Avec un terroir d’exception et un travail irréprochable, ce nom mythique de la biodynamie et de la viticulture française a de quoi faire rêver… Zoom sur cette grande signature ligérienne et interview du vigneron iconique. Un domaine qui compte à nos yeux parmi les plus grands vins blancs de Loire. Que dit-on de France ! Et même, osons-le, du monde !

Vins-de-garde

Un domaine à l’histoire presque millénaire…

Domaine mythique s’il en est, la Coulée de Serrant a même le privilège de bénéficier d’une AOC à elle seule (au même titre que Château-Grillet en vallée du Rhône) : il s’agit d’un monopole. Il faut dire qu’elle est reconnue comme une terre de grands vins depuis des siècles. La vigne y fût en effet plantée au XIIe siècle par les moines Cisterciens (en 1130) ; l’ancien monastère existe toujours (il est d’ailleurs classé monument historique). Et depuis, la vigne n’a jamais quitté cette terre. Le millésime 2023 est donc la 893e vendange consécutive ! 

La famille Joly est aux commandes de ce domaine depuis 1960 avec l’arrivée de Denise et Antoine Joly, mais c’est surtout sous la houlette de leur fils, Nicolas Joly, à partir de 1978, que le domaine acquiert ses lettres de noblesse et se positionne peu à peu parmi l’élite des vins ligériens, mais aussi comme une référence des grands vins biodynamiques.

Depuis quelques années, Virginie, la fille de Nicolas Joly, reprend peu à peu la direction du domaine. 

Un terroir unique au monde…

L’AOC s’étend sur 7 hectares, en monopole de la famille Joly. De longue date, le vin de la Coulée de Serrant est considéré comme un breuvage de choix. Il était surnommé « la goutte d’or » par Louis XI, Louis XIV avait même visité le domaine, tandis que l’impératrice Joséphine « raffolait du vin de la Coulée de Serrant« .  Aujourd’hui encore, il est considéré comme l’un des plus fameux vins blancs de France.

Le vignoble de 7 hectares est idéalement situé, près d’Angers, en surplomb de la Loire, à l’endroit où la coulée (le ruisseau) de Serrant se jette dans le fleuve. La proximité du fleuve et de la Coulée crée un microclimat unique. Les vignes de chenin, issues de sélections massales du domaine, sont âgées de 40 à plus de 80 ans et s’épanouissent grâce à une exposition sud-est idéale, qui gorge les baies de lumière

Domaine-Coulee-de-Serrant

…Travaillé le plus naturellement possible

Le vignoble est travaillé en biodynamie depuis 1984, ce qui en fait un pioner en la matière. Les vendanges sont bien sûr manuelles et ce, depuis toujours.

Des vinifications peu interventionnistes 

Les vinifications se veulent très peu interventionnistes, lentes, naturelles et sans artifices ni technologie: il n’y a pas de débourbage (les lies sont considérées comme un élément vivant très riche et utile au bon déroulement des fermentations), pas de passage à froid pour enlever le tartre et diminuer l’acidité (considéré comme trop violent et mortifère pour le vin) ; seules les levures indigènes sont utilisées ; il n’y a pas de collage ni de contrôle des température durant les fermentations : l’idée consiste à laisser les fermentations s’effectuer par elles-mêmes, naturellement. Les vinifications et l’élevage sont menés en tonne de 500 ou 600L, sans aucun bois neuf, puis les vins sont mis en bouteille sept à huit mois plus tard. Nicolas Joly se sert des sons pour supporter le travail des levures en particulier du LA (son lié au soleil dit-il) avec un diapason en 432 hertz (en 44O ou 442 il n’y aurait  pas d’effets ). Cela limite aussi les déviations qui peuvent se produire en fermentation.

« Le vin naît par lui-même »

Nous avons interviewé Nicolas Joly pour mieux comprendre la philosophie du domaine.

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« Le fond du fond, c’est la vérité du goût ! Aujourd’hui, beaucoup de vins sont « bons » parce qu’il y a eu beaucoup de technologie utilisée au cellier pour les produire, ils sont bien faits, irréprochables parfois, mais sans âme, ils ne créent pas d’émotions. A la Coulée de Serrant, il n’y a aucune  technologie utilisée. Le but est de pratiquer une agriculture où la vie peut totalement s’exprimer. La photosynthèse doit être soutenue car c’est elle qui permet à la vigne de convertir un bourgeon en feuilles, fleurs puis fruits donc de capter l’énergie et de la transformer en matière. Il faut que cette énergie soit bien saisie par la plante et pour ce faire, elle ne doit pas être dérangée par un arsenal de produits chimiques… Si le travail dans les vignes est bien mené, il n’y presque plus rien à faire en cave. Le rôle du vigneron étant de faire naître le vin et non pas de le façonner. Je dis d’ailleurs souvent à ce sujet, qu’un beau terroir est comme un bon instrument de musique il  a besoin d’une bonne « acoustique » pour bien exprimer le lieu. La biodynamie est la meilleure des acoustiques quand elle est bien comprise. Le bon vigneron lui est le musicien : ce sont ses décisions qui indirectement passeront dans la bouteille. Je suis un vigneron « conservateur » : je pense que le vin naît par lui-même et que ce n’est pas au viticulteur de le créer par des artifices; on doit juste aider la vigne a les exprimer;  c’est pourquoi je n’utilise que les levures indigènes (qui sont spécifiques à chaque lieu, chaque parcelle) et aucun bois neuf. Un grand terroir, s’il est en vie bien sur, a «  en lui » tout ce qu’il faut et n’a besoin d’aucun artifice. Les filtrations stérilisantes, l’utilisation d’acide ascorbique ou de sorbate de potassium comme alternatives au soufre ne sont pas justes à mes yeux; le sorbate qui permet de marquer « sans soufre » sur l’étiquette est à mon sens presque un poison; Bruxelles a parlé plusieurs fois de l’interdire… Avec une filtration trop serré (cela va jusqu’au tiers de micron) toute l’âme du vin ou presque reste sur le filtre et le vin ne refait jamais totalement  ! Le soufre et a petites doses, est pour moi la meilleure alternative. Dans certain cas on peut faire du «  sans soufre » car le vin en contient un peu naturellement mais cela n’est pas toujours possible si le vin est expédié dans des pays lointains ou a des saisons trop chaudes. Un peu de soufre ne change pas le goût du vin.

A la Coulée de Serrant, nous n’utilisons que du soufre naturel, d’origine volcanique si possible. On traite également les vignes avec du soufre et c’est bien mieux que les produits qui empoisonnent les vignes. Mais la question du soufre est souvent mal expliquée. N’oublions pas que la famille des crucifères (moutarde, roquettes etc) qui comportent plusieurs centaines de plantes parfois médicinales produisent du soufre ! Pourquoi en faire un ennemi ? Pour vendre des artifices !

L’un des gros atouts de la Coulée de Serrant, c’est vraiment son terroir exceptionnel. Ce n’est pas pour rien qu’il s’agit d’un vignoble très ancien et bien choisit par les cisterciens. Ils choisissaient les bons endroits, souvent à proximité d’un plan  d’eau, qui  réfléchit la lumière du soleil ce qui a un effet très bénéfique sur la vigne. Et quand on a un lieu d’une telle qualité, c’est un devoir de respecter leur héritage, voir de l’amplifier et  pour ce faire, la biodynamie est disons «céleste»…

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La biodynamie, quand elle est comprise en profondeur, permet à la plante de bien convertir l’énergie en matière, afin que le raisin porte tout ce qui fait les originalités d’un millésime toutes ses caractéristiques, les subtilités qui le font naître  (chaleur, pluviométrie, luminosité, variation des températures, vents dominants etc). En biodynamie bien comprise tout est affaire de subtilité : on travaille souvent avec des doses très faibles dynamisées une heure (3 a IOO gr par hectare) et  rapidement  répandues sur les sols ou les feuilles; il est difficile de comprendre comment cela peut marcher. Je fais souvent le parallèle avec le téléphone qui nous permet d’entendre la voix de notre correspondant à plus de 10 000km et en moins d’une seconde : chaque préparation biodynamique est comme un écouteur pour la vie, elle permet à la plante de mieux recevoir les ondes et énergies cosmiques qui du printemps a l’automne la nourrissent. La qualité de la luminosité  est  aussi très importante et liée a une préparation très utile à base de quartz. En biodynamie finalement chaque préparation est un lien a un des éléments du système solaire sans lequel la Terre serait un cadavre ;il faut toujours se souvenir que la planète Terre ne possède pas la vie, elle la reçoit parce qu’elle fait partie du système solaire ; sans lui, il n’y aurait plus de vie ou presque  Ce sont les ondes cosmiques qui amènent la vie. Chaque plante a une micro-fréquence et reçoit son propre message de vie. Le problème est qu’aujourd’hui, ce lien entre la Terre et le soleil est perturbé par de nombreux éléments d’origine anthropique, à commencer par des milliers de satellites. Ces nombreuses pollutions hertziennes, toujours passées sous silence, font que la vie descend moins bien sur Terre, elles affaiblissent le message vital qui arrive sous forme de fréquence astronomique. Dans ce contexte, la biodynamie est d’autant plus nécessaire, qu’elle permet a la vigne de se joindre à son essence dyonisienne, ce qui lui permet « d’être ». C’est comme si on était dans une salle avec 200 personnes se mettant à crier en même temps, et la biodynamie serait le téléphone portable qui nous permettrait de pouvoir tout de même parler à ceux du fond de la salle ! Donc pour résumer, la biodynamie sert à accentuer l’écoute des systèmes qui donne vie à la terre, de diminuer les boucliers que les civilisations modernes ont créées (pollution hertzienne…). Elle permet notamment de stimuler grandement la vie microbienne, alors que les désherbants et produits chimiques la tuent. La biodynamie c’est le lien a un système subtil qui génère la vie. Le seul effet « négatif » est que tous les animaux veulent se réfugier sur le domaine !

D’ailleurs, au domaine, beaucoup d’animaux domestiques  ont leurs places (vaches, chèvres , chevaux, ânes, moutons, abeilles…) ; les vaches font le compost. Chaque nouvelle espèce présente sur le lieu peut être comprise  comme une corde supplémentaire que l’on ajouterait à notre instrument de musique qu’est le terroir ; quand il est vivant bien sur  Les animaux la diversité végétale du paysage sont  aussi  une réponse a la monoculture qu’est la vigne que la nature n’aime pas finalement. Ici  des prairies qui pourraient produire des très bons vins restent pour cette raison non plantées .

Pour résumer, je dirais que pour moi, la viticulture conventionnelle empêche le lieu, le terroir et le millésime de s’incarner dans le vin, de s’exprimer. La photosynthèse est empoisonnée par les produits et les traitements systématiques. Les désherbants détruisent la capacité des vignes a se nourrir du sol (mycorhize). Cela peut donner des bons vins, bien faits, mais  apatrides et sans âme, qui n’ont rien à raconter. Au contraire, la biodynamie permet de garder ce lien avec le terroir et le millésime, de les laisser pleinement s’exprimer.  C’est un peu comme la différence entre la beauté naturelle et la beauté par chirurgie esthétique ! De plus, les vins trop « technologiques » sont souvent bons à l’ouverture mais ne tiennent pas longtemps, alors que les vins biodynamiques ont tendance à être l’exact opposé : après quelques heures ou quelques jours même ; ils deviennent magiques !

Les vins de la Coulée de Serrant

Ce domaine produit des vins dans un style très reconnaissable, avec des maturités poussées, une grande richesse et concentration, des arômes très expressifs. Les vins sont si expressifs au nez et amples en bouche qu’il pourrait faire croire à un vin liquoreux. 

A noter que le domaine recommande d’ouvrir ses vins au moins 24h à l’avance ou de les carafer plusieurs fois.

Un terroir exceptionnel, une viticulture biodynamique totale et irréprochable et des vinifications sans technologie et sans artifice sont les ingrédients magiques de la recette de la Coulée de Serrant. Un domaine unique en son genre, qui produit des vins sublimes, prisés pour leur race, leur tension, leur maturité, leur densité, leur matière et leur énergie. A goûter au moins une fois dans sa vie…

Savennières Les Vieux Clos : superbe chenin, élevé en vieux fûts et à la maturité toujours plus tardive du fait de sa position en côteaux dont les schistes lui confèrent une belle minéralité, une trame ample, fraîche et minérale. Une référence de l’appellation.

Savennières-Roche-Aux-Moines Clos de la Bergerie  : situé sur les hauteurs de Savennières et sur les côteaux qui viennent mourir dans la Loire. La composante de schistes du terroir lui assure une grande allonge. Son nez exubérant et sa grande fraîcheur en bouche le rendent irrésistible… 

Savennières Clos de la Coulée de Serrant : Le grand vin du domaine : une cuvée unique en son genre, très aromatique, avec une belle maturité de fruits, une jolie matière dense et de la fraîcheur, une longue finale. Un vin grandiose !

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Clos de la Coulée de Serrant, ce qu’en pensent les guides :

Guide Bettane + Desseauve (Guide 2020) – 2*** Étoiles :

« Planté en 1130, par les moines cisterciens, ce petit vallon courbé sur le versant nord de la Loire constitue une sorte d’éden viticole replié sur un paysage ouvert sur toutes ses faces. Nicolas Joly, en bon apôtre de la biodynamie, en a fait une marque culte, vénérée aux quatre coins du monde. Avec un sens aiguisé de l’observation et de l’expérimentation, il a hissé ce promontoire de schistes rouges à son plus haut niveau, le dotant d’une viticulture modèle. Avec sa fille Virginie, il cultive également quatre hectares en savennières et quatre hectares à la Roche-aux-Moines. Un vignoble brouté par les moutons, picoré par les poules et travaillé à main d’homme, dans une totale symbiose avec la nature. La-coulée est un blanc épuré, aux notes d’herbes fraîches et d’infusion, à l’ossature austère. Peu de soufre à la vinification entraîne parfois des évolutions prématurées et des notes d’oxydation. Le domaine produit également un savennières les-vieux-clos et un savennières roche-aux-moines le-clos-de-la-bergerie. Si La Coulée divise, le vin fait ici défie l’éternité dans ses grandes heures. À goûter au moins une fois dans sa vie, ne serait-ce que pour choisir son camp. »

Revue du Vin de France – 2**Étoiles :

« L’exceptionnel vignoble de la Coulée de Serrant s’étend en lisière d’une falaise schisteuse tombant directement dans la Loire, près d’Angers. La nature du lieu et la qualité de son exposition lui permettent de sortir du lot depuis des siècles. Restauré par Denise Joly dans les années 1960, le domaine a été repris par son fils Nicolas. Ce brillant agitateur d’idées est un fondamentaliste de la culture biodynamique, qu’il a fait sienne à la Coulée de Serrant depuis 1981, date de la première certification. La fille de Nicolas Joly, Virginie s’occupe du domaine. Si les derniers millésimes sont dotés d’une énergie intrinsèque vaillante, des déviances aromatiques viennent gâcher la pureté que pourraient révéler ces terroirs mythiques de la Loire. Ici naissent aussi bien des vins rejoignant le Panthéon des plus grands chenins, comme la coulée-de-serrant 2016, que des blancs plus imprécis et paraissant plus évolués, à l’image du Vieux Clos 2017.

Les vins : les goûter est toujours déroutant. Ils posent la question de la sensation d’énergie qu’un vin peut procurer. Un grand vin ne doit-il pas nous plonger dans une sensation à la fois énergisante et apaisante ? La fougue, la richesse en extraits secs et la tannicité qui jaillissent de ces 2018 mettront certains dans un inconfort gustatif. Le Vieux Clos, le moins précis, dévoile des notes décadentes de pomme au four, avec un gaz carbonique très présent. Issu de trois parcelles de la Roche-aux-Moines, le Clos de la Bergerie développe un gras amer anachronique, avec des saveurs terriennes virevoltantes. Une carrure solide lui confère une structure tannique. La coulée-de-serrant est protégée par une réduction ; la profondeur du terroir équilibre la puissance du millésime, avec l’attaque d’un torrent qui ralentit son débit jusqu’à une rivière plus calme en finale. »

L’équipe iDealwine en visite à la Coulée de Serrant, en compagnie de la famille Joly (Juillet 2023)

Cet article a 5 commentaires

  1. Franc-Gourmet

    La Coulée de Serrant mérite d’être un exemple dans sa région! C’est effectivement le « Château Grillet » de la Loire.
    Étant dans l’Est de la France, je remarque toutefois que la Vallée de la Loire doit encore se faire connaître du grand public. Ce vignoble absolument magnifique a une marge de progression phénoménale, à surveiller. 😉

    1. iDealwine

      Merci de votre intérêt pour le Blog iDealwine !
      Nous partageons votre avis à 300%, tant sur le vignoble de la Coulée de Serrant que sur la vallée de la Loire d’une manière générale…
      Bien cordialement,
      La rédaction

  2. Hani

    Je suis un vieil amateur de ce domaine, depuis au moins 30 ans. Jamais été déçu par un vin du domaine, à condition d’ouvrir le vin avec de nombreuses heures d’avance, et merci à iDealwine d’avoir organisé une e-dégustation avec Virginie Joly, c’était absolument passionnant. D’ailleurs, si elle avait été enregistrée, j’aimerais bien la visionner à nouveau.

  3. ROUBAUD

    La Coulée : aucun autre vin n’est comparable à celui ci. Dégusté dans les conditions requises ( c’est nécessaire ) = un moment surprenant, intense, insurpassable et inoubliable : si ça c’est pas du vin; c’est que c’est de l’or en bouteille ! Pas ** pour la Coulée mais *** ou plus ! Pas d’équivalent … sur la planète.

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