Le projet n’est pour le moment pas sûr d’aboutir, mais il semble tout de même bien engagé. Si l’INAO et l’Union Européenne venaient à en accepter l’idée, on se dirigerait alors vers la création de « Crus d’Alsace » et de « Premiers Crus d’Alsace », basés sur le terroir, à l’image de ce qui se fait en Bourgogne. photo-trimbach-0

Il est, indéniablement, quelque peu curieux pour une région qui produit d’aussi bons vins sur un territoire large et très organisé, de ne pas avoir de classement à la mesure de ses ambitions.  Aujourd’hui, il n’existe en effet que 53 appellations reconnues : 51 grands crus (rendements limités à 55 hl/ha) étalés sur tout le vignoble, une appellation générique pour les vins d’Alsace en général, et une dernière pour les crémants d’Alsace. Aucune strate donc, entre les Grands Crus et les vins sans véritable pedigree. Au consommateur, donc, de s’y connaître pour faire le bon choix. Seule indication communément admise : le cépage. Mais comme le fait remarquer Jean-Michel Deiss (du domaine Marcel Deiss), grand fer de lance de la complantation, le cépage n’indique aujourd’hui plus grand-chose sur la qualité du vin. De même qu’on peut acheter des chardonnays « à 40 centimes de dollar », certains flacons floqués « riesling » ou « gewurztraminer » peuvent se révéler difficiles à boire… L’Alsace, qui avait fondé toute sa classification sur les cépages (même les grands crus étaient classés par types de raisin), a donc récemment autorisé et reconnu le droit à la complantation. Certains vins (ceux de Deiss en tête) ne portent donc plus la mention du cépage sur l’étiquette.

Evidemment, il reste tout à fait utile de préciser les cépages dans certains cas. Il serait fâcheux qu’un acheteur cherchant un gewurztraminer vendanges tardives se retrouve avec un riesling par erreur, la différence au palais étant trop grande pour ne pas être identifiable sur l’étiquette. La région souvent citée en exemple pour son classement efficace, la Bourgogne, n’a d’ailleurs pas eu à composer avec ce problème au moment de se baser exclusivement sur le terroir, pinot et chardonnay obligent. Le cas des bourgognes aligotés a cependant été traité « à part », pour éviter toute confusion, mais le cépage n’est bien heureusement pas la seule indication certifiée pour les vins de Bourgogne…

C’est pourquoi, en parallèle des indications de cépage lorsqu’il est possible ou souhaitable d’en donner, il faut sans doute fonder un système de classement pour identifier non pas la nature, mais la qualité du vin. L’idée de « premiers crus » et de « crus » est donc venue assez naturellement. Les premiers crus (rendements limités à 57 hl/ha) se signaleraient par un nom de lieu-dit, le terme « cru » (rendements limités à 72 hl/ha) désignant des appellations communales, l’appellation « Alsace » restant le premier niveau de la hiérarchie (rendements limités à 80 hl/ha). Là encore, Jean-Michel Deiss est dans l’arène. Il n’est d’ailleurs pas le seul. Olivier Humbrecht, du prestigieux domaine Zind-Humbrecht, est également un ardent défenseur du projet. Il explique en effet sur Decanter.com que pour le moment, 100 candidatures ont été envoyées à l’Association des Viticulteurs Alsaciens, qui a accepté le principe de ce  classement de terroirs en 2014, preuve d’un certain enthousiasme chez les producteurs.

Pourtant, cette idée n’enchante pas tout le monde. Ceux qui produisent des vins relativement médiocres et ne seront pas admis dans ces nouvelles strates, y perdraient au change, puisque les consommateurs pourraient différencier plus facilement les vins de qualité des leurs. Le risque d’une viticulture à deux vitesses est donc réel, certains domaines se trouvant alors décrochés du wagon de tête… L’impact potentiel sur les prix n’est également pas à prendre à la légère.  D’autres pointent le risque de confusion dans l’esprit du consommateur, arguant que dans le monde entier, un vin est d’abord un cépage…

On se dit alors parfois qu’heureusement, la France n’est pas le « monde entier », quand on voit dans des films médiocres des acteurs buvant un « cabewnet » comme s’ils buvaient une boisson générique et homogène… D’ailleurs, l’argument de la confusion ne parait pas très solide, surtout si l’Alsace copie peu ou prou le modèle bourguignon… Une homogénéisation ne fait jamais de mal, quand il s’agit de clarifier… Et puis, les amoureux des vins monocépages pourront toujours indiquer « riesling » sur l’étiquette, puisque ce nouveau classement ne supprimerait a priori pas le système de cépages devenu simplement facultatif.

En clair, les bons producteurs, et les consommateurs auraient tout à gagner à ce nouveau classement… Il faudra juste espérer que l’élaboration de ce dernier ne tourne pas au pugilat sauce émilionnaise… Car dans un premier temps, il faudra bien juger les terroirs sur les vins produits. Les dégustateurs « objectifs et indépendants » seront alors sûrement critiqués par les perdants qui useront et abuseront de recours pour tout mettre par terre.

Il faudra donc sans doute patienter encore quelques années pour s’offrir un premier cru d’Alsace… ou attendre notre prochaine vente 100% Alsace et le classement presque officiel établi par iDealwine (basé sur le terroir et nos goûts personnels) !

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