La nef du Petit Palais - Dégustation de Bordeaux 2010

Le lundi 29 octobre nous étions invités à, découvrir le millésime 2010 des grands crus de Bordeaux dans le cadre prestigieux du Petit Palais. Alors, 2010 est-il à la hauteur de son glorieux aîné, le 2009 ?

Après ce marathon annuel organisé par l’Union des Grands Crus, un verre dans la main gauche, le carnet de notes dans la main droite –  ce n’est pas toujours évident ! – il n’est finalement pas si facile de donner une impression d’ensemble sur ce fameux millésime 2010 qui a été annoncé, lors des dégustations des primeurs, comme très grand, voire meilleur et plus équilibré que 2009.

Honnêtement, après avoir goûté près de 70 châteaux sur la centaine présents ce jour-là, il est difficile de déclarer en toute bonne foi que nous avons été, à ce stade de l’évolution des vins, éblouis par ce millésime. Autant 2009 pouvait offrir un aspect rond et séducteur, autant 2010 se présente actuellement comme assez strict et serré, difficile à percer, même si on devine la plupart du temps de belles matières pleines et mûres derrière cette gangue boisée qui est trop souvent l’impression dominante. Probablement une simple phase ingrate, mais parmi tous ces grands crus, certains parviennent tout de même à présenter des vins possédant beaucoup de charme, de profondeur, de fruit mûr et finalement difficiles… à recracher !

Sur les différentes appellations présentées, la plus homogène qualitativement nous a semblé être Saint-Emilion dont les vins paraissent les plus accessibles aujourd’hui. On pourrait penser qu’il s’agit d’un “effet merlot”, mais quand on goûte les pomerols présents, d’un niveau clairement moins élevé qualitativement, cet argument fait un peu long feu… A notre sens, il y a globalement à Saint-Emilion des producteurs attentifs à leur travail dans les vignes et moins formatés dans leurs vinifications. Ceci expliquant sans doute cela…

La nef du Petit Palais - Dégustation de Bordeaux 2010

Dans cette dégustation fleuve, voici les vins qui nous ont le plus marqué (positivement !).

Graves et Pessac-Léognan (rouges) : Domaine de Chevalier (nez très mûr, fruits rouges, touches de mûre et de myrtille, bouche suave, ronde, tannins enrobés, longueur fruitée, finale dynamique), Haut-Bailly (nez plein, dense, profond, bouche élégante, racée, relativement plus extraite que d’habitude semble-t-il, finale fruitée), Malartic-Lagravière (nez très dense de fruits noirs, bouche magnifiquement fruitée, dynamique, fraiche, sensation de matière vivante, un côté délicieusement gourmand), Pape-Clément (très “boisé chic” au nez mais derrière le bois on sent une matière pleine et bien mûre, la bouche a des tannins très policés, le boisé est mieux intégré qu’au nez, c’est assez démonstratif mais bien fait), Smith-Haut-Lafitte (un vin net et droit, très pur, un tout petit peu austère en l’état, mais la belle matière dense sans excès garantit presque à coup sûr une belle évolution).

Dégustation de Bordeaux 2010 - Le stand Pessac-Léognan

Graves et Pessac-Léognan (blancs) : d’une manière générale ces blancs – qui ne sont tout de même pas donnés… – nous ont trop souvent semblés assez variétaux, sur des notes de sauvignon qui ne se cachent pas. Est-ce vraiment ce type d’arômes qu’on est en droit d’attendre de vins vendus trois ou quatre fois plus chers qu’un « simple » sancerre ? Dans cette production, à notre avis d’un niveau clairement inférieur à celui des rouges des mêmes châteaux, on peut distinguer quand même le Domaine de Chevalier (nez plein et mûr, bouche ample, joli gras sans excès, en retenue, finale très dynamique), Malartic-Lagravière (notes discrètes de sauvignon au nez, toucher de bouche délicat, matière mûre et équilibrée mais pas très complexe en l’état), Pape-Clément (un vin plus construit sur la puissance que la finesse, avec une grosse matière et un élevage très marqué qui évoque certains bourgognes blancs, un vin pour amateurs de sensations fortes…).

Dégustation de Bordeaux 2010 - Le stand Saint-Emilion

Saint-Emilion : Figeac (nez plutôt réservé, assez strict mais pas austère, bouche assez puissante, mais une puissance bien conduite, matière stricte qui n’est pas encore détendue, mais dans quelques années ce sera certainement très bon !), Clos Fourtet (très beau nez “doux”, joli fruit bien mûr, touches boisées fines et épicées, bouche suave, très agréable toucher de bouche, matière assez dynamique, qui “bouge” en bouche, joli vin), Pavie-Macquin (très joli nez fruité/épicé, complexe, avec des notes presque orientales, le fruit est toujours là en bouche, la matière est vibrante, très dynamique, avec un côté plein et gourmand et une belle longueur fruitée, sans doute un des, sinon le plus beau vin de cette dégustation).

Meurtre sur une bouteille de Saint-Emilion 2010

Pomerol : La Pointe (nez “direct” sans artifice, du fruit, bouche dans le même esprit, matière sans esbroufe, un vin relativement simple mais doté d’une belle buvabilité).

Moulis : Poujeaux (assez joli vin, matière déliée, détendue, bien mûre, sans lourdeur et sans excès de bois, digeste).

Saint-Julien : Lagrange (relative délicatesse, du fruit, bouche assez détendue, de la fraicheur, pas austère), Léoville-Barton (joli nez fin, matière suave en bouche, sans crispation, juteuse), Léoville-Poyferré (nez élégant, du fruit souligné par un joli boisé fin, bouche dans le même esprit détendu avec du fruit et une vraie élégance).

Dégustation de Bordeaux 2010 - Le stand Pauillac

Pauillac : Pichon-Longueville Baron (nez fin, élégant, joli fruit mûr, bouche pleine, déliée, sans austérité, agréable finale fruitée), Pichon Longueville Comtesse de Lalande (assez proche de son “cousin” dans l’esprit avec cette sensation détendue de la matière et un côté goûteux/sapide d’une matière mûre et pleine).

Sauternes/Barsac : Guiraud (un côté très naturel, “évident”, de la matière, joli gras en bouche, sans excès de sucre, un vin très dynamique et frais, difficile à recracher…), de Fargues (joli confit qui reste dynamique, pas lourd et très savoureux, avec un petit côté “vibrant”), Climens (se distingue par un boisé assez marqué, mais la matière est très riche, puissante, peut-être un peu monolithique aujourd’hui, mais ce vin devrait bien évoluer. Là aussi, pour amateurs de sensations fortes…).

Pour conclure sur ce millésime, même s’il se présente de façon relativement réservée aujourd’hui, derrière cette réserve on perçoit en général de jolies matières et surtout un bel équilibre global qui ne s’exprime pas en séduction aujourd’hui dans la plupart des cas, mais qui semble promis à une belle évolution. De mémoire, le millésime 2005, qui est clairement une très grande année, ne jouait pas non plus sur un registre flatteur au même stade d’évolution des vins. Alors il faudra se montrer un peu plus patient avec les 2010 qu’avec les 2009…

 

 

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Cet article a 6 commentaires

  1. LABORDE

    Incroyable que nous ne citiez pas Château CLINET 2010 (à Pomerol), parmi les « musts » de la dégustation.

    1. Philippe Barret

      Je comprends qu’en tant que propriétaire de Château Clinet vous soyez déçu de notre absence de commentaire. Vous le savez, une dégustation n’est qu’une impression à un moment donné. Avec tous les aléas que cela suppose (ordre des vins, fatigue, etc). J’ai plutôt apprécié Château Clinet puisque je l’ai noté 13- , ce qui est, dans ma hiérarchie personnelle, loin de représenter un jugement défavorable (je ne comprends pas les critiques qui ne notent qu’entre 15 et 19…). Il se trouve que l’article publié ne retient que les vins qui me sont apparus un cran au-dessus (notes de 14 et plus). Donc rien d’incroyable, simplement une modeste impression…

  2. LABORDE

    Incroyable que nous ne citiez pas Château CLINET 2010 (à Pomerol), parmi les « musts » de la dégustation.

    1. Philippe Barret

      Je comprends qu’en tant que propriétaire de Château Clinet vous soyez déçu de notre absence de commentaire. Vous le savez, une dégustation n’est qu’une impression à un moment donné. Avec tous les aléas que cela suppose (ordre des vins, fatigue, etc). J’ai plutôt apprécié Château Clinet puisque je l’ai noté 13- , ce qui est, dans ma hiérarchie personnelle, loin de représenter un jugement défavorable (je ne comprends pas les critiques qui ne notent qu’entre 15 et 19…). Il se trouve que l’article publié ne retient que les vins qui me sont apparus un cran au-dessus (notes de 14 et plus). Donc rien d’incroyable, simplement une modeste impression…

  3. classinator

    Clairement 2009 grand vin à boire dans les prochaines années, 2010 grand millésime de garde !!!

  4. classinator

    Clairement 2009 grand vin à boire dans les prochaines années, 2010 grand millésime de garde !!!

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