Vin et réchauffement climatiqueAlors que la COP21 (Conference of the parties) s’est achevée vendredi dernier et que l’accord semble prometteur, nous nous sommes interrogés – comme beaucoup de viticulteurs et de professionnels du vin- sur les liens entre réchauffement climatique, viticulture et vinification ; et aussi sur les initiatives pour réduire l’impact des activités autour du vin sur l’environnement.

Si pour l’instant le réchauffement climatique déjà à l’œuvre semble être globalement une bonne chose pour la qualité des vins, passé un certain seuil, la tendance devrait nettement s’inverser.

«Maintenir la barre du réchauffement climatique en dessous des 2°C est un enjeu vital pour la viticulture. », estime Joël Rochard, spécialiste climat à l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV), pour qui la COP21 était un moment-clef pour le futur de la viticulture française. En effet, Jean-Marc Touzard, de Montpellier SupAgro enchérit « En deçà de 2°C, tout le vignoble peut s’adapter, au-delà, les phénomènes – vendanges précoces, vins plus alcoolisés – que les vignerons observent depuis les années 1990 vont s’accélérer ». Il précise ainsi que « les vins seront de plus en plus alcoolisés, alors qu’ils ont déjà pris 2,5 degrés en 30 ans ». La fourchette des deux degrés de réchauffement à ne pas dépasser, semble donc également primordiale pour le futur des vins français, dont la qualité est largement liée à ses terroirs. « Au-delà de 2°C, c’est une révolution qui peut être dévastatrice. » met en garde M. Rochard.

La viticulture, enjeu non oublié à la COP21 :

Le 7 décembre s’est tenue dans le cadre de la COP21 une table ronde sur la viticulture. Cinq représentants de la viticulture française et étrangère étaient invités à témoigner sur le thème du réchauffement climatique et la viticulture : Robert Eden du Château Maris en Minervois La Livinière (en bio-dynamie), Jean-Guillaume Prats (Moët Hennessy), Alice Cathiard Tourbier (Smith Haut-Lafitte), Valentina Lira (Choncho & Toro Chili) et Josh Prigge (Fetzer Vineyards, Californie USA).

Le monde viticole est en effet grandement concerné par le changement climatique et la COP21, comme le relate l’AFP : « Un coup la grêle, puis des inondations, et pour finir, la canicule: le climat est devenu fou et nos savoir-faire séculaires ne protègent plus nos vignes« , soupirait ainsi un vigneron languedocien (région où les viticulteurs sont particulièrement inquiets du fait du réchauffement climatique). « A défaut d’inverser la tendance, on espère au moins que les dirigeants de la planète seront assez responsables pour limiter les dégâts à la COP21« .

Les viticulteurs et les amateurs de vins français peuvent se réjouir de l’accord prometteur de la COP21, même s’il reste à voir l’effectivité de son application à partir de 2020. Cepar « au moins 55 pays » représentant « au moins 55 % » des émissions mondiales1. Cet accord a été très largement salué comme un succès pour l’environnement, un tournant historique dans l’écologie mondiale, l’objectif étant de limiter la hausse des températures à 1,5°C (un objectif très ambitieux qui paraît presque inatteignable2). Si cet accord permet de limiter le réchauffement climatique entre 1,5 et 2°C, c’est déjà une très bonne nouvelle pour l’Humanité (et pour la viticulture française !).

Le réchauffement climatique modifie largement les vins

La vigne est une des cultures les plus sensibles au réchauffement climatique. Concrètement, avec le réchauffement déjà à l’œuvre, on observe d’ores et déjà de nombreuses évolutions au sein de la vigne ayant des conséquences sur le vin lui-même. Les vendanges commencent plus tôt car les raisins sont matures plus rapidement (en moyenne deux à trois semaines plus tôt en France qu’il y a trente ans). Les vins atteignent des niveaux d’alcool supérieur du fait de la chaleur et de l’augmentation de la teneur en sucre des raisins ; ils pourraient gagner 1° par décennies. Dans les régions les plus chaudes, la chaleur et la baisse des précipitations provoquent des sécheresses qui diminuent les rendements et précarisent la récolte. L’irrigation deviendra probablement indispensable dans les régions les plus arides.

Si le réchauffement climatique se poursuit à un rythme similaire, le goût même des vins devrait changer : acidité moindre, tanins plus mûrs, sucrosité et volume plus importants, arômes différents …

Vin et réchauffement climatique C’est aussi la carte des vins qui pourrait (devrait) être totalement chamboulée. Cela devrait en effet favoriser le développement de la viticulture de qualité à des latitudes plus septentrionales, comme au Royaume-Uni où la viticulture se développe rapidement avec en une trentaine d’année le passage de quelques vignobles à plus de 600 aujourd’hui (notamment pour les vins effervescents), ou même en Scandinavie où certaines régions se dotent de vignes. Inversement les vins français par exemple, se modifieraient largement. Les vins de la moitié Sud du pays devrait largement perdre en qualité et en équilibre, ceux du Nord pourraient continuer à s’améliorer, jusqu’à un certain seuil ou ils devraient également muter pour perdurer. Les champagnes et les vins d’Alsace n’auraient alors plus grand-chose en commun avec aujourd’hui. Différentes études ont été menées récemment par l’INRA et concluent que partout, la viticulture devra être largement repensée et transformée pour perdurer.Vin et réchauffement climatique

La viticulture française tente d’ores et déjà de s’adapter au changement climatique

Les viticulteurs ont déjà commencé à s’adapter au dérèglement climatique. Par exemple, à Châteauneuf-du-Pape, la vigne est taillée en gobelet pour la protéger du soleil et ailleurs, l’effeuillage est parfois plus léger qu’auparavant pour la même raison. Les vendanges sont parfois avancées pour limiter la teneur en sucre. Il est également de plus en plus envisagé de modifier les cépages autorisés dans certaines régions, comme c’est le cas à Bordeaux où le CIVB souhaite autoriser de nouveaux cépages plus résistants,  à titre expérimental car le merlot est déjà menacé (peu résistant aux fortes chaleurs). « On cherche à réintroduire d’anciens cépages ou à en créer de nouveaux ou encore à en importer afin qu’ils soient à la fois adaptés à la sécheresse, qu’ils accumulent moins de sucre ou davantage d’acidité« , explique Inaki Garcia de Cortazar Atauri (INRA PACA).

Les liens entre réchauffement climatique et vins sont à double-sens et la viticulture, en tant qu’activité agricole, joue également un rôle non négligeable dans le réchauffement climatique.

La viticulture conventionnelle : une activité agricole souvent très nocive pour l’environnement

La viticulture est l’une des activités agricoles les plus consommatrices de produits phytosanitaires (fongicides et pesticides) – la vigne étant particulièrement sensible aux maladies, parasites et insectes – et les plus polluantes pour les sols et l’eau. Des années 1950 jusqu’aux années 1990, les vignes étaient traitées de manière systématique, préventive et curative. Ainsi, en 2002, la viticulture représentait encore 15,6% du marché des pesticides, alors que les vignobles ne constituaient que 3,2% de la SAU3 (surface agricole utile). De plus, l’utilisation de la chimie dans les vignes a participé à la fragilisation des sols, appauvrissant la diversité de la microfaune et de la microflore, ces sols résistent désormais moins bien aux événements climatiques extrêmes (sécheresses, orages …)

Si la viticulture a largement contribué à la pollution des sols et des eaux, elle a également fait de nombreux progrès depuis une vingtaine d’années et dispose surtout d’une grosse marge de manœuvre pour continuer à réduire ses impacts sur l’environnement et sa nocivité pour la santé. En ce sens, la viticulture biologique apparaît comme la meilleure solution

Les initiatives du monde du vin pour réduire son impact sur l’environnement :

Les vignerons, très attachés à leur terroir, « sont conscients des enjeux climatiques et environnementaux« , assure M. Rochard. Ils cherchent de plus en plus à agir à leur niveau pour réduire leur impact sur l’environnement et notamment leurs émissions de carbone.

Le passage à l’agriculture biologique est évidemment une voie bien plus respectueuse de l’environnement. L’élimination des engrais et pesticides chimiques est bien entendu souhaitable, tant pour l’environnement que pour la santé des consommateurs. L’abandon des engrais chimiques azotés diminuerait directement les émissions de gaz à effet de serre et accroîtrait le potentiel de séquestration du carbone dans le sol4. L’enherbement des vignes est également une bonne solution pour stimuler la biodiversité au sein des vignes, mais également pour limiter l’évapotranspiration et économiser l’eau. Le passage à la viticulture biologique répond de plus, à une forte demande de la part des consommateurs.

Surtout, les viticulteurs se sentent de plus en plus concernés par le réchauffement climatique ; ils sont nombreux à opter pour des moyens de production moins polluants, à réduire leur bilan carbone … Par exemple, la Champagne, première région viticole à conduire un bilan carbone dès 2003, revendique une diminution de 15% des émissions de CO2 par bouteille et vise une réduction de 75% de son empreinte carbone à l’horizon 2050. L’allégement du poids bouteille (assez important pour les champagnes notamment) est un levier assez simple pour réduire son bilan carbone. L’adoption d’écocaves enterrées avec des toits végétalisés est une autre option.

Et chez iDealwine ?

iDealwine et le développement durableAutre exemple, chez iDealwine, nous essayons nous aussi à notre échelle et modestement, de limiter notre impact sur l’environnement. Ainsi, nous utilisons des emballages 100% recyclables et nous encourageons au maximum nos clients à regrouper leur commande pour les livraisons (limitant ainsi le bilan carbone). De plus, grâce à la nature de notre activité et au fait que l’essentiel est dématérialisée (numérique), nous n’utilisons quasiment pas d’impression papier (aucun catalogue client …). Enfin, dans le choix des vins que nous vendons en achats directs, nous privilégions de plus en plus et autant que possible les vignobles respectueux de l’environnement (biodynamie, bio et culture raisonnée), qui est également pour nous un gage de qualité supplémentaire des vins.

Valéry Laramée de Tannenberg et Yves Leers  ont écrit « En réchauffant le climat, l’homme est peut-être en train d’écrire l’ultime épisode d’une très ancienne série : la conquête de la vigne. »5 Sans être aussi pessimistes, nous pensons qu’il est effectivement urgent de s’investir largement pour sauver la planète et la vitis vinifera. D’autant plus, qu’il faut le rappeler, la viticulture française représente 12 Mds d’euros de chiffre d’affaires en 2013 pour 250.000 emplois directs.

1 Audrey Garric, « L’accord obtenu à la COP21 est-il vraiment juridiquement contraignant ? », lemonde.fr, 14/12/2015

2 Sylvestre Huet, « COP-21 : QUE VAUT L’ACCORD DE PARIS ? », sciences.blogs.liberation.fr, 14/12/2015

3 Sylvaine Boulanger-Fassier, « La viticulture durable, une démarche en faveur de la pérennisation des territoires viticoles français ? », Géocarrefour [En ligne], Vol. 83/3 | 2008, mis en ligne le 01 octobre 2011, consulté le 10 décembre 2015. URL : http://geocarrefour.revues.org/6856 ; DOI : 10.4000/geocarrefour.6856

4 Cathy Lafon, « COP21 : quel vin boirons-nous en 2050 ? », Sud-Ouest.fr, 01/12/2015

5 Menace sur le vin, les défis du changement climatique, octobre 2015

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