Primeurs 2012 à Bordeaux : premiers tarifs, premières interrogations sur les prix

Vignobles de BordeauxLa campagne Primeurs Bordeaux 2012 s’annonçait longue et délicate. Elle a pourtant connue une brusque accélération ces derniers jours avec la sortie de deux premiers crus classés, les châteaux Mouton Rothschild et Lafite Rothschild. Ces deux grands crus de Pauillac ont été commercialisés à des niveaux de prix en nette diminution par rapport au millésime 2011. Sont-ils pour autant attractifs ? Premiers éléments d’analyse.

La campagne primeurs réserve chaque année son lot de surprises. L’an dernier, le château Lafite avait pris tous les opérateurs de court en commercialisant son 2011 dès les premiers jours de la campagne. Cette année, avant même que les notes des principaux dégustateurs soient toutes publiées – et notamment celles, toujours très attendues, de Robert Parker -, c’est le château Mouton Rothschild qui a devancé tous les autres premiers crus classés en fixant son prix de vente à 278€ HT (moyenne observée chez les distributeurs français et anglais qui proposent ce vin aux particuliers). Soit un prix en baisse de plus de 30% par rapport au millésime 2011. Certes, le différentiel est important, ce qui, au passage, laisse augurer d’une réelle difficulté à vendre les stocks éventuellement encore disponibles des vins du millésime 2011. Mais quel est le « juste » point de référence à utiliser pour comparer les prix ? Lors de la campagne 2011 la plupart des châteaux s’étaient vus reprocher une baisse de prix insuffisante : d’une part, la conjoncture économique ne laissait pas entrevoir de reprise à court terme dans les pays occidentaux, et d’autre part, en Asie, les opérateurs affichaient la plus grande méfiance à l’égard du principe même de l’achat en primeur. 2009 et 2010 ne sont à l’évidence pas non plus des millésimes à prendre en comparaison, en raison de leur caractéristiques qualitatives exceptionnelles, qui ne saurait être mesurées aux difficultés climatiques enregistrées sur le millésime 2012. Donc, le point de référence le plus proche de nous est le millésime 2008. Une année marquée, sur le plan économique, par la grave crise financière qui a éclaté en septembre 2008, débouchant sur une phase de profonde récession économique.  Il est par ailleurs instructif de comparer les prix 2012 à ceux du millésime 2008 car la cote iDealwine des vins de ce millésime confirme que l’achat en primeur s’est révélé intéressant, sur le plan financier. Et c’est probablement le seul millésime de la décennie pour laquelle autant de vins ont enregistré des plus-values significatives sur une période de cinq ans. La cote iDealwine montre en effet de belles progressions de cours par rapport au tarif d’achat en primeur (celui-ci ayant été recalculé en TTC pour rendre la comparaison cohérente). Ainsi, il est intéressant de comparer les tarifs primeurs des Bordeaux 2012 à ceux de 2011, ce que les observateurs ne se privent pas de faire dès qu’un tarif primeur est annoncé, mais il n’est pas inutile de garder à l’esprit le prix des 2008.

Des écarts significatifs avec les tarifs primeurs 2008

Pour l’instant peu de vins sont d’ores et déjà disponibles à la vente en primeur. Nous avons relevé le prix d’une dizaine de grands crus de Bordeaux figurant parmi ceux que l’on retrouve régulièrement à la vente sur iDealwine, par la suite. Pour les deux premiers crus classés de Pauillac le différentiel entre le tarif primeur 2008 et le 2012 est très élevé : +69,51% pour Mouton Rothschild et + 58,26% pour Lafite. L’écart se creuse même encore plus sur Duhart Milon (+122%), le prix de ce vin ayant, dans le sillage de Château Lafite, connu une hausse de prix foudroyante ces dernières années. Le Château Lynch Bages, en baisse de 13% sur le prix de l’année dernière, est quant à lui commercialisé en hausse de 86% par rapport à son tarif 2008. Pour l’instant, le seul vin qui affiche une baisse de prix par rapport au prix primeur du 2008 est le château Valandraud de Jean-Luc Thunevin, proposé à 90€ : son 2011 était proposé à 155€ et le 2008 à 100€. A noter également, la sagesse du prix de Château Lafaurie Peyraguey, en hausse de 12% seulement sur le tarif 2008. Les difficultés auxquelles doivent faire face les producteurs de Sauternes cette année n’y sont sans doute pas étrangères.

Pour l’instant, l’appel à la modération de prix lancé par Robert Parker, et aussi par La Revue du vin de France, trouve un premier écho auprès des producteurs. De là à revenir à la sagesse des prix pratiqués en 2008, rares sont les domaines qui semblent en prendre le chemin, comme l’indiquent les premières sorties. Quant aux châteaux les plus en vue actuellement, rien ne les incite à  s’inscrire dans cette tendance non plus. Si l’on prend, par exemple, le château Angélus, il semblait hautement improbable que le prix de sortie de 2008 (70€HT pour le particulier) puisse constituer une référence pour ce premier cru de Saint-Emilion, récemment promu, alors que le 2011 avait été commercialisé près de 190€ ! Quant au Château Pavie, également promu lors de la révision du classement, son propriétaire a clairement laissé entendre au magazine Terre de vins que son prix de vente s’inscrirait à la hausse en 2012, sachant que le tarif 2011 s’élevait à 152€HT. [NDLR : la sortie de Château Angélus, le 25 avril, à 210€HT vient confirmer notre analyse et place ce domaine parmi les premiers à faire le choix d’une augmentation de prix par rapport au millésime 2011].

Alors, faut-il acheter, ou pas, des vins en primeur cette année ? L’analyse et le suivi des prix vont se révéler précieux. Sans oublier que la publication des notes Parker risque de rebattre sensiblement les cartes de cette campagne. Verdict dans quelques jours…

Vin

Tarif Primeur 2012
HT

Tarif Primeur 2011
HT

Tarif Primeur 2008
HT

Tarif Primeur 2008
TTC

Cote iDealwine (mill. 2008)

Château Mouton Rothschild

278 €

400 €

164 €

196 €

446 €

-30,50%

69,51%

Château Lafite Rothschild

383 €

490,00 €

242 €

289 €

732 €

-21,84%

58,26%

Château Lynch Bages

67 €

77 €

36 €

43 €

76 €

-12,99%

86,11%

Château Prieuré Lichine

27 €

32 €

22 €

26 €

ND

-15,63%

22,73%

Château Duhart Milon

60 €

69 €

27 €

32 €

76 €

-13,04%

122,22%

Alter Ego de Palmer

43 €

47 €

28 €

33 €

46 €

-8,51%

53,57%

Château l’Evangile

112 €

110 €

70 €

84 €

92 €

1,82%

60,00%

Château Gazin

44,90 €

49 €

34 €

41 €

53 €

-8,37%

32,06%

Château Valandraud

89,50 €

155 €

100 €

120 €

140 €

-42,26%

-10,50%

Château Monbousquet

28,75 €

30 €

27 €

32 €

ND

-4,17%

6,48%

Château Lafaurie Peyraguey

28 €

29 €

25 €

30 €

26 €

-3,45%

12,00%

Les % exprimés en rouge indiquent la variation entre le tarif 2012 et le tarif 2011

Les % exprimés en vert indiquent la variation entre le tarif 2012 et le tarif 2008

Les tarifs primeurs sont une moyenne des prix pratiqués par les distributeurs (prix pour les particuliers)

Source: bleguern.fr

La cote iDealwine exprime la moyenne des résultats d’enchères constatés dans les ventes françaises (frais de vente inclus)

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Cet article a 4 commentaires

  1. Buck Danny

    Merci pour cette analyse très pertinente !
    C’est au moins autant la crise en Europe qu’en 2009 (quand les primeurs 2008 sont sortis) et on voit bien que les prix sont bien plus élevés, les -30% par rapport à 2011 ne trompant personne.
    On a bien compris (pas tout le monde manifestement) que les Chinois, qui ont spéculé comme des fous sur 2009 et 2010, se sont bien calmés et qu’il y a de la marchandise en stock à foison. C’est vrai que sur 10 ou 15 ans, les grands millésimes ne sont pas un mauvais investissement, mais il y aura sans doute des déconvenues vu les niveaux de prix. Sans parler des vins mal transportés et mal stockés en Asie et qui reviendront en catimini sur les linéaires, définitivement daubés par les coups de chaud qu’ils auront pris dans leurs containers.
    Bref, les éternelles folies du marché !
    Bien malin ceux qui ont rempli leurs caves de 2008 en attendant que tout cela se tasse…
    On guette maintenant le marché des vins bourguignons, eux aussi portés par le succès, et la rareté, avec un millésime 2011 moyen mais plus cher que 10 et 09…

  2. Buck Danny

    Merci pour cette analyse très pertinente !
    C’est au moins autant la crise en Europe qu’en 2009 (quand les primeurs 2008 sont sortis) et on voit bien que les prix sont bien plus élevés, les -30% par rapport à 2011 ne trompant personne.
    On a bien compris (pas tout le monde manifestement) que les Chinois, qui ont spéculé comme des fous sur 2009 et 2010, se sont bien calmés et qu’il y a de la marchandise en stock à foison. C’est vrai que sur 10 ou 15 ans, les grands millésimes ne sont pas un mauvais investissement, mais il y aura sans doute des déconvenues vu les niveaux de prix. Sans parler des vins mal transportés et mal stockés en Asie et qui reviendront en catimini sur les linéaires, définitivement daubés par les coups de chaud qu’ils auront pris dans leurs containers.
    Bref, les éternelles folies du marché !
    Bien malin ceux qui ont rempli leurs caves de 2008 en attendant que tout cela se tasse…
    On guette maintenant le marché des vins bourguignons, eux aussi portés par le succès, et la rareté, avec un millésime 2011 moyen mais plus cher que 10 et 09…

  3. Claude C

    L’achat des primeurs 2008 dépendait de l’intelligence des acheteurs, simplement. Il était judicieux de remplir sa cave de bons vins, tant la baisse des prix était significative. Depuis…….
    Par ailleurs croire que seuls les acheteurs chinois sont responsables de l’envol du prix des primeurs c’est simplement méconnaitre les grands acheteurs et spéculateurs du monde anglo saxon. En apparté , les grands vins 2009,2010 dorment tranquillement dans de grands chais bordelais et autres en attendant de repartir vers d’autres mains
    Il ya de grands vins partout en France, cessons de se focaliser sur les GCC de Bordeaux. Cette région recelle de nombreuses pépites a des prix tresr competitifs.

  4. Claude C

    L’achat des primeurs 2008 dépendait de l’intelligence des acheteurs, simplement. Il était judicieux de remplir sa cave de bons vins, tant la baisse des prix était significative. Depuis…….
    Par ailleurs croire que seuls les acheteurs chinois sont responsables de l’envol du prix des primeurs c’est simplement méconnaitre les grands acheteurs et spéculateurs du monde anglo saxon. En apparté , les grands vins 2009,2010 dorment tranquillement dans de grands chais bordelais et autres en attendant de repartir vers d’autres mains
    Il ya de grands vins partout en France, cessons de se focaliser sur les GCC de Bordeaux. Cette région recelle de nombreuses pépites a des prix tresr competitifs.

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