Arômes du vinLa saveur et la texture des vins rouges que vous goûtez dépendent bien entendu des cépages et des lieux d’où proviennent ces vins mais aussi de la façon dont ils ont été produits, du style et de la signature du vigneron. Par exemple, comme nous allons le voir, de sa façon d’extraire ses jus et encore plus ensuite de leur élevage.

Dans une première partie nous avons examiné deux choix importants que pouvait faire le vigneron en produisant ses vins rouges, deux choix qui se présentent au tout début de la vinification. Va-t-il vinifier à partir de grappes entières (avec leurs tiges que l’on appelle rafles) ou simplement à partir des grains de raisins séparés au préalable de leurs rafles (voire en mixant les deux solutions) ? Choisira-t-il de faire démarrer les fermentations à l’aide de levures sélectionnées ou fera-t-il confiance aux levures présentes sur ses raisins et dans son chai ? Deux choix qui orienteront déjà le type de vin et son goût une fois que la vinification sera achevée.

Aujourd’hui nous allons aller un peu plus loin dans le processus et nous attarder sur deux moments clé de la vinification des vins rouges : l’extraction des jus et ensuite leur élevage avant la mise en bouteille.

Extraction ou infusion ?

L’extraction des éléments constitutifs du futur vin peut s’assimiler en grande partie à l’élaboration de votre thé du matin à partir d’un sachet. Le sachet de thé, comme le raisin, contient des composés aromatiques et des matières colorantes à transmettre à une boisson. Pour le thé, l’infusion des feuilles donne de la couleur, de la saveur et des tannins dans de l’eau chaude. Notons au passage que dans de l’eau froide cette “transmission” se ferait moins bien et plus lentement, ce qui donne déjà une indication sur l’influence des températures de vinification pour les vins rouges. Ainsi, une trop longue infusion de notre fameux sachet ou une eau trop chaude pourront se traduire par une saveur âcre et trop amère.
Avec les baies rouges de raisin, ce sont les peaux qui jouent le rôle des feuilles de thé. L’extraction par diverses méthodes de macération est donc à la base des procédés de production des vins rouges. Et ces différentes méthodes ont une influence immédiate sur les caractéristiques du futur vin. Ainsi, si le type de vin recherché est basé sur le fruit et la consommation rapide, on évitera au maximum l’extraction trop poussée des tannins. En revanche, pour produire un vin de garde, on devine que la macération sera beaucoup plus poussée afin de produire des tannins qui seront le gage de la longévité du vin.
Et l’on devine aisément aussi que l’extraction sera dépendante de trois facteurs essentiels :
– La température de fermentation
– La durée de cette fermentation
– Les procédés physiques et techniques cherchant à renforcer cette extraction.

Comme on l’a vu pour le thé 🙂 , la température de fermentation, en s’élevant, favorise la décomposition des peaux des raisins, ce qui rend l’extraction plus facile et elle accélère également les réactions chimiques. La plupart des vignerons maintiennent les températures de fermentation pour les vins rouges entre 20 et 25°C grâce à des installations qui contrôlent la température. Au-dessus de 30°C on risque de tuer les levures. En-dessous de 15° elles n’agiront pas.

Pour ce qui concerne la durée de macération elle va en général de quelques jours pour des vins légers, jusqu’à cinq semaines pour des vins très concentrés.
De nombreux vignerons utilisent aussi ce qu’on appelle la préfermentation à froid. Ils laissent les peaux de raisin macérer dans leur jus, à basse température (12 à 13°C), ce qui retarde le départ de la fermentation alcoolique. Des grappes peuvent rester ainsi plusieurs jours (de 2 à 4) dans des cuves réfrigérées. Cette méthode permet l’extraction de la couleur et des arômes solubles à l’eau, mais seulement très peu de tannins qui eux ne se libèrent que dans l’alcool produit par la “vraie” fermentation.

Ensuite, lorsque les levures commencent à transformer le sucre du raisin en alcool, le gaz carbonique produit a tendance à faire remonter dans les cuves les parties solides (peaux et pulpe) à la surface en formant ce que l’on appelle le chapeau. Dès que ces parties solides ne sont plus immergées dans le moût en fermentation, l’extraction devient faible. C’est alors qu’intervient pour le vigneron un choix crucial : pour que les parties solides continuent à libérer des éléments (couleur, tannins, etc.) il faut qu’il remette en contact cette matière semi solide avec le jus en-dessous. Pour cela il dispose essentiellement de deux techniques : le pigeage, qui consiste à noyer le chapeau en l’immergeant vers le bas ou le remontage qui revient à pomper du jus en bas de la cuve pour le réinjecter délicatement au-dessus du chapeau. Le second choix du vinificateur sera ensuite celui de la fréquence de ces opérations pouvant aller à plusieurs fois par jour selon le millésime, le cépage et le type de vin recherché.

Une fois la fermentation terminée, on récupère le liquide qui s’écoule de la cuve (vin de goutte) puis on presse le reste à l’aide d’un pressoir (vin de presse).

Pour conclure, un vin pour lequel le vigneron aura été délicat dans ses interventions durant l’extraction, en jouant surtout sur une infusion naturelle, en limitant drastiquement les manipulations des moûts, paraîtra plus délicat, plus “en dentelle” et généralement plus fruité qu’un vin dont l’extraction aura été plus poussée et qui présentera des tannins plus marqués et une concentration en apparence supérieure. Ce qui ne veut pas dire que l’un sera meilleur que l’autre, mais on aura deux vins de style différents, pouvant plaire à des amateurs aux goûts variés. D’une manière générale, pour un même domaine et un même vigneron, les extractions ont tendance à s’affiner et à s’alléger au fur et à mesure des millésimes, un jeune vigneron ayant facilement tendance à vouloir faire “surjouer” ses raisins alors qu’avec l’expérience il va vinifier avec plus de délicatesse. Pour ne prendre que quelques exemples de ce type d’évolution dans différentes régions on peut citer le cas du Domaine Gauby dans le Roussillon, du Domaine Gourt de Mautens à Rasteau, du Château Pontet-Canet à Pauillac, ou du Domaine des Roches Neuves à Saumur-Champigny.

Élevage : du bois ou de la terre cuite ?

A la fin de sa fermentation, le vin est encore loin d’être un produit fini. Avant d’être mis en bouteille et proposé à ses futurs dégustateurs il doit encore passer par la phase de ce qu’on appelle l’élevage. Une période qui peut aller de quelques semaines (par exemple pour le beaujolais nouveau) à plusieurs années comme pour certains vins espagnols (riojas traditionnels de Lopez de Herredia ou les vins de Vega Sicilia) ou italiens (barolos “à l’ancienne” comme ceux de Roagna ou de Conterno ou brunellos toscans). En France les élevages dépassent rarement les 18 mois. Il faut noter au passage qu’un long élevage représente une charge financière notable, à la fois par l’immobilisation en trésorerie qu’il impose et par les investissements en contenants (en particulier pour l’élevage en barriques) qu’il nécessite. Et que ces charges se retrouveront inévitablement dans le prix final de la bouteille…

Le rôle principal de l’élevage est de rendre le vin parfaitement commercialisable, débarrassé de ses impuretés et développant des arômes nets et purs, sans notes fermentaires. Pour les vins rouges il a aussi pour but d’assouplir leurs tannins par une oxygénation lente et modérée.
L’élevage consiste donc à placer le vin pour un certain temps dans des récipients de nature diverses (bois, béton, inox, terre cuite). C’est sans doute le choix du contenant qui est le marqueur le plus important de l’élevage.

Les cuves
Il y a trois sortes de cuves : en acier inoxydable, en béton et en fibre de verre. L’acier inoxydable est le plus moderne de ces trois matériaux. Il reste parfaitement neutre sur le contenu, il est très facile à nettoyer, à détartrer, à désinfecter et il ne possède aucune inertie thermique et peut donc facilement être chauffé ou refroidi. Ces cuves sont surtout utilisées pour produire des vins dont on veut “emprisonner” le fruit et à consommer jeunes.
Les cuves béton ont été essentiellement installées dans les années cinquante. Pour permettre le contact avec le vin, l’intérieur de ces cuves était généralement carrelé ou revêtu d’une couche de résine alimentaire. De nombreuses caves sont encore ainsi équipées, tant ce type de contenant a fait ses preuves. Contrairement à l’inox, c’est l’inertie thermique qui est appréciée dans le béton, surtout lorsque les cuves sont enterrées. Elles permettent dans les caves mal isolées de maintenir des températures stables dans les vins sans nécessiter de grandes dépenses énergétiques, d’où leur succès dans les vignobles du sud de la France. Et elles restent neutres aromatiquement.
Le plastique est arrivé ensuite dans les chais. Les fabricants ont mis au point des technologies alliant la fibre de verre aux résines polyesters. Ce matériau léger et économique permet de produire à moindre frais des cuves de formes et de volumes très variables. Considéré comme moins noble, ce type de cuve sert surtout à stocker une petite partie des vins d’un domaine avec un système de chapeau flottant qui permet de garder le vin à l’abri de l’air même si son niveau fluctue dans la cuve. Très utile pour gérer les variations de production d’une année sur l’autre.

Le bois
Elevage en fûtsC’est le contenant historique pour le transport et le stockage du vin. En fonction des régions, les volumes des contenants varient en raison de vieilles traditions locales : la barrique bordelaise contient ainsi 255 litres, la pièce bourguignonne 228, la feuillette de Chablis 132, la barrique champenoise 205, le demi-muid du Rhône 600, etc.
Le bois est le matériel de stockage le plus efficace pour oxygéner en douceur le vin qu’il contient. Mais il en absorbe également une petite quantité et cette perte est compensée par l’opération de l’ouillage, consistant à combler le vide occasionné avec un vin identique. L’âge d’une barrique ne s’exprime pas en durée, mais en nombre de vins. Plus le contenant est grand, plus l’oxydation sera modérée. Le vigneron a donc sous la main une véritable palette entre l’âge de ses barriques et leurs différentes contenances, palette avec laquelle il pourra faire exprimer très différemment son vin.

La terre cuite (amphores)
C’est à la fois une des méthodes les plus anciennes (bien avant le tonneau), que l’on retrouve dans les pays historiquement pionniers comme la Géorgie, et aujourd’hui une des plus “modernes” puisque de nombreux vignerons à la recherche de nouvelles expressions de leurs vins vinifient une petite partie de leur production en amphores de terre cuite pour produire une cuvée spéciale. L’amphore peut être parfois enterrée (stabilité thermique assurée) et également utilisée pour les fermentations. Pour l’élevage, elle permet de ne pas subir la “froideur” de l’inox ni l’empreinte boisée de la barrique. Elle permet surtout, selon les vignerons qui l’utilisent, un meilleur potentiel ménagé de l’oxygénation, ses formes arrondies étant propices à une bonne circulation du liquide, en créant des courants internes. En outre, la terre cuite semble posséder des propriétés antiseptiques qui empêcheraient les déviations et permettrait de préserver le fruit tout en faisant ressortir la minéralité des vins. En quelque sorte l’amphore permettrait d’avoir les avantages de la barrique sans l’inconvénient du boisé et la transmission de tannins secs. Pour certains cépages particulièrement tanniques comme le malbec ou le mourvèdre, le résultat peut être spectaculaire comme le prouvent les vins du Domaine du Mas del Périé à Cahors ou la cuvée En-Sol du Domaine de La Tour du Bon à Bandol.

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