bactéries sélectionnées pour déclencher volontairement une fermentation malolactique et non des levures. Pour ce qui concerne les “petits” vins, je pense que vous avez lu un peu vite. Notre propos est simplement de dire que les blancs simples “de soif” doivent la plupart du temps rester vifs et frais et que le vigneron bloque dans ce cas la malo. Ce qui ne veut pas du tout dire à l’inverse que tous les vins qui ne font pas leur malo sont de “petits” vins ! Ni à Vouvray, ni ailleurs. Notre seule préférence est que cette “non malo” soit naturelle (c’est la nature et le millésime qui commande) plutôt que d’être bloquée artificiellement par une dose importante de soufre.

  2. Ju

    « Néanmoins, plus il y a de soufre total dans un vin, pus il en reste de libre au bout de la chaîne… »

    Non…
    La plupart du temps les vinificateurs souhaitent maintenir une teneur de SO2 actif (qui correspond à une fraction du SO2 libre). Si le vin est constitué de molécules très combinantes ou si l’on n’est pas assez vigilant sur l’exposition à l’oxygène du vin lors de l’élevage, il y a plus de soufre qui se combine. On en ajoute alors pour maintenir la dite teneur (souvent 30 mg/l se SO2 libre). Rare sont les vignerons qui se mettent volontairement à des teneurs très élevées lors de la mise en bouteille. La plupart se maintiennent aux alentours de 25 à 35 mg/l de SO2 libre (dont une partie est déjà consommé du fait de l’oxygène apporté lors de la mise en bouteille). Que le SO2 total soit de 100 ou 150 ça ne change pas grand chose puisque cette teneur ne nous intéresse absolument pas (SO2 combiné étant inactif dans le vin). Les sulfites ne sont pas ajoutés par plaisir.

  3. Poldi

    « Que le SO2 total soit de 100 ou 150 ça ne change pas grand chose ne nous intéresse absolument pas »
    Circulez, y’a rien à voir. Ce discours, je l’ai entendu ad nauseam, dans la bouche de viticulteurs, grands ou petits, à Vouvray ou ailleurs. Comme partout, c’est la flemme qui l’emporte.
    Je suis à la disposition de la RVF, pour lui faire un article expliquant pourquoi et comment on peut faire du vin blanc avec zéro débourbage, et zéro SO2 ajouté, à part le méchage de vieilles barriques. Par contre il faut beaucoup de H2O et d’huile de coude…

  4. Albane

    Article très intéressant !
    Merci beaucoup !

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